“Libérez Kosyam”, tel est le mot d’ordre qu’on entendait presque toujours de la bouche des manifestations et ce, depuis le 28 octobre 2014. Mais la date du 30 octobre a donné une autre tournure dans le mouvement et dans le langage. Ainsi Ouagadougou était en feu et en sang. Il est devenu une tranchée de guerre entre les manifestants et les forces de l’ordre. Des édifices étaient en flamme, à l’image de l’assemblée nationale, symbole de la démocratie Burkinabè, l’hôtel Azalai, les banques, certains supers marchés de la place, etc. c’est dans ce registre que certains caciques du régime comme Assimi Koanda, Bongnessan Arsène Yé, Boureima Badini, Paramagan Yonli, Yacouba Ouédraogo… ont payé soit au prix de leurs maisons, des voitures, des hôtels ou des objets précieux.
Tôt le matin la population de Ouagadougou se réveillent sous les coups de sifflets bien nourris. Tous ceux qui sifflaient conversaient vers la même direction : l’assemblée nationale où les députés devaient siéger ce 30 octobre pour voter le projet de loi en vue de la modification du fameux article 37. Cette fois ci le mot d’ordre était tout autre : « ça passe ou ça casse ! Brulons l’assemblée ensuite Kosyam ! ». Au environ se dix heures, les manifestants ont bravé les forces de l’ordre et parviennent à assiéger l’assemblée nationale. C’était une foule en liesse. Quelques minutes ont suffi pour la mettre en feu.
La joie fut plus grande encore lorsque la Radiotélévision du Burkina (RTB), section télé a été prise. Le cap est mis sur Kosyam. Chemin faisant et selon les informations vraisemblables, les forces de l’ordre auraient tiré à balles réelles sur les manifestants faisant une trentaine de morts et des dizaines de blessés. Les jeunes, malgré la flamme et la fumée noire qui montait et montait encore plus haut dans le ciel se livrent à des pillages sans merci sans toutefois se soucier de ce qui pourrait leur arriver.
Chez Assimi Koanda où nous nous sommes rendus, c’était un spectacle désolant qui était donné à voir. Trois voitures se consumaient sous le regard des manifestants surexcités et visiblement très fiers de ce qu’ils qualifient ‘’d’une justice rendue’ ’par le peuple. Tout ce que cette gigantesque demeure regorgeait a été dérobé en quelques minutes. Les manifestants qui ont jugé la porte d’entrée restreinte ont fait un gros orifice dans le mur créant ainsi une seconde ’’ porte’’.
« Ce qui se passe est désolant. Mais il faut noter que cette situation était prévisible en ce sens que depuis plus de dix ans, l’évolution de la situation montrait que la jeunesse n’était pas en accord avec les politiques », a laissé entendre Joseph Zongo, un spectateur. Il poursuit son propos, avec un mécontentement apparent en disant : « le gouvernement de Tiao est un gouvernement de crise par conséquent il y a certains propos qu’il devrait éviter mais ce n’était pas le cas ». Pour certains, il n’est pas question de regretter les dégâts causés dans la mesure où c’est le fruit de la gouvernance de la 4e République. « Quand on est responsable il faut savoir accueillir le peuple ; au moins savoir le flatter au lieu de tenir des propos belliqueux. En plus nous avons faim ; ça ne va pas. Donc quand il y a une manifestation, chacun gère comme il le peut », a confié Yacou Zougrana avant de renchérir : « si on diminuait le prix de sacs de riz pour que chacun puisse manger à sa faim on n’en serait pas arrivé là ». Approché un groupe de trois personnes dont deux hommes et une femme, entre deux causeries, ces derniers ne sont pas passés par quatre chemins pour me dire à l’unisson, comme s’ils m’attendaient : « c’est bien ! Nos sentiments par rapport aux actes de vandalisme sont bons ». Et à la dame de poursuivre que cela servira de leçons aux autres pays Africains. « L’Afrique n’est pas un dépotoir des dictateurs ! », s’est-elle exclamée violemment.
Au moment où nous tachons cette page, il nous est parvenue que le président vient de rendre sa démission et part en direction de Po où la population s’oppose à sa venue. Vivement que la situation revienne à la normale, c’est là le veut de tous ! C’est à noter qu’au moment où nous prenons congé des lieux, la maison de Assimi Koanda était en réparation.
Masbé Ndengar
pour Droit Libre TV