Alors que la sécurité des chefs d’État africains vire à l’obsession, les agents chargés de la garantir sont moins nombreux mais mieux formés et mieux équipés.
Enquête sur ces hommes qui suivent nos présidents comme leur ombre.
L’homme clé de la galaxie sécuritaire de Paul Biya n’est pas camerounais. Un atout majeur pour Mayer Heres, général à la retraite de l’armée israélienne, qui peut donc se tenir à l’écart des luttes de clans ethno-régionalistes dont le palais d’Etoudi est le théâtre. En tant que contractuel de droit privé, il échappe à la bureaucratie, y compris militaire. Ce privilégié bénéficie d’un accès direct à ce président difficile à approcher, même pour ses ministres. Pour disposer de ses budgets, l’Israélien n’a cure des vicissitudes de la chaîne de dépenses du Trésor public. Des fonds spéciaux lui sont alloués.
Conseiller du président chargé des questions de sécurité, Mayer Heres est le patron du Bataillon d’intervention rapide (BIR), la force la mieux équipée et la mieux entraînée du pays. Les excellents résultats de cette unité lui valent d’être déployée sur plusieurs opérations : la sécurisation de la presqu’île de Bakassi ; la lutte contre les coupeurs de route ; la surveillance de 400 kilomètres de la frontière nord avec le Nigeria pour empêcher les infiltrations de la secte terroriste Boko Haram. Au centre de ce dispositif, l’Israélien a l’oreille du chef de l’État, qu’il voit seul à seul. Il ne répond que de lui.
Le BIR, composé de plus de 5 000 hommes, serait entraîné avec une arrière-pensée : pouvoir tenir un siège d’au moins trente jours contre le reste de l’armée régulière, dont le président s’est toujours méfié. Heres a aussi la haute main sur la garde présidentielle, un corps de 2 000 hommes chargés de la protection des résidences et de la sécurisation des itinéraires présidentiels. En 2013, il a bloqué la nomination du colonel Joseph Nouma au poste de commandant de la garde présidentielle, au profit de l’un de ses poulains, Raymond Beko’o Abondo.
Son visage est inconnu de la plupart des Camerounais, même si on l’a aperçu au pied de l’avion qui ramenait Georges Vandenbeusch, un prêtre français enlevé par Boko Haram en 2013. Heres sort peu de sa villa du quartier de Bastos, à Yaoundé. Il est plus discret que son prédécesseur, Abraham Avi Sivan, un colonel israélien mort le 22 novembre 2010 dans un mystérieux accident d’hélicoptère. Il faut dire que les Israéliens du président n’ont pas bonne presse auprès des officiers de l’armée, qui voient d’un mauvais œil ces « mercenaires » qui échappent à leur contrôle.
Actucameroun