Pour améliorer les résultats de benchmarks du OnePlus 5, le fabricant chinois a eu recours à une astuce logicielle. Une méthode d’autant plus discutable qu’elle est parfaitement futile.
Tout juste annoncé – et testé par nos soins, le OnePlus 5 connaît une première mésaventure. Pour amplifier les bonnes performances de son Snapdragon 835, OnePlus aurait programmé son appareil pour tricher lors des tests de benchmarks. Une stratégie révélée par le site américain XDA-Developers, qui a déjà été employée avec le précédent smartphone signé OnePlus.
En début d’année, XDA-Developers avait déjà repéré une technique de triche en testant le OnePlus 3T. Elle était plutôt subtile. Lorsque la ROM de l’appareil détectait une application de benchmark, la fréquence des processeurs était programmée pour rester au-dessus d’une cadence minimale (1,29 GHz pour les cœurs principaux). Habituellement, les processeurs sont limités par le throttling, une fonction logicielle qui permet de brider ponctuellement leur puissance pour éviter la surchauffe. La ruse du OnePlus 3T prévalant sur le throttling, le smartphone était amené à chauffer davantage plutôt que de baisser en performances. Les résultats des benchmarks pouvaient alors être impactés.
Avec le OnePlus 5, la méthode est beaucoup moins fine – et encore plus discutable. Cette fois, OnePlus a tout simplement désactivé le throttling dès lors qu’une application de benchmark est lancée. Sous AnTuTu 6, Geekbench 4 ou GFXBench – entre autres, les cœurs tournent à plein régime, tout le temps, quelle que soit la température du smartphone. Pour mettre en lumière l’astuce du OnePlus 3T comme celle du OnePlus 5, XDA-Developers a trompé la ROM de OnePlus. Celle-ci analyse l’identifiant des applications – par exemple « com.antutu.benchmark.full » pour AnTuTu – pour savoir quand pousser son processeur à ses limites. Le site américain a modifié ces identifiants afin que le smartphone ne puisse plus repérer les applications de benchmark.
La version la moins chère serait-elle la meilleure ?
Sous Geekbench 4 – en test multi-cœur, les résultats sont effectivement différents avec des scores oscillant entre 6.600 et 6.700 points en « mode triche » et entre 6.300 et 6.360 points en « mode classique ».
Nous avons pu tester trois versions du OnePlus 5, toutes sous OxygenOS 4.5.0 (A5000_23_170514), différentes de la version 4.5.0 (A5000_22_170603) testée par XDA. Notre premier modèle était destiné aux journalistes, les deux autres étaient des modèles commerciaux. Sur le premier (8 Go de RAM / 128 Go de stockage), nos scores Geekbench 4 (multi-cœur) ont oscillé autour des 6.550 points. Sur le second (configuration identique), nous avons plafonné à 6.400 points après cinq tentatives.
Le troisième modèle est la déclinaison vendue 499 euros, avec 6 Go de RAM (contre 559 euros pour la version 8 Go de RAM). A chacune de nos cinq tentatives, le score approchait les… 6.800 points. Un gain d’environ 400 points qui est resté le même après un passage sous la version 4.5.1 (A5000_23_170620).
Concernant les deux derniers smartphones – le modèle destiné aux journalistes n’est plus en notre possession, nous avons également scruté la fréquence du processeur durant le benchmark, qui a connu de nombreuses variations. L’hypothèse d’un « gel de throttling » – et donc de triche – semble donc à écarter pour les appareils que nous avons testés.
Qui a la plus grosse ?
Sur la version équipée de 8 Go de mémoire vive, nos résultats sous Geekbench 4 se situent à la frontière des deux scénarios – avec ou sans triche – de XDA-Developers. La version équipée de 6 Go de mémoire vive, moins onéreuse, dépasse quant à elle les scores les plus élevés de nos confrères, un comble ! Cela montre que la volatilité de ces résultats est trop importante pour que la stratégie de triche de OnePlus ait un quelconque intérêt.
Par ailleurs, XDA-Developers n’a pas publié les résultats d’autres benchmarks, censés être impactés. Sous Geekbench 4, le OnePlus 5 a effectivement fait carton plein par rapport à la concurrence, chez nous comme chez eux. Les « vrais » résultats retrouvés par XDA – légèrement plus bas que les nôtres – auraient de toute façon placé le OnePlus à la première ou à la seconde place du classement des appareils les plus puissants. Mais sous AnTuTu 6, notre exemplaire (8 Go) arrive derrière les Samsung Galaxy S8, iPhone et HTC U11. Il n’aurait pas été inutile que XDA nous livre les mêmes comparatifs sous AnTuTu, dans la mesure où la combine de OnePlus aurait pu avoir un impact plus important.
Le travail de XDA-Developers permet cependant de mettre en lumière l’existence de pratiques fréquentes. En 2013, Samsung avait fait polémique sur le même sujet. En 2014, c’était au tour de HTC de s’y frotter. Plus tard, on apprenait que Meizu s’y vautrait également. Dans le cas de OnePlus, c’est encore plus regrettable pour trois raisons. D’abord parce que la méthode choisie est si peu évoluée qu’on peine à comprendre comment le fabricant a pu espérer qu’elle passe inaperçue. Ensuite parce que le OnePlus 5 n’avait absolument pas besoin de ce combat de coqs pour démontrer sa puissance. Enfin parce qu’il y avait peut-être un moyen beaucoup plus sûr (et économique) de s’assurer de meilleurs benchmarks : envoyer aux journalistes la version équipée de 6 Go de mémoire vive.