« Nous ne pouvons plus compter sur les financements extérieurs pour faire fonctionner notre institution. Nous devons désormais affirmer notre souveraineté financière à travers le prélèvement d’une taxe sur les importations pour financer l’organisation panafricaine ».
La déclaration est signée Alpha Condé, président de la République de Guinée et nouveau président de l’Union africaine (UA). Il s’est ainsi exprimé à l’issue des travaux du 28ème sommet de l’institution panafricaine qui s’est achevé hier, mardi 31 janvier à Addis-Abeba (Ethiopie).
Pour rappel, l’UA a adopté lors de son précédent sommet à Kigali (Rwanda) en juillet 2016 un principe de taxation sur les importations de tous les pays membres de l’organisation afin de financer l’activité de l’Union. Fixée à 0,2%, cette taxe serait appliquée à toutes les importations des pays membres, à l’exception de certains biens de première nécessité, dont la liste n’est toujours pas précisée.
Depuis l’année dernière, Paul Kagamé réclame son entrée en vigueur, dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme de l’institution. Le président rwandais a toujours estimé que sans cette réforme (qui touche également, la meilleure clarification des rôles et responsabilités de la commission, l’érection du NEPAD en une agence de développement de l’UA ou encore la mise en œuvre des sanctions à l’encontre des pays qui ne paient pas leurs cotisations), les pays africains n’avaient que « peu de crédibilité » face à ses partenaires étrangers.
En finir avec la dépendance étrangère
En effet, le budget prévisionnel 2016-2017 -hors opérations de maintien de la paix- de l’UA est établi à 707 millions d’euros, dont 73% sont pourvus par les dons de l’Union européenne, la Chine, la Banque mondiale et les Etats-Unis. Les 27% restants proviennent des cotisations des Etats membres qui, cependant, accusent souvent soit des retards ou des défauts de paiement. En effet, les difficultés économiques rencontrées par certains gouvernements africains -comme les effets de la chute du cours du pétrole- peuvent parfois amoindrir leur capacité à honorer leurs engagements auprès de l’UA. C’est donc dire la dépendance de l’Organisation continentale vis-à-vis des institutions étrangères. Une dépendance avec laquelle certains pays du continent ne cachent pas leur volonté de rompre, en témoigne encore le discours du roi du Maroc, Mohammed VI, prononcé à l’occasion de la réintégration du royaume chérifien au sein de l’institution panafricaine :
« Il est temps que les richesses de l’Afrique profitent à l’Afrique. Nous devons œuvrer afin que notre terre, après avoir subi des décennies de pillages, entre dans une ère de prospérité. […] Depuis plusieurs années, le taux de croissance de certains pays du Nord ne dépasse pas celui de certains pays africains ; la faillite de leurs sondages révèle combien ils ont perdu toute capacité de comprendre les aspirations de leurs peuples ! Et pourtant, ces pays à la situation sociale et économique défaillante, au leadership faiblissant s’arrogent le droit de nous dicter leur modèle de croissance ! Je le répète ! La notion de tiers-mondisme me paraît dépassée ! Ces agissements relèvent plutôt de l’opportunisme économique : la considération et la bienveillance accordées à un pays ne doivent plus dépendre de ses ressources naturelles et du profit qu’on en espère ! ».
Le président Alpha Condé a la responsabilité de gérer touts les dossiers chauds de l’institution pendant une année. A cette allure peut-être assistera-t-on à l’entrée en vigueur définitive de cette taxe sur les importations des pays africains.
Avec http://afrique.latribune.fr/