Le gouvernement tunisien a annoncé vendredi son intention d’amender une loi controversée qui permet à un homme d’échapper à des poursuites pour des relations sexuelles avec une mineure, après des manifestations contre un article jugé “rétrograde”.
Une récente affaire survenue dans la région du Kef (nord-ouest), où un homme âgé de 20 ans a obtenu l’autorisation juridique d’épouser une adolescente de 13 ans qu’il avait mise enceinte, a suscité l’indignation. Des dizaines de personnes ont manifesté le 14 décembre devant le Parlement pour exprimer leur colère contre l’article 227 bis du Code pénal, la « loi rétrograde » ayant permis ce jugement.
Un projet de loi examiné « en priorité »
« Après consultation, nous avons décidé de présenter un projet de loi (…) portant sur l’amendement de l’article 227 bis », a déclaré le Premier ministre, Youssef Chahed, à la presse tunisienne. Il a ajouté que ce texte serait examiné « en priorité par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), dans l’attente de revoir ultérieurement tous les articles concernant la lutte contre les violences faites aux femmes. »
Un projet de loi contre ces violences a été élaboré dès 2014, année durant laquelle la Tunisie s’est dotée d’une nouvelle Constitution, mais il attend toujours d’être examiné à l’Assemblée.
« Des lois dépassées »
« Notre pays ne peut pas continuer à se référer à des lois dépassées et qui ne reflètent pas l’esprit des droits et des libertés », a encore jugé Youssef Chahed, plus jeune Premier ministre (41 ans) de l’histoire moderne du pays. Il a en outre affirmé que 2017 serait « l’année de l’enfant » en Tunisie, promettant la mise en oeuvre d’une stratégie, notamment en matière d’éducation.
Si la Tunisie est considérée comme pionnière des droits des femmes dans le monde arabe, ces dernières restent discriminées dans plusieurs cas. L’article 227 bis du Code pénal punit de six ans de prison toute personne ayant « fait subir sans violence l’acte sexuel à un enfant de sexe féminin âgé de moins de 15 ans accomplis ». Mais il ajoute que « le mariage du coupable avec la victime (…) arrête les poursuites ».
Dans le cas de la jeune fille de la région du Kef, le parquet a précisé à l’AFP que le procureur général du tribunal s’était constitué partie civile et réclamait l’annulation de la décision judiciaire ayant autorisé le mariage. Des organisations de protection de l’enfance ont de leur côté affirmé que la notion de consentement ne pouvait s’appliquer à une fille de 13 ans et elles considèrent que l’affaire relève du « viol ».