Bluff ou projet réel? L’administration Trump serait en train de préparer un décret pour retirer les États-Unis de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), rapportent ce mercredi certains médias américains dont Politico.com et CNBC.
Si cette information se confirme dans les prochaines heures, cette démarche soulève plusieurs questions auxquelles Les Affaires a récemment répondu dans un grand reportage sur le protectionnisme.
1. Les États-Unis peuvent-ils se retirer unilatéralement de l’ALÉNA sans l’approbation du Congrès américain ?
2. Si les États-Unis se retirent de l’ALÉNA, l’Accord de libre-échange (l’ALÉ de 1989) peut-il remplacer l’ALÉNA et maintenir le libre-échange entre les deux pays ?
3. Si l’ALÉNA et l’ALÉ disparaissent, que prévoient les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pour encadrer les tarifs douaniers et les barrières réglementaires entre les pays qui n’ont pas d’accord de libre-échange entre eux ?
Trump ne peut pas déchirer l’ALÉNA sans l’accord du Congrès
Dans le cas de la première question, la réponse est non, affirment Xavier Van Overmeire et Nadiya Nychay, tous deux avocats au cabinet Dentons Canada. «D’un point de vue juridique, l’ALÉNA est un accord “congrès-exécutif” créé par la loi, et non par traité. Un président ne peut donc le résilier – ou même le renégocier – sans l’approbation du Congrès.»
Par conséquent, Donald Trump ne peut pas agir unilatéralement. Reste à voir si le Congrès contrôlé par les républicains – traditionnellement plus libre-échangistes que les démocrates – serait prêt à voter une loi retirant les États-Unis de l’ALÉNA.
Si jamais ce scénario devait se réaliser, le Canada aurait une police d’assurance, soit l’ALÉ, qui a été remplacé par l’ALÉNA en 1994.
Dans un récent entretien avec Les Affaires, Gordon Ritchie, l’un des architectes de l’ALÉ, aujourd’hui conseiller chez Hill+Knowlton Stratégies à Ottawa, affirmait que cet accord pourrait être réactivé si jamais les États-Unis tournaient le dos à l’ALÉNA.
Enfin, même si ce scénario est plus qu’improbable, le Canada ne serait pas non plus totalement désarmé si l’ALÉ et l’ALÉNA venaient à disparaître, souligne Bernard Colas, avocat spécialisé en droit du commerce international au cabinet CMKZ, à Montréal.
«En vertu des règles de l’OMC, le Canada bénéficierait de la clause dite de la nation la plus favorisée, qui prévoit un tarif douanier moyen de 3 à 4 %», dit-il.
À titre de comparaison, c’est le niveau que paient actuellement les entreprises canadiennes qui exportent au Japon, un pays avec lequel le Canada n’a pas d’accord de libre-échange. Le Japon est notre quatrième marché d’exportation après les États-Unis, la Chine et le Royaume-Uni.
Avec lesaffaires