Le président Buhari a donné l’ordre que tous ceux impliqués dans des contrats frauduleux d’achats d’armes et d’équipement, qui représentent plusieurs milliards de dollars, “rendent des comptes”.
La lutte contre les islamistes de Boko Haram a été minée par la corruption au sein même de l’armée nigériane, a regretté le président nigérian Muhammadu Buhari après avoir reçu un rapport d’une commission spéciale sur ce sujet.
Le rapport “révèle plusieurs transactions financières illicites et frauduleuses”, mettant notamment en cause le Bureau du conseiller à la Sécurité nationale, dont l’ancien titulaire est déjà inculpé de blanchiment d’argent, affirme un communiqué de la présidence nigériane publié dans la soirée de mardi 17 novembre.
Le président Buhari a donné l’ordre que tous ceux impliqués dans des contrats frauduleux d’achats d’armes et d’équipement, qui représentent plusieurs milliards de dollars, “rendent des comptes”, ajoute le communiqué.
“Les révélations du rapport sont extrêmement inquiétantes compte tenu que ces malversations ont eu lieu à un moment où l’armée combattant l’insurrection dans le nord-est avait un besoin désespéré d’équipements et de munitions”, a jugé le président Buhari.
“Si les fonds siphonnés par ces entreprises douteuses avaient réellement été utilisés dans le but auquel ils étaient destinés, des milliers de vies innocentes de Nigérians auraient été épargnées”, a-t-il assuré.
Général à la retraite et déjà président du Nigeria de décembre 1983 à août 1985, Muhammadu Buhari a pris ses fonctions en mai et s’est fixé comme priorité de mettre un terme d’ici la fin de l’année à l’insurrection de Boko Haram qui a fait quelque 17.000 morts depuis 2009.
Il avait institué au printemps une commission spéciale de 13 membres chargée d’enquêter sur les contrats d’achats militaires de 2007 à 2015, dont le rapport n’a pas été rendu public.
Le Bureau du conseiller à la sécurité nationale visé
Selon le communiqué de la présidence, les malversations concernent particulièrement le Bureau du conseiller à la sécurité nationale, dont l’ancien titulaire, Sambo Dasuki, 60 ans, a déjà été inculpé de détention d’armes et blanchiment d’argent.
Homme-clé du régime de l’ex-président Goodluck Jonathan battu par M. Buhari lors de la présidentielle fin mars, Sambo Dasuki avait servi comme conseiller à la sécurité de juin 2012 jusqu’à son limogeage mi-juillet par le président Buhari.
Selon le rapport de la commission cité par le communiqué présidentiel, quelque 5,3 milliards de dollars avaient été alloués au Bureau du conseiller à la sécurité nationale et aux états-majors de la Défense, des armées de terre et de l’air et à celui de la marine.
“Il apparaît que malgré cet énorme effort financier, très peu a été dépensé pour soutenir les approvisionnements militaires”, note le communiqué.
Des 513 contrats étudiés, 53 se sont révélés “frauduleux” et Sambo Dasuki, selon la présidence, a “conclu des contrats fictifs et fantômes” pour un total de 2 milliards de dollars pour l’acquisition de quatre chasseurs Alpha Jet, douze hélicoptères et des explosifs et munitions, selon la présidence.
Les contrats “n’ont pas été exécutés, les équipements ne sont jamais parvenus à l’armée de l’air nigériane et ne figurent pas à son inventaire”, poursuit-elle.
Selon la présidence, le rapport note que Sambo Dasuki avait également demandé à la Banque centrale du Nigeria de transférer 132 millions de dollars et près de 10 millions d’euros sur des comptes ouverts en Afrique de l’Ouest, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis “à des fins indéterminées, sans document d’explication sur les transactions”.
Sambo Dasuki a pour sa part indiqué mercredi dans un communiqué qu’il était “surpris” et “embarrassé” par ces accusations alors qu’il n’a jamais été invité à se présenter devant la commission.
En défendant le bilan de son action, qui a coïncidé avec une vague de succès militaires contre Boko Haram depuis le début de l’année 2015, il a ajouté qu’il “laisse les Nigérians juger”.
Avec AFP