Le prix Ivoire pour la littérature africaine d’expression francophone 2013 décerné par l’association Akwaba Culture est revenu à Hemley Boum, auteure camerounaise. C’est son ouvrage « Si d’aimer… » qui lui a valu la reconnaissance du Jury composé de Fatou Kéita, Wêrê Wêrê Liking, Josué Guébo, Foua Ernest de St Sauveur et Henri N’Koumo. Pour la première fois, c’est à l’unanimité que le vainqueur de cette édition a été choisi, le jury ayant été touché par le récit polyphonique traitant de Sida, d’amour, d’amitié avec beaucoup d’émotions et de sensibilité. Hemley Boum remplace Mariama Ndoye, lauréate 2012 avec « l’arbre s’est penché ».
Son Parcours
Née en 1973 à Douala au Cameroun, Hemley Boum aspire très tôt à la découverte du vaste monde. Le choix des sciences sociales option anthropologie n’est dès lors pas anodin et servira plus tard son écriture. L’obtention de sa maîtrise à l’Université Catholique d’Afrique Centrale lui permet de passer le concours d’entrée de l’Université Catholique de Lille.
Hemley bascule des pluies tropicales à la grisaille humide et froide d’une ville du Nord de la France, dont elle retient pourtant trois années d’études où elle s’est amusée. Se dessine alors un certain regard sur le monde, les gens et la vie, qui caractérise son écriture, pleine d’humour. Dans Si d’aimer… elle rend hommage à ces gens du Nord qu’elle a aimés.
Son DESS de commerce international et un troisième cycle en marketing lui offrent un premier poste à Paris qui lui permet rapidement de découvrir le Cameroun autrement, en tant que responsable du service grands comptes de la filiale camerounaise d’une société française.
Elle revient dans son propre pays en exploratrice, à la rencontre de sociétés forestières, d’industries agro-alimentaires ou cotonnières, et de grands planteurs. Il faut s’imaginer les immenses forêts traversées, d’où surgissent de nulle part de petits villages traditionnels, puis de nombreuses villes dortoirs installées en périphérie des sociétés industrielles datant de l’époque coloniale. À n’en pas douter, le regard de Hemley s’aiguise aux vents mauvais de la pauvreté rencontrée, des disparités sociales et culturelles d’un pays riche en ressources naturelles, et donc internationalement convoité, et d’une tradition ancestrale qui perdure dans quelques îlots, ces petits villages sortis de nulle part…La forêt monumentale abritant parmi les arbres les plus grands du monde lui a certainement fait grandir l’âme aussi. Cette expérience en pays natal plantée dans son cœur ne demandait qu’à se ramifier sur le grand continent.
Elle accompagne alors son époux en République Centrafricaine, à Bangui, puis en Gambie, à Banjul, où elle occupe un poste de cadre commercial et préside le conseil de gestion de l’école française où ses enfants sont inscrits. L’exploration de l’Afrique s’étend au Sénégal, à la Côte d’Ivoire, au Mali. Passage du Centre vers l’Ouest, du vert au désert, qui s’installe dans l’imaginaire d’Hemley.
De retour à Paris, le pas est franchi. Toutes ces expériences l’ont enrichie d’un terreau géographique et humain qu’elle a intimement besoin de planter quelque part, en un lieu partageable, les pages d’un livre issues des grands arbres ! Ce qu’elle a vécu en tant que femme lui permet certainement d’espérer le meilleur pour les femmes, s’il est possible un jour de déverrouiller le poids d’une misogynie séculaire. En octobre 2010, son premier roman voit le jour, Le clan des femmes.
Un style est né, qui ne juge pas mais déroule le fil de la vie sous le regard bienveillant, lucide et joyeux de son auteur. Une force de vie dont hérite pleinement le second roman de Hemley Boum, Si d’aimer… où la dureté des sujets abordés ne laisse jamais en route l’espoir.
La maîtrise de sciences sociales option anthropologie, mise en pratique dans une expérience professionnelle très enrichissante au cœur de l’Afrique, trouve tout son sens et sa finalité dans l’écriture. Une écriture qui met en perspective la destinée humaine dans les sociétés contemporaines, à fleur d’un vécu émotionnel profond.
Source : litenlibassa.con