On le sait, Tesla est une marque automobile pas comme les autres. Mais qu’est-ce qui en fait la spécificité, et d’où vient-elle ? Voici quelques éléments pour mieux comprendre ce qui anime cette entreprise hors du commun.
On a l’habitude de dire que les Tesla sont des ordinateurs sur roues. Mais plus on s’intéresse à (et relaie) l’actualité autour de Tesla, plus on on acquiert la conviction que cette marque n’est pas qu’un constructeur automobile [1]. Elle est bien plus que cela. Bien sûr, son charismatique patron Elon Musk – dont la démission de ses fonctions de PDG n’a eu comme prévu aucune conséquence visible – y est pour beaucoup, mais cela ne fait pas tout. En fait, tous les ingrédients sont réunis pour que Tesla ressemble davantage à une start-up du digital ou un « pure player » qu’à une entreprise industrielle lambda qui fabrique des bagnoles.
Elon Musk est un geek qui a fait ses premières armes sur internet
C’est de notoriété publique, et nous ne vous ferons pas l’injure de réciter l’histoire ni la bio détaillée d’Elon Musk, mais il est quand même bon de se souvenir qu’avant de racheter (et non pas de fonder) Tesla, Elon Musk avait été l’un des fondateurs de Zip2, une startup internet dans le secteur des médias, puis co-dirigeant de Paypal. Il y a incontestablement des morceaux de HTML dans l’ADN de ce garçon, et cela sera certainement déterminant pour la suite. Et pour sa crédibilité auprès des geeks de tous horizons, riches ou moins riches.
Tesla promeut l’open source, et y participe activement
Quel rapport entre réseau social et open source, me direz-vous ? Rien de direct. Mais l’open source est l’une des composantes bienveillantes indissociables d’internet puisqu’il a grandi avec. Et si l’on veut vraiment faire un parallèle, on se rappellera que même Facebook propose un programme open source et s’appuie dessus pour « partager ses connaissances et stimuler l’innovation ». L’open source ne caractérise pas un réseau social, mais toutes les grandes plateformes l’intègrent dans leur ingénierie de développement. C’est aussi un marqueur qui place Tesla dans un mouvement légitimant la marque auprès des communautés de développeurs.
Elon Musk n’est pas seulement PDG, c’est aussi un influenceur
Avec 23,5 millions de followers sur Twitter, Elon Musk ferait pâlir d’envie bien des influenceurs, qui vivent déjà de leur audience avec dix fois moins. L’engagement est également au rendez-vous, puisque chacun de ses tweets est surveillé comme le lait sur le feu, disséqué et analysé, mais suscite surtout des centaines de commentaires, de retweets et de Likes. C’est un peu plus compliqué avec Facebook et Instagram. Après avoir fermé les pages Facebook de Tesla et de SpaceX suite à un défi au printemps 2018, il avait affirmé ne pas aimer ni utiliser le réseau social. Idem avec son compte personnel Instagram, qui comptait quand même 8 millions d’abonnés au moment de sa suspension. Des rapports quelque peu tumultueux avec les entreprises de Mark Zuckerberg, qui ne l’empêchent pas d’être une sorte de community manager de luxe pour ses différentes entreprises.
Les clients Tesla sont une communauté unique, et les premiers ambassadeurs de la marque
S’il est un cas de figure qui illustre parfaitement la notion de Customer Advocacy, c’est bien celui des clients de Tesla. Une communauté loyale et solidaire comme il ne s’en développe que sur internet autour de quelques marques à très forte identité et au pouvoir d’attraction gigantesque. Le premier exemple qui vient à l’esprit avant l’épopée Tesla est évidemment celui d’Apple et ses fameux « fanboys » qui évangélisent contre vents et marées en faveur de leur marque fétiche. On pourrait également faire un parallèle avec Harley-Davidson, dont la communauté ressemblait déjà fortement au « premier réseau social » avant même qu’internet existe. Il suffit de se promener sur quelques-uns des innombrables sites, groupes Facebook et forums pour comprendre l’engouement que suscite la marque Tesla, et à quel point certains sembleraient presque prêts à donner leur vie pour la défendre, au détriment parfois de toute objectivité. Les « convertis » à Tesla affirment haut et fort que jamais de leur vie ils ne reviendront à la voiture thermique, et probablement non plus à une autre marque. Avec de tels ambassadeurs, on comprend que Musk puisse fermer ses pages Facebook et Instagram sur un pari. Sans pression.
