En incorporant dans la bouillie cuite une amylase locale, issue de farine de céréales locales germées, séchées et moulues, on obtient une bouillie normalement liquéfiée sans dilution à l’eau et plus nourrissante pour l’enfant.
Les chercheurs sont unanimes pour constater que, partout dans le monde, les bouillies traditionnelles données aux nourrissons et jeunes enfants en complément à l’allaitement maternel, sont trois fois trop riches en eau. Autrement dit, trois fois trop pauvres, parce que trop diluées.
Les mamans se trouvent obligées de diluer à outrance les bouillies traditionnelles parce que les amidons des farines de céréales ou les amidons des tubercules par lesquels on fabrique ces bouillies gonflent beaucoup à la cuisson et rendent les bouillies trop épaisses pour être facilement avalées par les jeunes enfants. Cet épaississement naturel très important de la bouillie pousse inévitablement à ajouter beaucoup trop d’eau aux bouillies.
La plupart des mamans ajoutent de l’eau et rarement du lait, jusqu’à ce que la bouillie soit assez liquide pour que le jeune enfant puisse boire ou avaler dans un temps raisonnable.
Pour contourner cette pratique qui entame sérieusement la qualité nutritionnelle de la bouillie de l’enfant, l’agro-industrie a développé des solutions non moins efficaces pour mettre à la disposition des commerces et de certains secours d’urgence, des bouillies de meilleure qualité. Notamment, en procédant par:
– Ajout des amylases (*) industrielles (importées) aux farines pour bouillies. Les amylases sont elles aussi des farines, mais qui n’épaississent pas beaucoup à la cuisson, même si on y met beaucoup d’eau.
– Utilisation d’amidons «modifiés» par des procédés chimiques industriels.
– Suppression des amidons dans les aliments pour nourrissons et jeunes enfants.
Ces solutions ont montré leurs limites, et la difficulté à acquérir les bouillies agro-industrielles au niveau local dans les villages, n’est pas la moindre.
Mais pour la maison et donc à l’usage de tous, des études très nombreuses et importantes ont été faites sur la fermentation des aliments par les procédés familiaux traditionnels pour rendre les bouillies un peu moins épaisses. Les résultats sont positifs, en particulier pour le goût, la qualité hygiénique des bouillies et leur conservation.
Cependant, aucune de ces méthodes de fermentation ne permet d’atteindre le niveau énergétique demandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF) pour satisfaire les besoins de la plupart des enfants qui sont de 120 kilocalories pour 100 millilitres, c’est-à-dire avec un petit verre de bouillie liquide cuite.
Liquéfier oui, diluer non
Au Kénya, en Tanzanie et en Inde, du malt (farine d’orge ou par extension, de toute autre céréale germée) est ajouté aux farines pour bouillies à un taux de 10 à 30%. Le malt contient une enzyme naturelle appelée amylase qui permet que la bouillie n’épaississe que peu à la cuisson.
Bien que cette pratique soit efficace, elle demande de préparer beaucoup de céréales germées et les normes d’hygiène à respecter dans cette préparation freinent sa diffusion.
Il existe un autre procédé plus simple et plus efficace: les «BAL-120» ou Bouillies Amylasées Locales à 120 kilocalories par 100ml. Elles sont obtenues en ajoutant seulement une très petite quantité d’amylase (moins de1% de malt) non pas dans les farines non cuites, mais dans les bouillies déjà cuites afin de les liquéfier sans ajouter de l’eau, sans les diluer. Car la cuisson détruit les amylases.
Le schéma ci-dessus montre la différence de quantité d’eau utilisée (pour un verre de 60 grammes de farine) avec la méthode «traditionnelle» et avec les «BAL-120» pour avoir des bouillies suffisamment liquides.
C’est cette méthode de liquéfaction des bouillies sans dilution que nous proposons d’utiliser, comme d’autres femmes le font déjà dans divers pays, et un peu au Cameroun.
120 kilocalories par verre de bouillie
En observant bien le schéma des BAL-120, vous comprendrez mieux pourquoi, même en ayant des bouillies dites enrichies à la farine de poisson, du lait en poudre, du sucre ou de l’arachide (chose qui est du reste bien), il faut ensuite ne pas diluer la bouillie cuite, mais plutôt la liquéfier en y ajoutant une amylase.
Avec un petit volume de bouillie (2 petits verres =200ml), le nourrisson ou le jeune enfant aura alors avalé suffisamment d’énergie (60 grammes de farine =240 kcal par repas) pour être en bonne santé. Le petit enfant aura reçu non seulement la qualité de nourriture, apportée par le poisson ou l’arachide, mais aussi la quantité d’énergie qui lui est indispensable pour grandir normalement. Et comme son estomac ne sera pas «noyé» dans l’eau de la bouillie, il va aussi continuer à bien téter.
Les BAL-120 sont simples et à la portée de tous. Elles sont un des moyens, durable peu couteux, reproductible partout et en tout temps, parce qu’elles utilisent les produits du terroir, pour prévenir et lutter contre la sous-nutrition chronique des enfants.
Essayez l’expérience et faites passer le message autour de vous, afin d’assurer une bonne alimentation et la santé de nos enfants.
(*) Amylases : Produits naturels ou enzymes qui décomposent (digèrent) les amidons cuits (pâteux) et les transforment en divers sucres liquides. L’amylase liquéfie la bouillie chaude dans le bol. Elle est contenue dans du malt (farine de céréale germée).
– Dans notre prochaine édition: Comment fabriquer le malt à la maison, pour la bouillie de l’enfant.