Le secteur des transports, qu’il soit de marchandises ou de personnes, recrute de manière constante. Tous les acteurs du secteur s’accordent pour dire que la main d’œuvre fait d’ailleurs souvent défaut. Les entreprises, conscientes de cette pénurie, jouent à fond la carte de la formation.
Selon le dernier rapport annuel 2018 de l’Observatoire prospectif des métiers et des qualifications dans les transports et la logistique (OPTL), qui comptabilise les données sur 2017, le secteur compte plus de 723 000 salariés, soit une hausse des effectifs de 3,1 % sur un an avec plus d’une entreprise sur deux qui embauche. En parallèle, le nombre d’offres d’emploi déposées par les entreprises de la branche auprès de Pôle emploi a augmenté de 22 % en un an, pour atteindre plus de 77 000 offres en 2017. Pour 2019 dans le TRM [transport routier de marchandises], on évalue à 25 000 environ le nombre de postes de conducteur à pourvoir”, analyse Florence Berthelot, déléguée générale de la FNTR (Fédération nationale des transports routiers). Les acteurs de cette filière estiment ainsi que le secteur devrait toujours être en pénurie de conducteurs sur 2019.
Avec des postes sous tension, les embauches ne se tarissent pas. Cela vaut également pour le transport des personnes. Les recrutements se poursuivront en 2019. “Comme chaque année, le secteur du transport routier de voyageurs peine à recruter des candidats. Pour 2017, il a déposé près de 12 000 offres auprès de Pôle emploi contre 9 500 déposées en 2015. Par ailleurs, il faut noter que les offres déposées dans les agences ne représentent qu’une partie visible de la demande. De nombreux recrutements se font par d’autres intermédiaires. On peut donc estimer à plus de 20 000 le nombre de postes à pourvoir dans le secteur”, précise Ingrid Mareschal, déléguée générale de la FNTV (Fédération nationale des transports de voyageurs).
Une pénurie de chauffeurs toutes filières confondues
Les filières ne se bornent néanmoins pas uniquement aux seuls postes de chauffeurs et conducteurs. Le secteur bien évidemment recrute sur d’autres métiers. “Les postes de conducteurs ne sont effectivement pas les seuls à être sous tension. Les métiers d’exploitants transport et de mécanicien poids lourds sont également des denrées rares sur le marché”, expliquent Hélène Lecluse et Muriel Haugeard, DRH du transporteur Le Calvez. Même constat chez XPO Logistics : “Il existe une pénurie de candidats dans le secteur du transport en général, en France mais plus largement en Europe. Les postes pour lesquels les candidats sont les plus rares sont les suivants : bien évidemment les conducteurs routiers mais également les exploitants et les affréteurs”, note Rodolphe Pibouteau, directeur des ressources humaines France et Suisse chez XPO Logistics.
À la FNTV, si l’on rappelle que 85 % des salariés des entreprises spécialisées dans le transport de personnes sont des conducteurs, les sociétés de la filière peinent aussi à recruter, par exemple, des mécaniciens pour les autocars. Même constat dans le transport de marchandises. Là aussi, les chauffeurs demeurent le gros des contingents des entreprises. “Les conducteurs représentant 70 % de notre masse salariale, c’est un métier particulièrement en tension. Les entreprises du secteur peinent en effet à remplacer beaucoup de leurs conducteurs qui partent en retraite. Nous sommes confrontés à une pénurie de chauffeurs et de personnel sur les parties maintenance et exploitation. De manière générale, nous disposons des formations, du financement et des postes, mais le secteur est encore perçu de manière négative”, explique Florence Berthelot.
Des formations en interne dans les entreprises
Face à ces pénuries de main d’œuvre, les acteurs s’organisent et multiplient les formations en interne. “Il n’est pas rare de financer pour les salariés un diplôme complémentaire type ADR [Accord pour le transport des marchandises dangereuses par la route] ou CAPTAV [Certificat d’aptitude professionnelle pour le transport d’animaux vivants] quand le candidat est prêt à s’investir dans notre société suite à sa journée de découverte. Depuis trois ans, nous avons également accueilli dans nos activités de nouveaux salariés en reconversion qui ont obtenu leurs permis via le dispositif POEC [Préparation opérationnelle à l’emploi collective] afin d’assurer nos recrutements d’été ou saisonniers”, précisent Hélène Lecluse et Muriel Haugeard. Une démarche similaire chez Fraikin qui propose à ses collaborateurs des parcours de formation pour l’obtention du permis C (poids lourd), CE (super lourd) et du permis D (bus).
Chez XPO Logistics, ce besoin de recrutement permanent se traduit également par des programmes internes pour favoriser la venue de potentiels candidats. “Nous organisons également des sessions dites driver academy avec l’organisme de formation professionnelle Aftral [Apprendre et se former en transport et logistique] et Pôle emploi. Ce sont des sessions où l’on trouve des demandeurs d’emploi dans le cadre de contrats de professionnalisation”, note Rodolphe Pibouteau. Globalement, les fédérations insistent toutes sur le fait que les formations font l’objet de multiples aides d’État. “Pour 2019, le gouvernement s’est engagé à un financement de ces formations dans le cadre du plan investissement compétences (PIC) à hauteur de 90 %. Les 10 % restant doivent faire l’objet d’une recherche de financement (aide de la région par exemple)”, ajoute Ingrid Mareschal de la FNTV.
De son côté, Florence Berthelot de la FNTR rappelle que les POEC [Préparation opérationnelle à l’emploi collective] permettent depuis 2011 de former, via des financements Pôle emploi et autres organismes paritaires dédiés, des personnes au chômage préalablement à leur prise d’un poste en CDI. Ou bien même en CDD d’au moins douze mois. Désormais, les deux tiers des bénéficiaires de ce dispositif ont une promesse d’embauche dans des entreprises de l’activité marchandises contre la moitié en 2016.