ESPACE – A 39 années lumières de la Terre se situe une toute petite étoile, une “naine ultra-froide”, appelée Trappist-1. Autour de celle-ci, très proches, se trouvent sept petites soeurs de la Terre. Ces exoplanètes rocheuses font à peu de chose près la même taille que notre planète bleue et ont été découvertes par une équipe internationale (mais très francophone) de chercheurs.
Trois d’entre-elles se situent même dans la fameuse “zone habitable”, ni trop près, ni trop proche de leur soleil pour que de l’eau liquide puisse exister à la surface. Elles pourraient même, potentiellement, accueillir une vie extraterrestre. La Nasa, qui a participé à ces travaux, avait prévenu depuis quelques jours qu’une annonce majeure liée à l’espace était à prévoir.
Avant d’imaginer ces hypothèses, il convient de rappeler ce que les scientifiques ont vraiment découvert. Dans une étude publiée dans la revue Nature ce mercredi 23 février, ils expliquent en détail le fonctionnement de ce système solaire pas si éloigné de nous, à l’échelle de la galaxie. “C’est la première fois qu’autant de planètes de ce type sont découvertes autour d’une étoile”, a déclaré lors d’une conférence de presse Michaël Gillon, auteur principal de l’étude.
Un système qui fait penser à Jupiter
Il faut d’abord bien comprendre que si ces sept planètes ont une masse et une taille proche de la Terre, Trappist-1 n’a pas grand chose à voir avec le Soleil. Cette étoile est en réalité beaucoup, beaucoup plus petite (100 fois) et plus froide. A titre de comparaison, elle est “seulement” 80 fois plus grosse que Jupiter. D’ailleurs, tout le système est proche du fonctionnement de la géante gazeuse et de ses lunes.
C’est parce que Trappist-1 est si petite qu’il a été possible de repérer ces exoplanètes. Les chercheurs ont surveillé le rayonnement de l’étoile grâce à plusieurs télescopes terrestres et spatiaux. Ils y ont discerné des baisses de luminosité, qui correspondent au passage des planètes devant l’étoile (appelée méthode des transits). Comme celle-ci est très petite, ce phénomène est plus facile à discerner que sur des soleils similaires au nôtre.
Autre spécificité: six des sept planètes détectées sont très, très proches de Trappist-1. Sur celles-ci, une année (une révolution autour de l’étoile) dure d’un à dix jours. Mais si elles sont très proches, elles ne sont pas pour autant très chaudes, car Trappist-1 est une toute petite étoile. Du coup, elles se trouvent tout de même à une distance parfaite pour les chercheurs. “Elles pourraient disposer d’eau liquide et peut-être même de vie extraterrestre à la surface”, note Michaël Gillon.
Si les scientifiques sont si enthousiastes, c’est parce qu’ils savent que les années à venir devraient nous en apprendre plus à propos de ces exoplanètes. “Ce système est parfait car il va répondre au débat de savoir si une atmosphère peut exister sur une exoplanète autour d’une étoile naine”, explique au HuffPost France Franck Selsis, chercheur au CNRS et co-auteur de l’étude.
Cette vidéo de Nature, en anglais, montre à quoi ressemble le système de Trappist-1:
Atmosphère ! Atmosphère ! Est-ce que j’ai une gueule d’atmosphère?
Cette histoire d’atmosphère, c’est le nerf de la guerre pour les exobiologistes. Elle est nécessaire pour que la vie puisse exister sur une planète. Mais pour l’instant, nous n’avons pas les moyens d’en savoir plus. Les auteurs de l’étude ont tout de même déjà quelques indices. En observant Trappist-1 avec l’aide du télescope Hubble, ils ont fait des découvertes intéressantes, qui sont actuellement en train d’être vérifiées et devraient être publiées dans les mois à venir dans Nature.
“Nous n’avons pas pu déceler la présence d’eau ou de CO2, mais nous savons déjà qu’il n’y a pas de grandes quantités d’hydrogènes autour de ces planètes. Cela confirme que nous ne sommes pas confrontés à des géantes gazeuses”, précise Franck Selsis.
Pour en savoir plus sur l’atmosphère de ces sept planètes, il va falloir attendre le lancement du télescope spatial James Webb. Ce successeur d’Hubble devrait permettre d’analyser la composition des exoplanètes et ainsi de définir si celles-ci disposent d’une atmosphère, d’eau, voire de vie biologique.
“La présence de méthane, d’oxygène, d’ozone et de CO2 serait une indication forte de la présence de vie à la surface”, selon Michaël Gillon. “Si tout se passe bien et si le télescope fonctionne comme prévu, on observera Trappist-1 dès 2019”, veut croire Franck Selsis.
La revanche des étoiles naines
L’autre raison pour laquelle les chercheurs sont enthousiastes a trait à la taille de cette naine ultra-froide. Jusqu’alors, celles-ci étaient peu étudiées. Pourtant, ces récents travaux couplés à d’autres recherches semblent montrer que ces étoiles disposent de nombreuses planètes rocheuses, similaires à la Terre, en orbite autour d’elles.
Reste que ces petits soleils ont aussi leurs défauts. Plusieurs études, basés sur des modèles mathématiques, affirme que les planètes orbitant autour d’étoiles naines seraient inhabitables. Comme elles doivent se trouver assez proche pour avoir la bonne température, elles seraient alors soumises à des rayonnements trop importants pour qu’une atmosphère, essentielle à l’apparition de la vie, s’y développe.
A propos de Trappist-1, il y a un autre problème. Les planètes ont une rotation synchrone. Cela veut dire que comme la Lune, c’est toujours la même face qui est exposé à la lumière. Pourquoi est-ce problématique? Car du coup, une face serait glaciale, l’autre serait une véritable fournaise.
Mais selon les simulations des auteurs de l’étude, cette rotation synchrone n’empêche pas la formation d’eau liquide à la surface d’au moins trois des sept planètes. Pour les autres, cela reste plus compliqué.
Quoi qu’il en soit, le télescope spatiale James Webb devrait permettre de trancher le débat sur les étoiles naines d’ici quelques années. Et si les planètes autour de ces soleils peuvent effectivement disposer d’une atmosphère et abriter la vie, cela changerait pas mal de choses. “Ces petites étoiles froides sont les plus nombreuses dans notre galaxie, mais personne ne les observait jusqu’alors”, note Emmanuel Jehin, co-auteur de l’étude.
Cela voudrait donc dire que la quasi-totalité des étoiles de notre galaxie pourraient disposer de plusieurs planètes en orbite autour d’elles. Quand on sait que la Voie Lactée est remplie de 200 milliards de soleils, cela laisse rêveur.