Vous lancez le 5 mars une opération qui associe des consommateurs à la production, en ouvrant les portes de 5 de vos usines en France. En quoi cela consiste-t-il?
Cette opération, baptisée «C’est moi qui fabrique», se déroulera d’avril à juin. Elle consiste à sélectionner une centaine de personnes, qui auront candidaté via les réseaux sociaux, pour leur montrer nos usines, leur expliquer l’origine des produits et les associer à la fabrication en les plaçant à des postes de production. Ce n’est donc pas du tourisme industriel ou une opération portes ouvertes. Cela va s’accompagner d’une campagne de publicité corporate à la télévision et dans la presse pour réaffirmer nos valeurs, ce que nous n’avions jamais fait.
Les multinationales se sentent-elles à ce point contestées pour jouer la carte de la transparence?
Il existe une défiance, c’est très puissant. Elle existe dans tous les domaines: celle des citoyens contre la classe politique ou les médias rejoint celle des consommateurs à l’égard des grands groupes. Notre objectif est de faire connaître notre savoir-faire et de montrer notre ancrage territorial. Il y a un besoin indispensable d’associer les gens à tous les processus de décision. On quitte le domaine de la communication pure pour engager un dialogue avec les parties prenantes: nos salariés et les consommateurs, notamment.
Mais est-ce utile de communiquer alors que votre notoriété est proche de 100%?
Une fois que les gens ont dit que Nestlé est un géant mondial l’agroalimentaire, ils ne savent pas grand-chose. Notamment que nous employons 10.000 salariés en France dans 24 usines.
On a le sentiment que des émissions, comme Cash Investigation d’Elise Lucet, ont un impact très fort sur les grandes marques.
C’est vrai que le marché du jambon, par exemple, est affecté par des reportages qui instruisent à charge. Lors de la diffusion de cette émission, en septembre, nous ne pouvions pas dire que notre R&D travaillait depuis des années sur le développement d’une gamme sans nitrite car nous ne voulions pas le dévoiler à la concurrence. En février, cette gamme a été lancée par Herta, comme il existe une gamme bio.
Est-ce que cela remet en question la production de masse qui fait la force de Nestlé?
Il y a chez les consommateurs un besoin de plus de naturalité et d’authenticité comme en témoignent le succès de l’agriculture bio ou des circuits courts. Cette attente est réelle. Ce n’est pas antagoniste avec le mass market, mais cela a un coût. Il faut être en mesure de répondre à tous les demandes. C’est que nous faisons avec le lancement de Filière Préférence pour Herta. Ou sur les paquets Mousseline, en indiquant l’origine française des pommes de terre et du beurre. A présent, nous souhaitons le faire savoir plus largement.
N’y a-t-il pas un risque à s’ouvrir davantage, notamment en cas de difficulté ou de restructuration?
Le «vivons cachés pour vivre heureux», ça a ses limites. Il y a sans doute un risque à jouer la transparence, mais il faut le faire car l’ère est à plus de dialogue, d’où l’opération que nous lançons la semaine prochaine. C’est une première pour nous en France. C’est aussi le cas, à ma connaissance, dans le groupe Nestlé.
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