Le 30 mars, la marine de guerre russe a lancé le Kazan, le deuxième sous-marin amélioré de classe Yasen, du projet 885M. La marine de guerre prendra livraison du navire en 2018. Au total, sept sous-marins d’attaque nucléaire de classe Yasen doivent être construits d’ici à 2023. Le Kazan est un sous-marin amélioré du projet 885M – une version avancée qui, à bien des égards, est beaucoup plus efficient que le premier navire de cette classe, le Severodvinsk, premier sous-marin de la série à être entré en service, en 2016.
L’armement du Kazan inclut le Zircon 3M22, un missile de croisière hypersonique, capable d’atteindre environ Mach 5 à Mach 6 (7400 kilomètres/heure). Il devrait entrer en production en 2018. À l’altitude de croisière de 30 000 mètres, son énergie cinétique à l’impact est 50 fois supérieure à celle des missiles air-mer existants. Ce bolide peut franchir 250 kilomètres en deux minutes et demi, plus vite qu’une balle de fusil. L’ennemi n’aura pas le temps d’avoir peur, et encore moins de réagir.
Par comparaison, le missile de croisière Kalibr embarqué sur les navires, se déplace à Mach 0,9, mais en s’approchant de son objectif, son ogive accélère jusqu’à Mach 2,9.
Le missile Zircon n’a ni besoin de contre-mesure de guerre électronique, ni de suivre une trajectoire de vol compliquée. Sa vitesse à elle seule le rend pratiquement impossible à intercepter par les moyens conventionnels modernes. La recherche et l’attaque de l’objectif du Zircon peuvent être programmés pendant son vol, et il pourrait même couvrir des distances d’environ 500 kilomètres, voire plus.
Cette arme hypersonique est quasiment invulnérable. Le seul système antiaérien pouvant abattre des objectifs capables de se déplacer à pareilles vitesses, est le S-500 russe.
Pour atteindre les vitesses hypersoniques, ce missile met en œuvre le principe du statoréacteur [scramjet]. La propulsion est produite en forçant l’air atmosphérique à pénétrer dans la chambre de combustion, où il est mélangé au carburant embarqué.
L’air est comprimé dans l’orifice d’admission, puis mélangé au carburant dans la chambre de combustion. L’accélération de départ est donnée par un propulseur auxiliaire à poudre réactive compacte, et le statoréacteur sert de propulseur principal. Le missile n’a aucune pièce mobile.
Le Zircon embarque à la fois un radar de recherche d’objectif et un complexe optoélectronique chargé de détecter et relever la trajectoire des objectifs voyageant à vitesse hypersonique.
Le missile sera vraisemblablement aménagé sur le Pyotr Velikiy et l’Amiral Nakhimov, des croiseurs à propulsion nucléaire de classe Kirov, ainsi que sur les bombardiers stratégiques Tu-160M2 Blackjack et les sous-marins, dont ceux de la génération suivante, de classe Husky.
Selon le journal britannique Independent, quand ils entreront en service, les nouveaux porte-avions de la Royal Navy seront incapables d’intercepter les missiles russes hypervéloces. Cela signifie que, malgré leur coût de construction s’élevant à 7 milliards de livres sterling, ces deux navires, dont le premier ne devrait pas être entièrement opérationnel avant 2020, pourraient être rendus obsolètes par les nouvelles réalisations de la guerre hypersonique.
Dans son rapport de 2016, la National Academy of Science US a conclu que les USA sont en retard sur la Russie et la Chine dans la course aux armes hypersoniques. Le document indique : « L’effet de la vitesse extrême associée à la maniabilité et à l’altitude, constitue une menace potentielle pour les capacités US. »
Devenant vulnérable, les groupes d’attaque aéronavals, sur lesquels comptent les USA depuis des dizaines d’années pour assurer leur domination, verront leur pertinence remise en question. Le Zircon obligera les groupes d’attaque aéronavals à se tenir à des centaines, voire à des milliers de kilomètres de la côte ennemie. Les aéronefs des porte-avions seront alors incapables de lancer des raids aériens contre leurs objectifs terrestres. Harry J. Kazianis, rédacteur en chef de The National Interest, estime que ces missiles « pourraient transformer les super-porte-avions US de plusieurs milliards de dollars en cimetières de milliers de marins. »
Il convient de noter que la nouvelle arme russe rendra inutile le programme de défense antimissile balistique de l’OTAN en Europe. Les intercepteurs ne peuvent pas contrer les missiles aussi rapides que le Zircon. L’amiral Cecil Haney, chef du Commandement stratégique US, a prévenu que les systèmes antimissiles et antiaériens US seraient pratiquement incapables d’intercepter les armes hypersoniques russes. L’avènement de l’arme hypervéloce rendra peut-être les USA plus accommodants sur la défense antimissile balistique. Cette question controversée entrave les perspectives d’accords sur le contrôle des armements entre les USA et la Russie.
En rendant inefficaces les systèmes de défense antimissile actuels, les missiles hypersoniques sont des armes qui bouleversent le jeu. Les experts de l’Institut Mitchell de l’Association de l’Aéronautique pour les études aérospatiales, pensent qu’elles vont « révolutionner les affaires militaires, tout comme la furtivité l’a fait il y a une génération et que le turboréacteur l’a fait une génération avant. »
Le succès du programme Zircon fait de la Russie le leader de la course. Quand le Zircon entrera en production, en 2018, en laissant les USA loin derrière, la Russie sera la seule nation au monde à lancer la production en série d’armes hypersoniques. Les USA développent aussi leurs propres armes hypersoniques, mais on ne pense pas qu’elles sont prêtes à entrer en production. La capacité de produire des armes hypersoniques démontre le leadership mondial de la Russie en matière de science appliquée aux missiles.
Avec reseauinternational