Les entreprises suisses observent avec une grande préoccupation l’évolution de l’économie mondiale. A peine un manager suisse sur cinq croit encore à une amélioration, selon une récente étude d’EY. Les prévisions quant au développement du marché national ont également été revues à la baisse en l’espace de six mois. Cependant, une grande partie des entreprises suisses s’attendent à un volume de F&A stable sur les prochains mois. Quelques grandes opérations sont en préparation. Les nouvelles directives de l’OCDE ont déjà contraint 12 % des entreprises suisses interrogées à abandonner des projets d’acquisitions.
La confiance, et donc l’appétit pour les acquisitions, décroissent dans l’économie mondiale. De même, les grandes entreprises suisses sont à nouveau nettement plus pessimistes qu’au semestre précédent. Dans notre pays, seuls 19 % des managers interrogés pensent encore que l’économie mondiale va s’améliorer. C’est un net recul par rapport à la dernière enquête de l’automne 2015, où la plupart des entreprises suisses (80 %) s’attendaient à une amélioration de la situation économique mondiale. La situation est similaire au niveau mondial, selon le dernier Capital Confidence Barometer de la société d’audit et de conseil EY : le nombre des optimistes a diminué de plus de la moitié, passant de 83 % à 37 % en l’espace de six mois. L’étude se base sur une enquête effectuée auprès de 1700 cadres dirigeants de grandes entreprises, dont 31 en Suisse.
« Les cadres dirigeants ont clairement revu à la baisse leurs estimations de croissance. Une faible croissance économique combinée à des influences de plus en plus perturbatrices peut néanmoins entraîner un plus fort besoin de transactions. Face à la pression sur les prix et au rythme élevé des changements, la croissance organique ne suffit plus pour de nombreuses entreprises. Mais outre les acquisitions, on observe également une intensification de la formation d’alliances et de la conclusion de partenariats », affirme Ronald Sauser, responsable F&A chez EY Suisse. En effet, cela permet de réaliser des économies sur les coûts d’intégration et de profiter de la plus grande flexibilité des alliances stratégiques.
Principale inquiétude : l’instabilité politique mondiale
Seuls 13 % des managers suisses pensent qu’à court terme, la situation économique va s’améliorer sur le marché intérieur. En octobre, 52 % étaient encore de cette opinion. Près de trois sondés sur quatre (74 %) tablent toutefois sur un développement constant – 13 % s’attendent à une détérioration de la conjoncture nationale sur le court terme. Un désenchantement se fait également sentir en ce qui concerne le marché du travail : un quart des entreprises suisses seulement (26 %) prévoit d’embaucher du personnel supplémentaire, alors qu’il y a six mois, plus de la moitié des entreprises envisageaient de le faire (52 %).
A l’échelle mondiale, la situation est similaire : la disposition à créer de nouveaux emplois a baissé de 45 % à 28 %. Au niveau mondial aussi bien qu’en Suisse, les managers considèrent que l’instabilité politique croissante représente le principal risque économique pour les six à douze prochains mois. Les entreprises suisses se sentent surtout pénalisées par la situation économique de la zone euro : 26 % des entreprises y voient un risque important (automne 2015 : 8 %). Pour un manager sur quatre (23 % en Suisse, 26 % dans le monde), les fortes fluctuations des taux de change et la volatilité des prix des matières premières représentent également un risque accru. De nombreux facteurs externes affectent actuellement la confiance dans la conjoncture mondiale. Les taux de croissance des pays BRIC (le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine) semblent peu prometteurs à l’heure actuelle et l’économie européenne ne tourne pas à plein régime. Un éventuel retrait du Royaume-Uni de l’UE et le désaccord sur la question des réfugiés mettent à l’épreuve l’ensemble de l’espace économique européen.
