Il est l’une des figures de proue de l’équipe nigériane du 20-20-20 (dont l’objectif est de faire partie du G20 en 2020). Aucune ambition n’est de trop pour lui.
UBA, la United Bank for Africa, a bien choisi son moment et son support pour reaffirmer ses ambitions. C’est à l’occasion de la Coupe d’Afrique des nations, l’événement le plus regardé par les téléspectateurs africains, qu’elle a lancé sa campagne publicitaire sur les écrans, avec un slogan qui ne manque pas de prétention, « la banque mondiale de l’Afrique ». A l’image de son jeune PDG de 44 ans, Tony Onyemaechi Elumelu, UBA ne finit pas de monter.
Cinq leaders désignés« J’étais en Corée du Sud dans les années 1980 et j’ai constaté que l’économie sud-coréenne était l’affaire de six entreprises : Daewoo, Samsung, etc. », expliquait le président nigérian Olesegun Obasanjo en mai 2007 au Financial Time. Ces propos de l’ancien homme fort du Nigeria conduisent à se poser une question inéluctable : Elumelu doit-il sa fortune à Obasanjo ? Ferait-il partie de ces cinq personnes promues par Obasanjo, qui doivent permettre au Nigeria de grandir et de prospérer, à l’image de la Corée du Sud ?
Les relations entre le premier banquier nigérian et l’ancien président sont connues. Elumelu est bien l’un de ses hommes. Et comme il est devenu l’un des cinq hommes les plus riches du Nigeria, l’on ne peut que se souvenir des paroles de Olesegun Obasanjo. Outre Aliko Dangote, un négociant reconverti dans l’industrie, parmi les acquéreurs des raffineries de pétrole publiques mises en vente par Obasanjo, quelques jours avant son départ du pouvoir, il y a Femi Otedola, qui a, lui aussi, profité de cette cession, ainsi que deux banquiers, Jim Ovia de la banque Zenith, et Tony Elumelu de l’United Bank of Africa. Leurs banques collectionnent les grands marchés publics et, eux-mêmes, les postes dans les conseils d’administration des principaux groupes industriels.
Formation internationaleQuel que soit le coup de main donné par Olesegun Obasanjo, Elumelu ne lui doit pas tout. Sa part personnelle, dans sa propre réussite, est incontestable. C’est tout seul qu’il a collectionné les meilleurs diplômes dans son domaine. Après sa licence en économie de l’Université de Bendel, il décroche son master à l’Université de Lagos. Puis il rejoint la célèbre Harvard Business School aux Etats-Unis. Suffisant pour tout autre que Elumelu, qui continue à se perfectionner. Le Singapour Institute of Management (SIM) puis l’International Institute of Management Development de Lausanne, en Suisse, complètent cet impressionnant parcours.
Bardé de diplômes, il entreprend sa carrière professionnelle avec la même gourmandise.
Il l’entame dans une banque, Union Bank of Nigeria Plc, en 1985, comme jeune professionnel, à 21 ans. Le temps de se familiariser avec son job et une autre banque, All States Trust Bank, l’appelle en 1988. Il y reste sept ans, gravissant les échelons. Puis il quitte la banque, mais aussi le métier qui semblait taillé à sa mesure. Pas pour longtemps. Un rapide tour du côté des assurances et puis d’une société de gestion d’actifs, BGL.
Retour à ses premières amours après cette escapade. Il est nommé directeur exécutif de la Continental Trust Bank Limited avant que la Standard Trust Bank Plc en fasse son PDG en 1997. Il commence à véritablement faire parler de lui.
Paris audacieuxIl fait un premier pari des plus audacieux. Après les dictatures militaires successives, aucune banque ne veut traiter avec l’Etat et les services publics. Elumelu prend le risque. Ses confrères ne sont pas loin de le regarder comme un incompétent ou un inconscient. Les faits lui donnent pourtant raison. La STB engrange les bénéfices de son coup d’audace.