Les Superchargeurs Tesla sont des lieux de socialisation
Vous arrive-t-il souvent de vous faire de nouveaux amis quand vous faites le plein de mazout ? C’est pourtant le lot commun de la plupart des possesseurs de Tesla autour des Superchargeurs. Il faut dire qu’ils ont le temps. Selon le modèle qu’ils conduisent et sa version, et donc la capacité des batteries, une recharge en électricité peut prendre entre vingt minutes et une bonne heure, à condition que le Superchargeur délivre toute la puissance demandée et qu’il ne soit pas trop sollicité par plusieurs voitures en même temps. De plus, les Superchargeurs sont généralement situés sur des parkings de confortables hôtels, centres commerciaux, ou restaurants, dans le cadre du programme Recharge à destination. De quoi prendre le temps de se poser autour d’un café pour faire connaissance et parler de son sujet favori : sa Tesla. Et dire du mal des autres marques.
Tesla publie des mises à jour pour ses voitures aussi vite que si c’étaient des applications
C’est absolument unique dans l’industrie : avec une agilité de félin, Tesla est capable de distiller en quelques heures des améliorations sur ses voitures par de simples mises à jour publiées via internet. Mieux, si un truc ne vous plait pas sur votre Tesla ou que vous pensez tenir une super idée d’amélioration, pas besoin de contacter le SAV. Il vous suffit de faire un Tweet directement à Elon Musk et il se pourrait qu’il vous réponde directement, et si votre doléance est brillante, qu’une mise à jour arrive dans les jours qui suivent pour être déployée sur les voitures de la marque. Dernier exemple en date : l’éditeur d’Electrek suggérait à Muskde pouvoir orienter les flux d’air de la Model 3 pour mieux pré-chauffer le pare-brise et les vitres latérales en cas de grand froid. Réponse immédiate d’Elon Musk : « Good idea ». Puis réponse immédiate de Tesla par une mise à jour logicielle de la Model 3. Cette incroyable réactivité est l’une des marques de fabrique des (bons) éditeurs de sites internet ou d’applications mobiles. On la rencontre moins souvent chez les constructeurs automobiles.
Tesla a son programme de bug bounty
Tesla s’appuie sur les communautés internet pour améliorer ses produits et services. En plus de contribuer à l’open source, le constructeur participe à un programme de bug bounty, qui consiste à challenger des développeurs pour qu’ils testent les sites et applications informatiques de la marque à la recherche de failles, en échange de récompenses rémunérées. La marque d’une entreprise qui sait se remettre en question de façon permanente. Ce qui nous amène directement au point suivant.
Tesla a des bugs (pas seulement dans ses voitures)… et un dispositif de hard reset
Que serait un grand réseau social sans ses bugs et ses failles ? Quand on fréquente régulièrement les groupes et forums Tesla, et même s’il y règne une certaine omerta, on relève régulièrement les soucis que certains clients reportent en vue de trouver une solution. Ce qui permet d’ailleurs constater que les réponses vont de la solidarité et du dépannage entre membres au déni complet. Le système d’exploitation au cœur du fonctionnement des Tesla n’est pas exempt de petits dysfonctionnements, mais il y a pratiquement toujours une solution, et elle est évidemment logicielle. Et quand plus rien ne va, rien de tel qu’une bonne réinitialisation, tout à fait comparable au fameux soft ou hard reset que nous connaissons tous sur nos smartphones. Indice : pour faire un reset sur sa Tesla, appuyer simultanément sur les deux molettes gauche et droite du volant, et ça repart.
Mais il n’y a pas que dans ses voitures que Tesla connait certaines faiblesses. Comme le rapporte le camarade Korben, il arrive aussi que ce soient les administrateurs des forums officiels Tesla qui se prennent les pieds dans le tapis, en créant manuellement mais involontairement une énorme faille dans leur dispositif. Faille qu’ils corrigent évidemment très vite, mais qui a permis à un client d’accéder à une base de donnée d’un million et demi de membres inscrits.
Tous ces points démontrent l’approche totalement disruptive de Tesla sur son secteur et font de cette marque une sorte d’OVNI comme peu d’industries en ont connues en un siècle. Tesla est davantage un « pure player digital » qu’une simple marque automobile, et continuera probablement à le prouver dans les années à venir, quand la concurrence se fera plus rude et qu’elle nous surprendra encore par son avance. Ou, qui sait, en se diversifiant sur d’autres marchés…
[1] C’est le cas d’une certaine façon dans la réalité, puisque Tesla se présente officiellement comme une entreprise de « Voitures électriques, panneaux solaires et stockage d’énergie propre ».
Avec presse-citron