Ajustement des prévisions de F&A
Après les perspectives très positives de l’automne dernier, différentes entreprises dans le monde ont maintenant annulé leurs projets de fusions et acquisitions. Dans l’ensemble, les chiffres reflètent pourtant une attitude positive, car beaucoup plus d’entreprises comptent encore sur une augmentation des activités de transactions que sur une diminution de celles-ci. 39 % des personnes interrogées dans le monde s’attendent à une croissance des activités de F&A, 5 % à un recul, et la moitié d’entre elles ne prévoit aucun changement. Les sondés suisses évaluent l’évolution de la situation mondiale de manière similaire. Sur le marché domestique, seuls 16 % (40 % en automne 2015) des managers suisses escomptent encore une hausse des activités de F&A.
Acquisitions planifiées plus nombreuses et plus importantes
En automne 2015 encore, les managers suisses interrogés ne s’attendaient pas à des transactions de plus de USD 1 milliard. Mais dans l’étude actuelle, 18 % des entreprises suisses indiquent vouloir réaliser des acquisitions de l’ordre de plus de USD 1 milliard. Au niveau international, ce chiffre est de 12 % (automne 2015 : 3 %). Pour un peu moins des deux tiers des entreprises suisses, ces projets d’acquisitions se situent dans la zone médiane entre USD 250 millions et USD 1 milliard. Un peu moins de la moitié des entreprises dans le monde (49 %) signalent vouloir entreprendre des opérations d’un montant maximum de USD 250 millions. « La tendance vers de plus grosses transactions s’accentue. De même, le nombre de transactions en cours est encourageant, puisque les entreprises travaillent actuellement en parallèle sur trois à quatre transactions, alors qu’il y a environ six mois ce n’était qu’une à deux. Nous comptons ainsi pouvoir très prochainement annoncer publiquement quelques opérations conclues avec des entreprises suisses bien connues » commente Ronald Sauser.
Le marché national reste la destination d’investissement la plus attractive
Les trois premiers marchés d’investissement à l’échelle mondiale sont actuellement les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l’Inde. Comme auparavant, les entreprises suisses investissent en premier lieu sur le marché intérieur. De même, la Grande-Bretagne, l’Inde, les Etats-Unis et notre voisin l’Allemagne sont très appréciés et proposent des candidats attractifs pour des opérations d’acquisition. « Mais il reste vrai que les entreprises suisses effectuent d’une part souvent des transactions sur le marché intérieur et continuent d’autre part d’acheter des entreprises à l’étranger, plus que les sociétés étrangères n’achètent en Suisse », affirme Ronald Sauser.
Les directives de l’OCDE influencent les entreprises suisses
Les nouvelles directives de l’OCDE de lutte contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert des bénéfices (BEPS) semblent avoir encore peu d’impact au niveau mondial. Plus de la moitié des managers interrogés ne prend pas en considération leurs implications. Plus d’un tiers considère effectivement les possibles implications, mais n’a pas changé sa stratégie d’acquisition jusqu’à présent. En Suisse, 12 % des sondés ont déjà annulé une acquisition en raison des nouvelles directives, 14 % des entreprises ont modifié la structure des acquisitions déjà planifiées. « Ces résultats ne surprennent pas nécessairement, étant donné que les acquisitions ne sont pas faites en tenant principalement compte de l’environnement fiscal. En outre, les directives ne formulent que des recommandations qui doivent encore être mises en œuvre par les différents pays » commente Rainer Hausmann, Partner International Tax Services chez EY Suisse.
Concernant le Global Capital Confidence Barometer d’EY
Le Global Capital Confidence Barometer d’EY est une étude semestrielle réalisée auprès de plus de 1700 cadres dirigeants de grandes entreprises de divers secteurs à travers le monde. Quatorzième baromètre semestriel de la série qui a commencé en novembre 2009, la présente étude s’est déroulée en février et mars 2016. L’objectif est de prendre le pouls de la confiance des entreprises vis-à-vis des perspectives économiques sur les plans national et international en vue de comprendre quelles sont les priorités des conseils d’administration au cours des 12 prochains mois et d’identifier les nouvelles pratiques en matière de capital qui permettront aux sociétés qui les adoptent de se constituer un avantage compétitif dans une économie mondiale en constante évolution.
avec monde-economique