Le numérique manque de femmes. Elles sont moins de 20% des effectifs dans les métiers au cœur du secteur. Un problème pour les recrutements, un handicap pour les performances. Le forum « Jeunes femmes & Numérique », le 13 mai à Rennes, pourrait être un point de départ pour inverser la tendance.
La transformation numérique qui diffuse dans toute la société peut-elle se faire sans les femmes ? D’évidence, non. Pourtant, la sous-représentation des femmes dans le secteur perdure. Elle pourrait même s’amplifier selon un rapport de l’OPIIEC publié en février 2016 : « Contrairement aux secteurs de l’ingénierie où les effectifs féminins progressent positivement et lentement, le secteur du numérique accueillerait de moins en moins de femmes. De 1972 à 1985, l’informatique était la deuxième filière comportant le plus de femmes ingénieures au sein des formations techniques, aujourd’hui la tendance s’est inversée et même, selon certains interlocuteurs, décroit. »
Pourtant la demande existe
Est-ce un problème pour les entreprises ? « Oui » selon Cécile Vandorme Martin, qui organise le forum du 13 mai pour le compte de l’association Social Builder. Pour preuve, elle avance le nombre, « une cinquantaine », des entreprises et structures motivées pour s’impliquer dans l’événement : « Elles ont accepté parce qu’elles sont convaincues que la mixité profite à l’entreprise sur tous les plans : l’ambiance d’équipe, la créativité, l’enrichissement des produits, la manière de commercialiser… L’équilibre hommes-femmes est un plus en termes de management. »
La demande des entreprises serait donc là, mais le problème est en amont : les écoles qui préparent aux métiers du numérique ont du mal à recruter des candidates. « Sur 24 étudiants, nous sommes 3 filles« , constate Mathilde Kerhom, en première année de formation Concepteur et développeur en projets numériques à l’IMIE. Pourtant, la jeune femme ne ressent aucune différence avec les garçons, ni en classe, ni dans l’entreprise où elle travaille en alternance en tant que « développeur d’applications mobiles ». « Même si nous sommes moins nombreuses, nous sommes très bien accueillies. Pour moi, être une fille n’a ni avantage, ni inconvénient. C’est normal, tout simplement. »
La jeune étudiante ne s’explique pas pourquoi les filles boudent le numérique : « C’est sans doute une question d’image sociale, une représentation des métiers féminins qui remonte à la petite enfance ». Elle-même s’était orientée dans un premier temps « vers des études de psycho ». Parmi ses motivations pour une carrière dans le numérique, outre son intérêt pour le secteur elle avance l’employabilité et le fait qu’il existe des opportunités « même avec des études courtes ».
La mixité : un atout pour la startup Eliga
Autre témoignage, celui d’Estelle Bagot, cofondatrice de la startup Eliga en tandem avec un de ses anciens collègues, Alain Papazoglou. Pour elle, le fait d’être une femme « est un avantage ». Elle précise immédiatement : « Ou plutôt, je le transforme en avantage parce que dans un milieu où il y a peu de femmes, c’est un élément différenciant. Avec Alain nous sommes parfaitement complémentaires : lui est développeur de technique, moi développeur de business. Nos profils sont mixtes sur tous les plans. C’est ce qui fait la force de l’entreprise. »
Eliga existe depuis deux ans. La startup est spécialisée dans les applications « web, multi-écrans et temps réel » destinées à deux marchés : l’événementiel et la formation. Elle développe des outils d’interaction entre les terminaux personnels, smartphones et tablettes, et « les écrans verticaux » des salles de conférence ou d’apprentissage. Le premier outil maison, YouSlide, permet de diffuser le contenu d’une présentation sur les terminaux mobiles du public « en mode full-web » tout en offrant des possibilités de prise de notes et d’interaction.
L’entreprise, qui « génère du chiffre depuis le début », travaille en ce moment à une levée de fonds. « Le fait qu’Eliga soit dirigée par une femme et un homme est très bien perçu, y compris des investisseurs. Les femmes n’abordent pas les sujets de la même façon. La richesse naît de la diversité des approches. Si j’ai un message à porter, c’est le suivant : allez les filles, mettez-vous au code parce que c’est sympa. Ou parce que le numérique n’est pas fait que pour les gens qui savent coder. Il faut y aller parce qu’il existe de réelles opportunités. »
Le 13 mai dans les locaux de Technicolor
Selon le communiqué qui annonce l’événement, le Forum Jeunes Femmes & Numérique se veut être « un accélérateur des startups et des carrières des femmes ». Il est ouvert à toutes et tous afin d’aller gratuitement « à la rencontre des acteurs du numérique autour de sessions de mentorat et de recrutement, des ateliers et des expériences digitales. Les startupeuses pourront également échanger avec des entrepreneur.e.s et participer à des ateliers interactifs autour de la création d’entreprises ».
Il aura lieu sur le campus de Technicolor, à Cesson-Sévigné, près de Rennes de 9h à 17h30. Le comité de projet, qui a accompagné l’organisation de l’événement autour de Cécile Vandorme Martin et Social Builder, réunit Images & Réseaux, la French Tech Rennes Saint-Malo, Rennes Atalante, Technicolor, Rennes Métropole, Femmes de Bretagne, la MEIF, Ty Kaz, Eqwall, Eliga et l’association Breizh Small Business Act. Le forum est soutenu par la Direction Régionale aux Droits des Femmes et à l’Egalité (DRDFE) de Bretagne, et par le Conseil Régional de Bretagne.
Avec lemag-numerique.com