La manière dont les pays s’adapteront à la Quatrième révolution industrielle (4IR) déterminera s’ils « prospèrent » ou « stagnent » et pourrait diviser davantage la main-d’œuvre et accroître les tensions sociales, selon la dernière version du Rapport sur la compétitivité mondiale du Forum économique mondial.
Près de 40 ans après sa première évaluation annuelle de l’économie mondiale, le rapport du Forum de 2018 utilise une nouvelle méthodologie pour comprendre l’impact total de la 4IR et met en évidence l’importance croissante de facteurs tels que le capital humain, l’agilité, la résilience, l’ouverture et l’innovation.
Le nouvel indice mesure 140 économies sur la base de 98 indicateurs, organisés en 12 « piliers » ou moteurs de productivité, afin de déterminer la distance à laquelle se situe une économie par rapport à la situation idéale ou à la « frontière » de la compétitivité.
Ce sont les États-Unis, en tête du classement, qui se rapprochent le plus de « la frontière de la compétitivité ». Singapour, l’Allemagne, la Suisse et le Japon complètent le top cinq. À l’opposé, Haïti, le Yémen et le Tchad se sont révélés être les économies les moins compétitives.
La compétitivité n’est pas seulement associée à des revenus plus élevés, mais également à de meilleurs résultats socio-économiques, y compris la satisfaction des individus à l’égard de leur vie.
Thierry Geiger, Directeur du département Recherche et impact régional, Avenir du progrès économique, au Forum économique mondial, explique la nouvelle approche qui a servi à mesurer la compétitivité : « La productivité est le principal moteur de la croissance en 2018. La Quatrième révolution industrielle battant son plein, il est nécessaire de repenser les moteurs de la compétitivité et donc de la croissance à long terme. »
Ces nouveaux moteurs incluent la capacité d’adaptation et l’agilité de toutes les parties prenantes, y compris les gouvernements. Dans quelle mesure sont-elles capables d’accueillir le changement et de s’y adapter et d’améliorer leurs économies ?
Les vainqueurs du classement
Les États-Unis sont en tête du classement grâce à un score de 85,6 sur 100 et font partie du top 3 pour sept des 12 piliers. Leur culture entrepreneuriale leur a permis de réaliser un très bon score dans le pilier Dynamisme des entreprises. Ils sont également très performants dans les domaines Marché du travail et Système financier.
Mais plusieurs aspects ont montré qu’il leur reste du chemin à faire. À la 46ème place et avec une espérance de vie de 67,7 ans, le pays accuse un retard considérable par rapport à d’autres économies avancées dans le domaine de la santé. Il est également loin de la frontière en termes de freins et contrepoids (40ème place), d’indépendance de la justice (15ème) et de corruption (16ème).
Les 11 premiers pays ont tous obtenu plus de 80 points de compétitivité. Singapour (83,5), qui se classe au deuxième rang, se distingue par son score d’ouverture élevé et arrive en tête dans le pilier Infrastructures, avec un score presque parfait de 95,7 grâce à son système de transport, considéré comme le meilleur au monde.
L’Allemagne, en troisième position, est l’économie européenne la mieux placée en termes de compétitivité, avec une force particulière en matière de capacité d’innovation (première place avec 88 points), de dynamisme des entreprises (82 points, juste après les États-Unis) et de santé (94).
Marge de progression
L’une des principales conclusions du rapport est que toutes les économies pourraient s’améliorer dans certains domaines. Par exemple, bien que Singapour se classe en tête des économies « prêtes à affronter l’avenir », le pays se situe derrière la Finlande en termes de main-d’œuvre qualifiée dans le domaine numérique.
Et tandis que les économies à revenus faible et intermédiaire peuvent tirer parti de la technologie pour relancer la croissance, le rapport souligne l’importance des « vieux » piliers du développement, tels que la gouvernance, les infrastructures et les compétences.
Constat inquiétant, sur les 140 économies étudiées, 117 sont à la traîne en termes de qualité des institutions, ce qui affecte leur compétitivité globale.
Le rapport fait également état d’une faiblesse généralisée dans la maîtrise des processus d’innovation, avec 103 pays dont le score est inférieur à 50 lorsqu’on s’intéresse aux procédés allant de la création d’idées à la commercialisation d’un produit.
L’un des messages clés de l’indice de compétitivité mondiale 4.0 est qu’il n’y a ni gagnant ni perdant – mais plutôt, que face aux nouveaux défis technologiques, les pays peuvent apprendre les uns des autres.
« La compétitivité n’est ni une compétition ni un jeu à somme nulle : tous les pays peuvent prospérer », a déclaré Saadia Zahihi, membre du conseil d’administration et directrice du centre pour la nouvelle économie et la société.
« Avec des opportunités de bonds en avant économique, la diffusion d’idées innovantes au-delà des frontières et de nouvelles formes de création de valeur, la Quatrième révolution industrielle peut donner les mêmes chances à chaque économie. Mais la technologie n’est pas une solution miracle en soi. Les pays doivent investir dans les personnes et les institutions pour concrétiser les promesses de la technologie. »
Avec weforum