L’entreprise française Total est prête à se retirer d’Iran à cause du rétablissement des sanctions américaines. Le groupe explique dans un communiqué que, sauf dérogation accordée par les Etats-Unis, Total préfère abandonner son implication dans un important champ gazier iranien plutôt que de risquer des sanctions américaines, conséquences du retrait des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien.
Mais cette position du géant pétrolier est révélatrice du cas de toutes les entreprises françaises et européennes. Les sociétés chinoises et russes sont à l’affût. La société chinoise CNPC remplacera Total dans le contrat pour le développement en Iran de la phase 11 du champ gazier Pars Sud en cas du retrait du groupe français, a déclaré mercredi soir le ministre iranien du Pétrole.
« Les conséquences indirectes de la décision américaine vont favoriser les positions russes et chinoises dans la région et avantager leurs entreprises », a relevé le président français Emmanuel Macron à Sofia, illustrant les craintes des Européens. Mais « nous n’allons pas déclencher une guerre commerciale avec les Etats-Unis sur l’Iran ou contre-sanctionner des entreprises américaines », a-t-il par ailleurs assuré.
Emmanuel Macron : «Les conséquences indirectes de la décision américaine vont favoriser les positions russes et chinoises dans la région»
Les négociations sont complexes, mais l’équation est simple : les Etats-Unis pèsent plus lourd que l’Iran, pour l’immense majorité, voire l’ensemble des entreprises européennes. Et ce, en dépit des investissements parfois conséquents réalisés ces dernières années dans la République islamique. Comme Total, une soixantaine d’entreprises françaises impliquées en Iran est en lien constant avec le ministère français de l’Economie, engagé dans des négociations avec Washington.
La France et l’Union européenne veulent obtenir des exemptions de la part des Etats-Unis, pour certains contrats ou certaines entreprises en plaidant la bonne foi des entreprises qui ont investi en Iran après la signature de l’accord de 2015. Des moyens de contourner les sanctions américaines sont également à l’étude, mais la perspective de représailles fait peur. Paris a demandé aux entreprises, en attendant l’issue des discussions en cours, de ne pas prendre de décision.
La Chine et la Russie, elles, se frottent les mains : également signataires de l’accord, leurs entreprises ont énormément investi en Iran depuis 2015. Nettement moins exposées sur le marché américain, la plupart n’a que faire du rétablissement des sanctions américaines. Téhéran a d’ailleurs déjà confirmé qu’en cas de retrait de Total, ses parts dans le projet gazier de South Pars seraient allouées au chinois CNPC qui, lui, n’a aucune intention de se retirer.
La position du groupe pétrolier français a changé
Total est la seule compagnie européenne qui a investi en Iran depuis l’entrée en vigueur de l’accord sur le nucléaire avec Téhéran. La compagnie française avait également été la seule à braver les sanctions américaines dans les années 1990.
Mais aujourd’hui la situation n’est plus du tout la même pour Total, ses intérêts sont beaucoup plus importants aux Etats-Unis, comme l’a expliqué à RFI, Francis Perrin, président de Stratégies pétrolières et énergétiques. Le groupe français n’est pas prêt à sacrifier ses intérêts américains pour rester en Iran.
Total n’est pas prêt à choisir l’Iran contre les Etats-Unis, ce qu’il était prêt à faire il y a une vingtaine d’années
Avec rfi