L’attente d’une nouvelle équipe à la primature sénégalaise, après la démission du Premier ministre Mahammed Boun Abdallah Dionne qui a officiellement mis fin à ses fonctions hier, alimente de nombreuses spéculations. La reconduction ou non du Premier ministre démissionnaire est au centre du débat politique. Témoignages depuis Dakar pour «La Tribune Afrique».
Le Premier ministre sénégalais Mahammed Boun Abdallah Dionne a officiellement remis hier ,5 septembre, sa lettre de démission au président Macky Sall. Une démission qui a entraîné de facto celle du gouvernement que Mahammed Boun Abdallah Dionne dirigeait jusque-là depuis 2014. La démission de ce dernier s’inscrit dans «une tradition républicaine» au pays de la teranga au lendemain des élections législatives.
Autre tradition politique dans le pays, la formation d’un nouveau gouvernement juste après le départ d’un Premier ministre. Or depuis hier, le président Sall s’est emmuré dans le silence qu’on lui connaît. Rien ou presque ne filtre sur les consultations qui doivent aboutir à la formation d’un nouveau gouvernement. Un silence assourdissant qui suscite de nombreuses interrogations : qui sera le prochain chef de gouvernement ?Mahammed Boun Abdallah Dionne sera-t-il reconduit dans ses fonctions ?
Mahammed Boun Abdallah Dionne?
«Tout est possible», répond le directeur de RFM, premier média à avoir annoncé la démission du Premier ministre. Mahammed Boun Abdallah Dionne a toutes les chances d’être reconduit à son poste, estime Alassane Samba Diop avant de nuancer que «le contraire est également possible. L’ancien chef du gouvernement peut être rappelé à d’autres fonctions».
Le patron de Radio futurs médias explique que «la présidence de l’Assemblée nationale est un poste intéressant que Mahammed Boun Abdallah Dionne pourrait bien occuper dans la mesure où il est devenu député et que le poste est vacant depuis les élections législatives du 30 juillet». Des élections remportées haut la main par la coalition Benno Book Yakkar que dirigeait Mahammed Boun Abdallah Dionne.
Une analyse que partage Momar Diongue, journaliste politique sénégalais, qui estime que celui qui a été, à deux reprises, chef de cabinet de Macky Sall devrait normalement rempiler à son poste. «Mahammed Boun Abdallah Dionne est l’un des plus proches collaborateurs du président Sall», affirme-t-il en ajoutant :
«Avant d’être nommé Premier ministre, il a longtemps travaillé avec son “ami” et sur de nombreux dossiers. Entre ces deux hommes règnent une complicité et une confiance totale depuis très longtemps».
En effet, avant d’arriver à la tête du gouvernement, Mahammed Boun Abdallah Dionne a été nommé ministre en charge de la mise en œuvre du Plan Sénégal émergent (PSE). Devant faire émerger le Sénégal à l’horizon 2035, ledit plan est aussi le référentiel sur lequel les tenants du pouvoir au Sénégal comptent s’appuyer pour briguer les suffrages des Sénégalais pour l’élection présidentielle de 2019. Or, changer à 15 mois d’une élection présidentielle un Premier ministre qui «gagne» serait un mauvais calcul, prédit Momar Diongue.
Un nouveau Premier ministre ?
Cependant, si Mahammed Boun Abdallah Dionne «à toutes les chances de rempiler à son poste», d’autres profils pourraient bien intéresser le président Sall. Le directeur général de la Société nationale d’électricité du Sénégal qui a mis fin ou presque aux «nombreux délestages», en améliorant sensiblement la qualité du service au point de faire oublier la situation difficile vécue sous Wade et ses prédécesseurs dans la fourniture de l’électricité aux foyers sénégalais «est pressenti à la tête de la primature», affirme le patron de presse Alasanne Samba Diop.
Pour son compatriote Momar Diongue qui abonde dans le même sens, la nomination de Mouhamadou Makhtar Cissé à la tête du gouvernement sénégalais «ne serait pas une surprise».Comme Boun Dionne, le directeur général de la Senelec «a prouvé au président Sall lors des législatives du 30 juillet qu’il peut lui aussi bien gagner une élection», en battant à plate couture Oumar Sar, coordonnateur national du Parti Démocratique Sénégalais (PDS) qui régnait en maître dans la commune de Dagana depuis 1996, selon Momar Diongue.
Seulement, au sein de l’Alliance pour la république, le parti au pouvoir, les profils qui peuvent intéresser le président Sall sont nombreux. Alioune Badara Cissé (ABC), par exemple, est «un bon candidat». Le médiateur de la République est l’un des rédacteurs des textes fondateurs de l’APR. Au lendemain du départ de Macky Sall du PDS, le parti d’Abdoulaye Wade, ABC est le premier à conseiller Macky Sall de créer son propre parti.
De plus, en «bon disciple mouride», Alioune Dadara Cissé peut bien apporter à son parti ce qu’il peine jusque-là à obtenir : une victoire à Touba, «la capitale du mouridisme». Une communauté religieuse importante et très convoitée par les candidats lors des élections. Mais pour l’heure, rien n’est encore fixé, car dans la longue liste des prétendants à la primature figurent d’autres noms, notamment celui du ministre de l’Economie et des finances, Amadou Bâ.
Une seule certitude cependant : le Sénégal ne restera pas trop longtemps sans gouvernement. Le secrétaire général de la présidence de la République, Maxime Simon Ndiaye, dans un point de presse hier, affirmait qu’une nouvelle équipe devrait être formée «dans les prochains jours».
Avec latribuneafrique