Après les avoir abandonnés au début des années 2010, certaines marques veulent à nouveau proposer des modèles neufs pouvant rouler au Superéthanol. Ford est le premier à proposer son SUV Kuga dans une version compatible avec ce carburant deux fois moins cher que l’essence.
Ford veut surfer sur l’attrait des automobilistes pour le biocarburant Superéthanol E85. Dès le mois de juin, le constructeur américain proposera en France et en Suède une version du SUV Kuga pouvant rouler au E85. Ce carburant est composé d’essence à laquelle s’ajoute jusqu’à 85% de biocarburant, essentiellement de l’éthanol issu de résidus des betteraves et céréales. Son principal atout se trouve dans son prix: 68 centimes d’euro en moyenne le litre, contre 1,44 euro pour un litre de sans-plomb 95.
Un marché dominé par les boîtiers
Ford devient ainsi le seul constructeur à proposer directement dans sa gamme en France un modèle roulant à l’E85. En effet, depuis l’arrêt de la commercialisation de la Volkswagen Golf Mutlifuel à l’été 2018, la seule possibilité pour rouler à l’E85 est aujourd’hui de poser, en après-vente, un boitier sur sa voiture essence.
Depuis fin 2017, ces boîtiers sont en effet homologués, et la pression des fabricants comme des producteurs d’éthanol est forte pour développer ce marché. Selon des chiffres de notre partenaire AAA Data, un peu plus de 3500 voitures neuves et d’occasion, fonctionnant avec ce carburant, ont officiellement été immatriculées l’an dernier en France avec une carte grise spéciale pour les véhicules roulant au bioéthanol. C’est autant qu’en 2007, lorsque plusieurs constructeurs (Volvo, Ford) vendaient directement des modèles compatibles. Au total, c’est un parc d’au moins 30.212 véhicules qui circulent à l’E85 en France, selon AAA Data. Mais comme les boîtiers seconde monte n’étaient pas légaux avant fin 2017, ce nombre est certainement inférieur à la réalité. La publicité autour de ces boîtiers aurait réveillé l’intérêt des clients, selon Louis-Carl Vignon, président de Ford France.
“Dans ce projet, il y a de l’opportunisme, souligne Louis-Carl Vignon. Ford est légitime, car nous étions déjà présents sur ce marché en 2005. Nos concessionnaires nous ont surtout fait part d’une forte demande des clients dans certaines régions pour des modèles flexfuel [qui peuvent rouler à l’E85 comme au SP95, ndlr]”.
Un test avec le Kuga
Le Kuga fait donc valeur de test pour Ford. Le modèle est en effet en fin de carrière, peu vendu en essence en France (moins de 15% des ventes). Le convertir à l’E85 permet à Ford d’animer sa fin de vie, tout en offrant des avantages sur ce modèle assez onéreux (29.000 euros minimum dans la version EcoBoost 1.5 de 150 chevaux, celle qui aura sa version FlexiFuel).
Grâce à l’E85, la carte grise est pratiquement gratuite dans toutes les régions, le plein est peu onéreux, le malus s’avère moins élevé (2453 euros d’économie sur cette motorisation en boite manuelle, 10.500 en boite automatique !). Ce véhicule devient aussi éligible à la prime à la conversion, car estampillé Crit’Air 1, il peut donc bénéficier de 4000 euros de remise maximum.
“Le Kuga n’est pas le mieux placé en matière de CO2, mais c’était un modèle des plus faciles à modifier”, reconnait ce lundi Louis-Carl Vignon, le président de Ford France. Ford a surtout retravaillé la gestion électronique du moteur, pour adapter son fonctionnement à la consommation d’E85. Le constructeur a aussi modifié le circuit d’alimentation afin de le renforcer.
Le Superéthanol E85 est en effet un carburant plus abrasif pour les motorisations, à tel point qu’en off, des garagistes remontent des soucis sur des injecteurs, suite au passage à l’E85. Dans le cas de la pose d’un boitier, c’est son fabricant qui supporte la garantie. Sur le Kuga Flexifuel, la garantie qui s’applique reste celle du constructeur américain.
L’initiative de Ford sera-t-elle suivie par d’autres constructeurs? Volkswagen devrait en proposer une version Multifuel sur la prochaine génération de la Golf. S’il vend plusieurs modèles en Amérique Latine, après avoir occupé le gros du marché du neuf en France au début des années 2010, Dacia ne compte pas pour le moment proposer une telle version en Europe.
Avec bfm