Une procédure testée sur des patients atteints de sclérose en plaques a permis de stopper l’évolution de la maladie voire de réduire leurs symptômes pendant cinq ans. Mais ce traitement qui consiste à réinitialiser le système immunitaire n’est pas sans risques ni aussi efficace selon ses formes.
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie auto-immune (le système immunitaire attaque ses propres constituants) qui affecte le système nerveux central et entraîne des lésions qui provoquent des perturbations motrices, sensitives et cognitives. “Les cellules immunitaires, en particulier les lymphocytes, entraînent la destruction de la gaine de myéline qui entoure et protège les prolongements (axones) des neurones”, explique l’Inserm*.
A plus ou moins long terme, ces troubles peuvent progresser vers un handicap irréversible: selon l’institut, elle représente la cause la plus fréquente d’invalidité neurologique chez l’adulte jeune. Les traitements actuels permettent de réduire les poussées et améliorent la qualité de vie des patients, mais ils ont une efficacité insuffisante pour lutter contre la progression de la maladie.
Cependant, de nombreuses recherches portent sur de nouvelles stratégies de traitement qui pourraient changer la donne dans les années à venir. Des chercheurs de l’Imperial College London testent actuellement une approche thérapeutique pour les patients atteints de formes agressives de sclérose en plaques, et qui n’ont pas répondu aux thérapies standards. Son nom: une transplantation autologue de cellules souches hématopoïétiques.
Une amélioration pour près de la moitié des patients
Aussi appelée autogreffe, la greffe autologue consiste à prélever des cellules souches chez un patient et à les lui réinjecter. Dans ce cas précis, il s’agit de cellules souches hématopoïétiques, à l’origine de toutes les lignées de cellules sanguines, dont les globules rouges et les globules blancs. La première étape consiste à donner au patient un médicament qui encourage les cellules souches à se déplacer de la moelle osseuse à la circulation sanguine, et ces cellules sont ensuite retirées du corps.
Le patient reçoit ensuite une chimiothérapie à forte dose qui tue toutes les cellules immunitaires restantes et ses cellules souches sont transfusées de nouveau dans son organisme. Le but de cette procédure est de “réinitialiser” le système immunitaire pour l’empêcher d’attaquer les cellules nerveuses et ainsi arrêter la progression de la maladie. L’étude menée sur 281 patients a démontré qu’elle avait permis d’empêcher l’aggravation des symptômes pendant cinq ans chez 46% d’entre eux.
Cependant, le traitement peut s’avérer dangereux, car il implique une chimiothérapie agressive qui inactive le système immunitaire pendant une courte période de temps. Huit participants à l’étude sont morts pour cette raison dans les 100 jours qui ont suivi, les plus à risque étant les personnes âgées ou souffrant des formes les plus sévères de la maladie.
“Nous pouvons congeler la maladie”
“Nous savions que ce traitement redémarre ou réinitialise le système immunitaire et qu’il comporte des risques, mais nous ne savions pas combien de temps les bénéficies duraient”, explique le docteur Paolo Muraro, auteur principal de l’étude. “Dans cette étude, la plus grande de suivi à long terme de cette procédure, nous avons montré que nous pouvons ‘congeler’ la maladie d’un patient et l’empêcher de s’aggraver jusqu’à cinq ans. Cependant, nous devons prendre en compte que le traitement comporte un faible risque de décès, et c’est une maladie qui ne met pas immédiatement en danger la vie”.
La procédure s’est montrée particulièrement efficace contre la SEP récurrente – rémittente. Cette forme la plus courante de SEP se caractérise par des poussées aiguës, connues sous le nom de rechutes, suivies d’une période d’amélioration des symptômes. Le traitement empêcherait la manifestation de ces poussées sur cette période de cinq ans par rapport aux patients non traités, et les patients plus jeunes avec des formes moins sévères de la maladie sont les plus susceptibles de répondre à la thérapie.
En revanche, le traitement s’est montré moins efficace en ce qui concerne une forme plus sévère de la maladie, la sclérose en plaques progressive. Parmi les patients qui en souffraient et qui ont été traités, seul un sur trois n’a connu aucune aggravation des symptômes en cinq ans. Certains patients ont connu une légère amélioration de leurs symptômes, mais beaucoup moins importante que pour les patients atteints de SP récurrente – rémittente.
En conséquence, les chercheurs suggèrent que de plus grands essais cliniques soient réalisés pour tester cette procédure à plus grande échelle. “Ces résultats sont très prometteurs mais nous n’avions pas un groupe placebo dans cette étude, des patients qui n’ont pas reçu le traitement. Nous avons besoin d’urgence de traitements plus efficaces pour cette maladie dévastatrice, et donc un grand essai randomisé pour ce traitement devrait être la prochaine étape”, conclut le docteur Paolo Muraro.
*Institut national de la santé et de la recherche médicale
Avec bfmtv