Un Terminator de la grippe aviaire
Octopus Robots annonce une levée de fonds d’1,5 million d’euros. Un tour de table bouclé en deux semaines, auprès d’investisseurs privés européens emballés par le potentiel de la jeune entreprise. Car son robot – sorte de « Terminator de la grippe aviaire » – s’annonce comme une réponse au problème insoluble des crises sanitaires qui dévastent les poulaillers.
Le robot parcourt l’espace qu’il doit décontaminer. Il y projette un « brouillard sec, formé de particules tellement fines qu’elles restent en suspension dans l’air et s’immiscent dans tous les coins où peuvent se loger des germes », explique Olivier Somville, le fondateur d’Octopus Robots. Capable de traiter de très vastes surfaces, «Octopus Poultry Safe », la version « volaillère » du robot, offre un autre avantage majeur : il évite le recours aux antibiotiques, qui favorise des phénomènes de résistance.
L’Organisation mondiale de la santé a fait de la résistance antibiotique, déjà responsable de 700.000 décès par an, une priorité mondiale de santé publique. Le Plan d’action mondial sur la résistance aux antibiotiques adopté par l’OMS incite les éleveurs, en partie responsable de ce fléau, à fortement réduire l’utilisation d’antibiotiques.
Fruit de deux ans de recherche et protégée par des brevets (dont un déposé, deux en cours), l’innovation d’Octopus Robots « donne d’excellents résultats ». La machine utilise des solutions naturelles – comme des mélanges d’huiles essentielles – ou sans toxicité comme le peroxyde d’hydrogène. Un produit qui n’est autre que la bonne vieille eau oxygénée et se dégrade sous forme d’eau et d’oxygène. « Nous avons testé le robot dans un bâtiment de 5000 mètres carrés avec cette solution. Les agents pathogènes étaient éradiqués, presque comme si le bâtiment était stérilisé », se réjouit l’entrepreneur.
L’antibiorésistance, priorité de santé publique
Sensibilisés au sujet de l’antibio-résistance et tétanisés par la menace de grippe aviaire, les industriels de la volaille se précipitent aujourd’hui sur l’invention d’Octopus. Parmi eux, le leader mondial du poulet et du bœuf JBS, ou les géants français LBC (1500 éleveurs français) et Doux ont montré leur intérêt. Au total, Octopus Robots a reçu « une dizaine de lettres d’intention formalisées ». Le potentiel du marché est énorme : l’élevage industriel compte un million de bâtiments dans le monde.
Les fonds levés par Octopus Robots serviront à fabriquer les premières séries de machine – avec l’ambition de livrer 600 machines dès 2019. La fabrication – et c’est là la deuxième grande force du projet – se fera en France à des coûts maîtrisés grâce à une conception très réfléchie et frugale : les pièces les plus complexes seront imprimées sur des imprimantes 3D.
Un entrepreneur aguerri
Officiellement créée en 2014, la start-up est en réalité riche d’une première expérience réussie dans la décontamination. En 2000, Olivier Somville rachète un petit équipementier automobile, spécialisé dans la métrologie de haute précision. En 2011, à la demande d’un client, il diversifie l’activité en fabricant une machine servant à pulvériser une solution désinfectante dans les hôpitaux. « Quand nous avons terminé cette machine, nous avons compris la problématiques des maladies nosocomiales », explique Olivier Somville. Il décide alors d’adapter sa machine pour de grands volumes – en la rendant mobile. Un pari sur lequel il mise tout : il vend son entreprise en 2014 à un de ses clients « pour repartir d’une page blanche ». En plus du secteur avicole, les robots peuvent avoir bien d’autres usages. Octopus Robot réfléchit avec la SNCF à l’utiliser pour désherber les lignes TGV. Des développements qui demanderont des nouveaux moyens. L’entreprise, qui table sur un chiffre d’affaire de 8 millions d’euros, songe donc à s’introduire en Bourse d’ici « 12 à 18 mois ».
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