Design élégant, technologies dernier cri, et qualité haut de gamme, la marque au Lion est devenue une référence en Europe chez les généralistes. La conséquence de choix stratégiques portés par un marché européen en pleine forme.
Le succès ne se dément pas. 3008, 5008, 308, ces trois modèles qui symbolisent le nouveau Peugeot ont tous vu leurs ventes progresser au 1er semestre 2018. Best-seller depuis son lancement l’an dernier, le 3008 a dans le monde bondi de 105.076 à 143.946 unités venduessur la même période (janvier-juin) entre 2017 et 2018.
Les clients mettent de l’argent dans leur Peugeot
“Sur un Peugeot 3008, il n’y a aucune remise car Peugeot n’arrive déjà pas à servir ses clients, suite à la demande”, nous expliquait la semaine dernière Guillaume Paoli, fondateur d’Aramis Auto. En plus des volumes, Peugeot s’y retrouve donc côté marges. Plus de 80% des acheteurs choisissent en effet sur 3008 ou 5008 les finitions les plus élevées, notamment la GT Line (29% sur les deux modèles).
Les ventes globales de la marque ont pourtant reculé depuis janvier (-1,9%, à 1,005 million de véhicules vendus). Il faut chercher dans une conjoncture internationale compliquée (Chine, Iran) cette déconvenue, plutôt que dans le catalogue au Lion. Car si les ingénieurs et directeurs n’ont que l’expression ‘devenir bench’ à la bouche (de ‘benchmark’ en anglais, référence, ndlr), ils sont en passe de réussir leur pari: faire de Peugeot une marque haut de gamme, rivale en Europe de Volkswagen. Du moins en termes d’image et de qualité, le constructeur allemand restant pour l’instant devant côté volumes: 965.000 Volkswagen vendues en Europe au 1er semestre, contre 535.000 Peugeot, selon les chiffres de l’Association des Constructeurs Européens d’Automobiles (ACEA).
La réussite des stratégies depuis le début des années 2000
Le ‘Bench’, aussi bien linguistiquement que stratégiquement, c’est lui. Depuis son arrivée à la tête du groupe en 2014, Carlos Tavares a en effet imprimé un virage important, dont l’unique but est de gagner parts de marché et marges. “Les bons résultats commerciaux de Peugeot, et PSA, sont les résultats de choix stratégiques”, résume Flavien Neuvy, président de l’Observatoire Cetelem de l’Automobile.
“Peugeot a clairement voulu viser Volkswagen, sans devenir une marque premium, mais en misant sur la qualité, sur la robustesse, poursuit Rémy Cornubert, associé en charge de la mobilité au sein du cabinet Advancy. Le premium se retrouve sur les prix, avec 8 à 12% de marge sur les modèles”.
Selon Challenges, Carlos Tavares se vantait dès 2015 d’avoir réduit de 730 euros le coût de fabrication de chaque voiture. La course aux stocks, la compacité et la compétitivité des usines ont aidé à assainir les finances. C’est d’ailleurs en 2015 que PSA revient en bourse, après avoir été éjecté du CAC 40, au plus fort de la crise. Carlos Tavares n’est cependant pas le seul responsable.
“Ce virage est engagé depuis un moment, déjà sous Philippe Varin [à la tête de PSA de 2009 à 2014, ndlr], ou encore avec Maxime Picat à la tête de la marque Peugeot, ajoute Rémy Cornubert. La sortie de la 308 en 2014 incarne un moment clé de ce changement”.
L’arrivée de Carlos Tavares, et surtout l’entrée de l’Etat comme du constructeur chinois DongFeng à parts égales au capital du groupe, ont notamment coïncidé avec une prise de distance de la famille Peugeot par rapport au quotidien de l’entreprise. Toujours présents au conseil de surveillance, les membres du clan Peugeot ont laissé les mains libres à Philippe Varin, notamment dans la fermeture de l’usine d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), puis à Carlos Tavares. Ces changements à la tête du groupe PSA sont aussi intervenus à un moment favorable.
Un alignement favorable des planètes
D’une spirale négative au tournant des années 2010, le groupe PSA (et la marque Peugeot en particulier) suivent depuis quatre ans un cercle vertueux.
“A la fin des années 2000, le marché européen, et notamment les pays les plus importants pour Peugeot, se sont effondrés. La marque était aussi dans un creux produit, tout en souffrant d’une structure de coûts fixes très élevés, résume François Jaumain, associé en charge de l’automobile chez PwC. Peugeot rencontre maintenant une conjonction de facteurs favorables. Le plan produit est très bon, avec des nombreux SUV dans un marché européen en croissance, la marge opérationnelle est historique, les taux d’utilisation des usines sont élevés. L’automobile reste un produit de séduction, le design des modèles était donc crucial”.
Malgré sa forte dépendance au diesel, la marque a par ailleurs été relativement épargnée par le dieselgate, qui a éclaté suite à l’affaire VW en septembre 2015. Si L’ONG Transports&Environnement a beaucoup travaillé avec le constructeur sur les émissions de ces véhicules, les motorisations électrifiées représentent l’un des grands défis de Peugeot pour l’avenir. Le 3008 ne disposera d’une version hybride rechargeable qu’en 2019.
L’autre grand défi pour la marque reste l’international. Le retrait d’Iran semble obligatoire, après les nouvelles sanctions imposées par Donald Trump. Or ce marché représentait un débouché important pour Peugeot, même si la marque ne gagnait pas d’argent sur place, nous confiait il y a quelques semaines Guillaume Bouzy, nouveau patron de la marque. La Chine reste un autre marché compliqué pour Peugeot, entre la montée en gamme des constructeurs locaux et la concurrence très vive entre constructeurs occidentaux. Le groupe PSA et la marque Peugeot y cherchent toujours la clé du succès.
AVEC BFM