Le chef de l’Etat russe Vladimir Poutine a formulé les conditions de sa candidature pour un nouveau mandat à la présidentielle de 2018. RBTH a demandé aux politologues russes si un nouveau mandat est probable et si Vladimir Poutine a un successeur.
Ainsi, le président n’a toujours pas donné de réponse univoque à cette question. L’idée selon laquelle cela dépendra des résultats enregistrés par le pays a été déjà formulée lors de sa séance annuelle de questions-réponses en décembre dernier.
Vladimir Poutine n’a aucune envie de se lier par des promesses bridant sa liberté politique et risquant d’attirer les accusations de monopolisation du pouvoir, ce qui lui est souvent reproché par l’opposition russe, explique le directeur général du Centre de l’information politique (indépendant), Alexeï Moukhine. Néanmoins, les experts estiment toujours possible que Vladimir Poutine brigue un nouveau mandat.
On ne change pas de cheval au milieu du gué
Il est très probable que l’actuel président russe décide d’obtenir un nouveau mandat de six ans pour rester au pouvoir jusqu’en 2024, déclare Dmitri Orlov, politologue proche du Kremlin et directeur général de l’Agence des rapports politiques et économiques. Compte tenu de la confiance de la société et de la consolidation importante autour de sa personnalité, ce qui, d’après l’expert, sera toujours d’actualité en 2018, les chances de Vladimir Poutine sont élevées.
La consolidation excessive des Russes est précisément ce qui ne lui permettra pas de s’en aller, renchérit Alexeï Moukhine, en faisant remarquer que cette consolidation se maintiendra dans le contexte d’une pression internationale croissante sur la Russie. « Il remplit assez efficacement ses devoirs à l’étape actuelle, son équipe est équilibrée et chacun est à sa place. Pourquoi changer quoi que ce soit ? Il est plus vraisemblable qu’il se retire en cas de prospérité sociale et économique », souligne l’expert en expliquant la logique existante.
Une économie déstabilisée ne devrait pas faire fléchir le chef de l’Etat, car « on ne change pas de cheval au milieu du gué », note pour sa part le président de l’Institut de stratégie nationale, Mikhaïl Remizov. Parmi les principaux éléments, il cite la santé du président et, encore et toujours, la dynamique des états d’esprit dans la société où tout n’est pas aussi prévisible qu’il n’y paraît. « Le général de Gaulle a quitté la scène politique alors qu’il était encore assez populaire. Mais il avait fatigué une grande partie de la société et il assumait la responsabilité de la défaite en Algérie. Il avait déjà fait ce qu’il devait faire et il a décidé de s’en aller. Nous ne savons pas aujourd’hui quels seront les développements dans le Donbass. J’estime que Vladimir Poutine pourrait éventuellement suivre cet exemple », poursuit Mikhaïl Remizov. D’après lui, ces dernières années ont apporté maintes surprises et les tendances existantes ne doivent pas être appliquées au futur, « la situation étant complexe à bien des égards ».
Consensus total
Toutefois, rien ne semble présager pour l’instant de changements radicaux dans les états d’esprit. Alexandre Pojalov, directeur de recherches de la fondation loyale au Kremlin ISEPI (d’études sociales, économiques et politiques), rappelle : selon le sondage réalisé en février dernier par le Centre analytique Levada, le nombre de ceux qui souhaitent que Vladimir Poutine conserve le siège présidentiel après 2018 a plus que doublé depuis décembre 2013. Si il y a deux ans, 47% des Russes voulaient un autre leader, en février 2015, ils n’étaient plus que 25%.
Qui plus est, un nouveau mandat de Vladimir Poutine est également souhaité par différentes forces politiques, fait-il observer : « Nous constatons que la politique de Poutine, tant étrangère qu’intérieure, est partagée aujourd’hui par l’opposition parlementaire également. Par exemple, les communistes qui, traditionnellement, critiquent les méthodes du gouvernement, saluent dans l’ensemble les objectifs fixés par Poutine ». Et personne ne veut pour le moment d’autre leader, affirme-t-il.
Cependant, d’autres experts appellent à ne pas tomber dans le piège d’une apparente absence d’alternative : « Il y a un grand nombre de personnalités dignes dans l’establishment politique », souligne Alexeï Moukhine. « Certaines attentes sont liées à Dmitri Medvedev (premier ministre) et à Sergueï Ivanov (chef de l’administration présidentielle). Toutefois, ce sont des attentes au sein des élites qui n’engagent à rien », note Mikhaïl Remizov. D’ailleurs, plus on parle de perspectives de succession pour un homme politique, plus on nuit à ce dernier, rappelle-t-il. « Ce qui fait que de telles allusions et associations sont appréhendées et évitées aujourd’hui », indique-t-il pour conclure.
Avec ReseauInter