Produire plus en respectant le minimum réglementaire européen, ou préserver ses fondamentaux… Avec l’envolée du marché de l’agriculture biologique, deux visions s’affrontent.
La ferme du Menez-Hom, à Dinéault (Finistère) : 70 hectares, 110 poules et 3 labels bio. Il y a une vingtaine d’années, Paul Hascoët élevait encore sur ces terres des vaches laitières en conventionnel. « C’était de l’esclavage », juge-t-il. En 2000, dans un mélange de « ras-le-bol » et de sursaut « éthique », il convertit l’intégralité de son exploitation à l’agriculture biologique.
Dix ans plus tard, nouveau sursaut : le règlement européen de l’agriculture bio est réformé, et le label communautaire, feuille étoilée sur fond vert, vient détrôner le « AB » français. Paul et Nadine Hascoët ne s’y retrouvent plus. « Beaucoup de fondamentaux de la bio manquaient, estiment-ils. Le lien au sol, l’interdiction de la mixité [du bio et du non-bio dans la même exploitation], le bien-être animal… » Les fermiers se tournent donc vers la toute nouvelle mention Bio-Cohérence, créée en 2010 par des acteurs de la filière bio française, afin de « reprendre en main [leur] cahier des charges ».
Mais il leur manquait encore quelque chose. « Des échanges humains, réfléchit Paul. Et on voulait aller plus loin dans notre démarche, être cohérents d’un bout à l’autre. » Des amis leur parlent de Nature & Progrès, une association pionnière de la bio, qui repose notamment sur la participation des producteurs et des consommateurs. Ils adhèrent, trouvant dans ce troisième label un ultime moyen de se distinguer d’une agriculture biologique qui, pour répondre à une demande galopante, cherche à produire plus, plus vite, parfois au détriment de ses valeurs fondamentales.