La campagne électorale s’est clôturé ce lundi 06 décembre et les urnes devront rendre leur verdict parmi les 7 candidats en lice. Et pour ajouter du piment aux enjeux électoraux, le scrutin est couplé avec les législatives pour renouveler le mandat des 275 membres du parlement monocaméral. Les protagonistes s’acheminent vers une bataille électorale à double enjeu. Le duel annoncé entre le président sortant et son principal rival ne devrait pas reléguer au second plan les 5 autres candidats tant l’année électorale 2016 a été surprenante.
Le sortant Dramani en difficulté
Le doyen des candidats, le physicien Edward Nasigre Mahama âgé de 71 ans est issu du parti au pouvoir et n’a pas dépassé les 4% de suffrages pour les scrutins de 1996 et de 2000. Il marque ici son retour après avoir été écarté de la course en 2012. Défiant tous les préjugés et stéréotypes, Ivor Greenstreet s’est lancé dans la course à la présidence sur un fauteuil roulant. Cet avocat de formation devenu handicapé suite à un accident de voiture survenu en 1997, a multiplié les « rallies » (meetings) dans les villes ghanéennes. Sous l’étiquette de Convention Peoples’ Party (CPP), crée par Kwame Nkrumah, Greenstreet milite pour un partage équitable des ressources du pétrole, de l’or et du cacao.
A 48 ans, le candidat indépendant Jacob Osei Yeboah prêche l’approche inclusive pour espérer remporter la présidentielle de décembre. Ingénieur de formation et entrepreneur dans le domaine de la logistique, il s’était déjà présenté à la présidentielle de 2012 et avait récolté moins de 1% des suffrages.
Candidat du parti populaire progressiste (PPP) qu’il a créé après son exclusion du CPP, le consultant financier, Paa Kwesi Nduom âgé de 63 ans, s’est aussi lancé dans la course. L’ancien ministre de l’Energie de John Kufuor qui a échoué à se faire élire à la présidentielle de 2008 et celle de 2012, tente encore sa chance.
A 68 ans, l’ex première dame Nana Konadu Agyemang Rawlings est également en lice pour être la première femme chef d’Etat dans son pays avec le parti démocratique national (NDP), né d’une dissidence au sein du parti au pouvoir
Âgé de 58 ans, John Dramani Mahama, le président sortant perpétue la « lignée des John » qui se sont succédé à la tête du Ghana depuis Jerry Rawlings (président de 1981-2000). Alors vice-président, John Dramani Mahama assure l’intérim à la présidence du pays en remplaçant John Atta Mills décédé au pouvoir en juillet 2012 à l’âge de 68 ans. Au terme de cette période transitoire, il se fait élire par les urnes pour un quinquennat arrivé à terme sur une note un peu décevante.
Le président investi par le Congrès démocratique national (NDC), a choisi de ne pas axer sa campagne sur le bilan économique sous son magistère à la tête de la jeune république pétrolière qui a été impactée par la chute des cours, les accusations de corruption et la dépréciation du cedi, la monnaie ghanéenne. Il a préféré se focaliser sur les infrastructures réalisées mais aussi sur l’élargissement de la couverture santé tout en se félicitant d’avoir instauré une discipline fiscale dans le pays, promettant de lutter contre la corruption. C’est avec ce programme que John Dramani Mahama veut se faire réélire à un second mandat face à 6 candidats.
La revanche et la dernière chance de Nana Akufo-Addo
Mais l’ambition présidentielle se heurte à la détermination de Nana Akufo-Addo. A 72 ans, l’emblématique opposant aux lunettes, à la tête Nouveau parti patriotique (NPP) joue ici son va-tout. Nana Akuffo-Addo est le fils d’Edward Akufo-Addo, ancien président du Ghana (1970-1972) et membre des « Big Six », qui aux côtés de Kwame Nkrumah, ont favorisé l’indépendance de la Gold-Coast.
Comme son père, Nana Akuffo-Addo est juriste de formation et compte bien l’imiter en se faisant élire au « Flag Staff House », le palais présidentiel ghanéen. Un projet que l’avocat et ancien ministre des Affaires étrangères a échoué à concrétiser une première fois à la présidentielle de 2008 où il est battu de justesse au second tour par John Atta Mills après avoir remporté le premier tour. Comble de malchance, Nana Akuffo-Addo échoue également à sa seconde tentative à la présidentielle de 2012 face à John Dramani qui a remporté le srutin avec 50,70% des suffrages, contre 47,74%. La troisième tentative sera peut-être la bonne et permettra à Akuffo-Addo de prendre sa revanche sur son rival mais aussi sur l’histoire. Et l’opposant pourrait peut-être surprendre au soir du 7 décembre.
Même s’il est encore très populaire au Ghana pour être proche du peuple, le gouvernement John Dramani est en perte de vitesse avec la colère contre le « dumsors », ces coupures d’électricité récurrentes qui ont installé un certain ras-le-bol. De plus, l’exploitation encore précoce du pétrole entamée en 2011 n’a pas résorbé les problèmes du pays qui a dû recourir à l’endettement auprès d’institutions internationales comme le FMI alors qu’il est le deuxième producteur d’or et de cacao du continent.
Nana Akuffo-Addo a bien joué sur cette corde sensible au cours d’une campagne électorale marquée par une ambiance délétère qui écorne la réputation pacifique et démocratique du pays et fait craindre des violences à l’annonce des résultats. Ce qui a poussé le président a appelé à une « élection pacifique ». Nana Akuffo-Addo s’est attaqué à la gestion de son rival qu’il accuse d’avoir installé un chômage massif notamment chez les jeunes à qui il promet « un quartier, une usine », son slogan de campagne. Le duel s’annonce donc étriqué et les résultats s’annoncent d’ores et déjà serrés. Mais comme, il n’a cessé de le répéter Nana Akuffo-Addo, le Ghana se trouve à « une période charnière ». Elle pourrait peut-être le début de l’ère
avec afrique.latribune