La dirigeante de l’assureur marocain expose sa stratégie de fidélisation des clients pour résister à la concurrence.
Présent dans 26 pays à travers le continent, le marocain Saham Assurance – chiffre d’affaires de 4,39 milliards de dirhams (410 millions d’euros) en 2016 – a connu une évolution importante ces dernières années. Mais avec 34 compagnies dans son giron, son expansion a été jugée trop rapide par certains.
Un an après sa nomination à la tête du conseil d’administration de l’assureur, Nadia Fettah reconnaît que la gestion de plusieurs marchés n’est pas si simple, car le secteur souffre du faible pouvoir d’achat des clients et du manque de ressources humaines hautement qualifiées. Le groupe a aussi dû faire face à la crise dans des pays producteurs de pétrole (Angola, Ghana, Gabon, Nigeria…).
Jeune Afrique : Dans un marché subsaharien concurrentiel, quels sont vos relais de croissance ?
Nadia Fettah : Notre groupe est tourné vers le service à la personne. Nous voulons donc développer tout ce qui est vente au détail, notamment dans les secteurs de l’automobile, de la santé et de la vie. Dans un marché aussi concurrentiel, le plus important, c’est de garder le client. Cela coûte tellement cher de gagner un client que nous devons tout faire pour le garder. D’autant que pour mener une guerre des prix, il faut mobiliser beaucoup de moyens, et ce n’est pas dans notre stratégie. Des assureurs ont importé, dans le passé, une industrie sous sa forme la plus vieillissante dans un continent très jeune. Or le client africain n’a pas les mêmes besoins que le client européen. Le consommateur doit être convaincu de l’utilité de l’assurance, sinon il n’ira pas en souscrire une. Il est vrai aussi qu’il y a eu beaucoup d’arnaques à l’assurance, et le faible pouvoir d’achat constitue un frein.
LE CONTINENT OFFRE UN POTENTIEL IMPORTANT QUI NOUS PERMET DE CROIRE EN LA POSSIBILITÉ DE CRÉER UN GRAND GROUPE PANAFRICAIN
N’est-il pas plus difficile de gérer plusieurs petits marchés à la fois ?
Chacun de nos marchés peut être en effet considéré comme petit. Aucune de nos filiales n’a les moyens de se payer les expertises et les infrastructures dont elle a besoin. Et nous n’avons pas toutes les compétences nécessaires. Le manque de formations spécialisées dans les métiers de l’assurance nous préoccupe.
Cependant, le continent offre un potentiel important qui nous permet de croire en la possibilité de créer un grand groupe panafricain. Pour pouvoir construire un ensemble fort, nous devons consolider notre réseau. Nous ne savons pas encore avec combien d’implantations. Nous regrettons vivement de ne pas être plus présents en Afrique du Nord. L’occasion ne s’est toujours pas présentée, mais nous restons attentifs.
NOTRE INVESTISSEMENT DANS SUNU EST STRICTEMENT FINANCIER
En juillet 2017, vous entriez au capital de Sunu (en en prenant 21 %) sans l’aval préalable de ses actionnaires. Ne pensez-vous pas que cela a entaché votre image au sud du Sahara ?
Pas du tout. Nous sommes des compétiteurs et nous aimons gagner. Mais nous avons aussi une éthique des affaires. Notre investissement dans Sunu est strictement financier. Des porteurs d’actions voulaient nous vendre leurs participations dans cette compagnie. Convaincus de la rentabilité de cet investissement, nous avons effectué ces acquisitions. Notre portefeuille comprend des participations dans d’autres compagnies d’assurances. Je ne pense pas que nous ayons dérangé Sunu dans ses affaires. Mais si un jour cette compagnie était à vendre nous pourrions réfléchir au fait d’aller plus loin. De toute façon, si nous continuons d’exister, c’est bien qu’il y a eu des opportunités sur le marché.
Avec jeuneafrique