Autre coup gagnant, la transformation de la STB en une banque universelle, offrant tous les services bancaires à travers 80 bureaux ouverts à travers le pays. L’universalité, mais pas seulement. Le traitement personnalisé des clients aussi. Ils sont surpris, ravis d’apparaître si importants aux yeux de leur banque. Moins de 20% des salariés nigérians ont accès aux services bancaires. Le potentiel à conquérir est immense dans ce pays de plus de 100 millions d’habitants.
« Nous avons 18% de parts de marché au Nigeria, nous voulons 30% dans les prochains dix-huit mois. »
Réforme ObasanjoLe tournant décisif qui fait la carrière de ce deuxième enfant d’une fratrie de cinq, est la réforme du secteur bancaire décidée par le président Obasanjo. Pour mettre de l’ordre dans le secteur et obliger les banques à se regrouper, il décide de porter le plancher des réserves des banques à 25 milliards de nairas, soit 190 millions de dollars. Les banques n’ont d’autre choix que de se regrouper. De 89, le nombre de banques tombe à 25. La STB d’Elumelu doit fusionner avec United Bank of Africa. Mission naturellement confiée à Elumelu.
La réussite est totale. La nouvelle UBA devient le leader du secteur bancaire nigérian avec 428 succursales dans tout le pays, cinq millions de clients, un bilan de plus de 600 milliards de nairas. Il n’est pas rassasié pour autant. « Nous avons 18% de parts de marché au Nigeria, nous voulons 30% dans les prochains dix-huit mois ».
Mais le Nigeria ne suffit pas à son appétit.
« Étant étudiant, jeune professionnel et maintenant entrepreneur, l’Afrique a toujours été au cœur de mes rêves, de mes aspirations et de mes prières », a-t-il déclaré à la remise du prix « Leader africain des affaires » en novembre 2006 au Kenya, devançant de prestigieux pairs tels les Sud-Africains Phutuma Nhleko, PDG de MTN, Papi Molotsane, PDG de Telkom, ou encore le Kenyan Vimal Shah, PDG de Bidco Oil Refineries, etc.
Il ne compte plus les distinctions. L’année dernière, Il reçoit le prix « Emerging global bank award », attribué chaque année par le groupe de presse londonien IC à la meilleure banque internationale qui aura exercé une influence significative sur le développement du continent africain.
« L’Afrique a toujours été au cœur de mes rêves, de mes aspirations et de mes prières. »
ExpansionPremière banque d’Afrique de l’Ouest, UBA, déjà présente au Ghana, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et aux îles Caïmans, est en passe de s’établir à Abidjan. « L’Afrique est l’avenir du monde, proclame cet africaniste forcené, et ensemble, nous bâtirons le temps de l’Afrique, le temps où l’Afrique se distinguera dans d’autres sphères humaines que le crime, les guerres et les maladies. Quand les entreprises africaines, dirigées par des leaders africains, conquerront la place centrale de l’arène mondiale des affaires ».
En novembre 2007, UBA prend des parts substantielles de Afrinvest, une banque privée d’investissement spécialisée dans les valeurs et titres africains qui s’appelle désormais UBA Capital (Europe) Ltd.
« Cette participation, explique son auteur, marque une avancée significative de l’ambition de UBA de devenir la banque de référence pour toutes les transactions et les activités commerciales ayant trait à l’Afrique. Nous sommes heureux d’investir dans une affaire aussi bien établie et prospère, reconnue par la communauté d’investissement comme le fournisseur dominant du marché financier africain. »
L’époux du médecin pédiatre Vivian Awele, grand dévoreur d’autobiographies et de livres sur les stratégies de développement et le leadership, ne rêve pas quand il prophétise que« UBA va être la première banque au Nigeria, le leader en Afrique de l’Ouest, la première banque en Afrique et finalement un chef de file mondial ».
avec lesafriques