Un système de filtration fait maison utilisant des couches de sol et de gravier nettoie suffisamment les eaux usées domestiques pour les rendre adaptées aux besoins de l’irrigation, a constaté une équipe de recherche au Maroc.
Le prototype de filtre, testé dans la région d’Al Haouz, à environ 40 kilomètres de Marrakech, a permis d’éliminer une grande quantité de déchets tels que des particules solides, la pollution organique, l’azote et les résidus d’engrais.
Le système a également réussi à éliminer les bactéries coliformes et d’autres agents pathogènes dans l’eau, y compris les matières fécales, les bactéries E. coli et les streptocoques.
“Le coût de cette technologie est très faible par rapport à celui de systèmes comme le lagunage et les filtres à sable.”
Laila Mandi
Le principe du système de filtration repose sur un processus en deux étapes, sur la base de composants qui peuvent être facilement assemblés avec des matériaux locaux, dans des barils d’eau.
Les chercheurs ont créé des “briques” filtrantes à partir de sol sablonneux, de charbon de bois, de sciure de bois et de ferraille et les ont emballées dans des barils de gravier.
En traversant le baril, l’eau est filtrée alternativement par les briques et le gravier.
Les résultats de l’expérience ont été publiés le 13 octobre dans la revue International Journal of Hygiene and Environmental Health.
Laila Mandi, chercheuse à l’Université Cadi Ayyad, au Maroc et auteur principal du document, a déclaré que les briques de sol étaient suffisantes pour filtrer les déchets organiques et les nutriments de l’eau.
Mais combiné avec du gravier, le système en deux étapes devient suffisamment efficace pour s’attaquer aux agents pathogènes.
Elle a déclaré que le système pourrait servir de moyen de filtration de l’eau à bon marché et à faible technologie dans les zones rurales et arides.
“Le coût de cette technologie est très faible par rapport aux systèmes comme le lagunage et les filtres à sable”, a déclaré Laila Mandi.
La méthode pourrait aider à recycler l’eau dans les régions arides, telles que les déserts nord-africains et asiatiques, où la préservation de l’eau est cruciale et coûteuse pour les agriculteurs, la purification industrielle de l’eau n’étant pas une option.
Les chercheurs ont travaillé avec les habitants du village de Talat Merghen, pour tester les prototypes.
Ils ont collecté les eaux usées domestiques de 72 personnes dans huit ménages.
L’eau a été stockée dans un réservoir, d’où elle a d’abord été introduite dans un bassin de décantation – pour séparer les sédiments et le limon [formation sédimentaire dont les grains sont de taille intermédiaire entre les argiles et les sables, NDLR] -, puis dans le système de filtration à deux étages.
Une fois optimisé pour la charge d’écoulement, le système a éliminé environ 90% des polluants, dont environ 95% d’azote, un résidu d’engrais.
L’eau filtrée n’était pas potable, mais susceptible d’être utilisée pour l’irrigation et les tâches ménagères.
Elle pourrait être rendue potable avec un traitement supplémentaire, comme la chloration ou un traitement par rayonnement UV, a déclaré Laila Mandi.
Cependant, le système aurait du mal à s’accommoder de contextes de pollution chimique dangereuse, comme les métaux lourds et les pathogènes plus résistants tels que le choléra et la salmonelle, explique Helmy Zanfaly, chercheur au Centre de recherche national égyptien, au Caire.
“Il y a un besoin pour un processus de désinfection supplémentaire avec du chlore, par exemple, ce qui ajoute une contrainte à la technologie”, estime-t-il.
Helmy Zanfaly a également exprimé sa préoccupation au sujet de la croissance des algues dans le filtre, en particulier à des températures élevées.
“Le média filtrant doit être lavé à contre-courant ou changé après un certain temps, car tout biofilm qui se forme provoquera un colmatage”, a-t-il déclaré.
Dans leur article, les chercheurs admettent que le colmatage est un problème, mais estiment que la taille et la surface du gravier dans lequel les briques filtrantes sont posées pourraient réduire la croissance des algues.
Leah Boutilier, chercheuse à l’Université Dalhousie à Halifax, au Canada, a pour sa part déclaré que le prototype pourrait également nécessiter un ajustement, pour s’assurer que le type de sol utilisé pour confectionner les briques laisse passer suffisamment d’eau. Ceci, a-t-elle dit, est important pour reproduire le système ailleurs.
“La conductivité hydraulique du sol peut être très variable et cela aura une incidence sur la capacité du filtre à accepter et à filtrer les eaux usées à long terme”, a-t-elle fait valoir.
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