La médiation du crédit ne tente pas seulement de fluidifier les relations entre les entreprises et leurs partenaires bancaires. Créée en 2009 en pleine crise de financement des entreprises, la médiation joue aussi des coudes pour assurer le bon financement des reprises. Dans son rapport sur le financement de la transmission des TPE & PME dévoilé ce mercredi, la médiation fait également un point sur un sujet qui devrait concerner 600.000 entreprises au cours des dix prochaines années.
Point positif, les travaux de l’Observatoire ne font pas apparaître de difficultés majeures quant au financement de la reprise, notamment en termes d’accès au crédit bancaire. Si certaines conditions sont remplies, il ne relève pas de difficulté particulière de financement. ” Pour autant, ces conditions doivent être bien prises en compte par les repreneurs, ce qui n’est pas toujours le cas. En outre, le contexte financier et prudentiel évolue, ce qui n’est pas sans influence sur l’offre des financeurs. Au total, la transmission d’entreprise recouvre un grand nombre de situations particulières avec autant d’approches différentes de financement qu’il faut savoir s’approprier “, explique l’Observatoire dirigé par Fabrice Pésin, le médiateur du crédit.
Plusieurs sources de financement
Quelles sont les principales sources de financement mobilisées par les entrepreneurs ? Selon l’Observatoire, les apports personnels ou l’autofinancement pour une personne morale sont déterminants et plus de 80% des repreneurs les mobilisent. L’autre source de financement quasi-systématique est le financement bancaire, soit au nom de la holding d’acquisition soit au nom d’une personne physique. D’autres sources de financement peuvent également être mobilisées, mais dans des proportions plus limitées pour financer l’acquisition proprement dite et pour soutenir les fonds propres de l’entreprise reprise. Citons le crédit-vendeur, les apports des fournisseurs, les prêts d’honneur, les aides publiques, le capital-transmission ou encore le financement participatif.
” Pour les banques, le risque attaché à ce financement est important : la visibilité est limitée, l’appréciation du repreneur est incertaine, de même que la stratégie qu’il mettra en place. En particulier, il s’agit d’une opération plus risquée que le financement d’un investissement matériel ou immobilier classique, et si elle est moins risquée que la création d’entreprise, elle porte sur des montants plus conséquents. Pour la banque, l’analyse du risque va dépendre de deux paramètres essentiels : le profil du repreneur ainsi que la rentabilité de la société reprise au cours des prochaines années. La banque s’intéressera au prix auquel le repreneur souhaite acquérir une entreprise, pour vérifier s’il est en adéquation avec la rentabilité possible de l’entreprise reprise et donc les capacités de financement du repreneur. Elle s’intéressera au plan de financement global envisagé par le repreneur, en étant en particulier attentive à son implication personnelle, en termes d’apports personnels “, observe le rapport.
Résultat, pour sécuriser la ligne de financement, qui portera généralement sur sept ans au maximum, la banque réclamera un certain nombre de garanties : nantissement du fonds de commerce ou des titres de la société, garanties de Bpifrance ou d’une société de caution mutuelle, cautions du dirigeant personne physique, souscriptions d’assurances décès-invalidité pour les hommes-clés, convention de garantie actif-passif…
Des pistes d’amélioration
En dépit de la multiplicité des sources de financement, l’Observatoire avance plusieurs pistes d’amélioration de l’écosystème du financement des transmissions. En raison du caractère jugé lacunaire et insuffisant des statistiques sur le financement de la reprise, il plaide notamment pour la mise en place d’un tableau de bord complet permettant le suivi de l’ensemble des financements consacrés aux transmissions qui permettrait de mieux percevoir les conditions d’accès aux financements par catégorie et taille d’entreprises, par secteur et par type de repreneurs.
Afin de mieux évaluer et valoriser l’entreprise à céder, il est essentiel que les cédants s’entourent de spécialistes. Ensuite, concernant le prix de cession effectif, le rapport recommande d’éviter un poids trop important du service de la dette par rapport à la rentabilité de l’entreprise. ” L’équilibre du projet passe alors par un apport personnel plus conséquent ou un prix de cession plus faible. Malheureusement, les banques indiquent rencontrer régulièrement des cas avec des remontées de dividendes nécessaires au remboursement de la dette senior venant trop fortement impacter la structure cible et ainsi réduire ses moyens financiers “, constate l’Observatoire qui plaide également pour que les dossiers de financement, ” trop souvent mal préparés “, soient clairement documentés. “Il est recommandé à tous les repreneurs d’être accompagnés par un ou des spécialiste(s) possédant une expertise en matière de transmission : expert comptable, réseau d’accompagnement ou cabinet spécialisé. La préparation du financement prend du temps et, entre le moment où le repreneur voit son banquier et le moment où le décaissement des fonds a lieu, il peut s’écouler plusieurs mois. Le temps de préparation et de montage d’un dossier de financement, notamment lorsqu’il comporte plusieurs acteurs (co-financeurs, apporteurs de garantie…), ne doit pas être sous-estimé par le repreneur “, avance l’Observatoire.
La transmission doit être préparée
” La transmission d’entreprises, comme la création, n’est pas un projet ‘facile’. Les problématiques sont nombreuses. Il faut tenir compte de l’état de l’entreprise à céder, de son potentiel de développement, de sa situation financière. Pour qu’une reprise se déroule dans de bonnes conditions, il faut également que le courant passe entre le cédant et le repreneur. Ce point est important car il recouvre une dimension psychologique, affective. Pour le chef d’entreprise qui se sépare de sa société, de son ‘bébé’, l’affaire n’est pas simple. C’est l’une des raisons pour laquelle nombreux sont ceux qui retardent l’échéance avant de céder leur entreprise “, explique Bertrand Carrot, en charge de la communication de l’association Cédants et Repreneurs d’affaires (CRA) qui accompagne les deux parties.
Avec latribune