Les deux premiers actionnaires, Bernard Arnault et Philippe Houzé s’opposent sur la future gouvernance. Mais le profil de Bernardo Sanchez Incera fait consensus.
Chez Carrefour, la succession du PDG tourne à la foire d’empoigne. Selon plusieurs sources proches du groupe, elle crée des crispations feutrées entre les deux principaux actionnaires d’un côté ainsi qu’avec l’actuel patron, Georges Plassat. Le PDG de LVMH, Bernard Arnault -qui détient 8,95% de Carrefour- et le président des Galeries Lafayette, Philippe Houzé, (11,5%) ne s’accordent pas sur le schéma de gouvernance que chacun veut imposer à la tête du géant de la distribution.
Carrefour a lancé un processus de sélection du successeur de Georges Plassat dont le mandat de PDG se termine en 2018. L’objectif est d’introniser l’heureux élu dès l’assemblée générale de mai prochain pour mettre en place une transition douce. Le dirigeant sortant et son successeur piloteront le groupe conjointement pendant une année. Puis Georges Plassat lâchera définitivement les commandes comme prévu l’an prochain.
Le premier actionnaire Philippe Houzé privilégierait, pour la suite, une dissociation des fonctions de président et de directeur général. Ce qui lui permettrait, selon plusieurs proches de Carrefour, de briguer la présidence du groupe l’an prochain, ce que dément pourtant son groupe. “Philippe Houzé n’a pas vocation à être président” promet une porte-parole des Galeries Lafayette. Pourtant, ce dernier semble être très impliqué dans la gestion de Carrefour où il a investi près de 2 milliards d’euros depuis deux ans.
De son côté, Bernard Arnault privilégie le choix d’un PDG de plein exercice, comme c’est le cas dans toutes les sociétés de son groupe. Une manière d’empêcher le patron des Galeries Lafayette de mettre la main sur la présidence de Carrefour. Dans ce rapport de force, Bernard Arnault semble avoir un net avantage. D’abord, parce que la désignation de Philippe Houzé à la présidence du groupe contraindrait Carrefour à relever la limite d’âge pour ce poste. Elle est fixée aujourd’hui à 70 ans, âge que Philippe Houzé atteindra en fin d’année. Ensuite, “LVMH est un énorme client des Galeries Lafayette” glisse un bon connaisseur du dossier. La messe semble dite.
L’expérience digitale est majeure
“L’important est de choisir le bon candidat” crient en cœur l’entourage des deux actionnaires. Et l’heureux élu n’est pas encore trouvé. En interne, deux candidatures semblent poussées par le PDG: celles des patrons de la Chine, Thierry Garnier, et de l’Espagne, Pascal Clouzard, comme l’avaient indiqué Les Echos. Il y a un mois, le Français Hubert Joly, patron de la chaîne américaine Best Buy avait démenti être en lice pour le poste. L’entourage d’Alexandre Bompard, PDG de Fnac-Darty, a aussi repoussé cette hypothèse alors que la fusion des deux enseignes bat son plein. Quant à Alain Caparros, patron du groupe allemand Rewe, il ne serait plus sur les rangs.
En revanche, le nom de Bernardo Sanchez Incera, patron des réseaux de la Société Générale en France et à l’international, revient en permanence. C’est Philippe Houzé qui l’avait recruté en 2004 pour diriger Monoprix, alors propriété des Galeries Lafayette. Il venait alors de Vivarte (La Halle, André…) dirigé à l’époque par… Georges Plassat. “Ce dernier ne l’appréciait pas beaucoup, explique un ancien cadre de Vivarte. Même si Bernardo Sanchez est parti rapidement après l’arrivée de Plassat”.
Auparavant, ce natif de Santander (Espagne) a dirigé de 2001 à 2003 une branche européenne de… LVMH. Il est donc bien connu de l’ensemble des dirigeants de Carrefour. Son expérience bancaire lui a apporté une vision digitale de la distribution qui plaît beaucoup. “C’est un atout majeur vu l’explosion du e-commerce” explique un proche des actionnaires. À la différence des autres candidats potentiels, lui n’a pas démenti mais n’a pas “souhaité faire de commentaires”, selon son entourage.*
Avec bfmtv