Capital.fr : Qu’est-ce que le «brown-out» ? Un nouveau syndrome de maladie professionnelle ?
Dr. François Baumann (1) : Disons plutôt que ces deux enseignants ont baptisé d’un terme, promis à un bel avenir, une situation que bien des cadres ressentent : celle d’avoir à effectuer des tâches, en contradiction avec leur éthique personnelle. C’est le manager qui doit mettre la pression sur son équipe pour atteindre ses propres objectifs, sans lui donner les moyens de réussir. C’est le commercial qui doit vendre des produits fabriqués dans des conditions très médiocres et dont la qualité laisse à désirer. C’est le responsable RH qui doit virer du personnel pour faire des économies. Les situations diffèrent mais à chaque fois la logique reste là-même. Certains s’en accommodent en mettant un mouchoir sur leurs actes et en se disant que s’ils ne le font pas, d’autres le feront à leur place. D’autres, non. Et quand l’écartèlement psychologique est trop grand, cela peut créer une angoisse voire des phénomènes dépressifs.

Capital.fr : Mais des salariés devant agir contre leur conscience, ce n’est pas franchement nouveau ?
Dr. François Baumann : Non, vous avez raison. Mais l’épuisement professionnel ou burn-out, dont on parle beaucoup depuis dix ans, existait aussi bien avant. Simplement, aujourd’hui, des experts identifient les différentes causes du mal-être en entreprise. Et le brown-out en fait partie. Cela a le mérite de nommer les problèmes et pour les patients, de ne plus se sentir méprisés quand ils évoquent leurs souffrances au travail. Bien sûr, tout le monde ne sera pas concerné de la même manière. Les cyniques ou les ambitieux résisteront mieux que les autres.

Capital.fr : Et pour les autres, existe-t-il des solutions ?
Dr. François Baumann : Quand un cadre doit agir contre sa morale, sans que cela soit naturellement délictueux, il ne faut pas être naïf. Allez dire à votre N+1 que vous refusez de virer un membre de votre équipe car vous n’avez pas grand chose à lui reprocher, ne le fera pas changer d’avis. Au contraire, c’est vous qui serez dans le viseur pour une faiblesse incompatible avec une activité de manager. La seule solution sera alors de partir, ce qui par les temps qui courent est une prise de risque professionnelle importante. Mais si la situation est psychologiquement trop difficile à supporter, c’est encore la meilleure chose à faire.

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