Emmanuel Macron se rend, ce jeudi 15 novembre, au Maroc pour inaugurer avec le roi Mohammed VI le TGV marocain, premier train à grande vitesse d’Afrique. Un chantier de huit ans pour un train qui va relier la capitale économique, Casablanca, à Tanger, deuxième pôle économique du royaume.
Voyager de Tanger à Casablanca en 2h30 au lieu de 5 heures de train – s’il n’y a pas de retard – ce sera désormais possible avec le nouveau TGV marocain. D’un investissement de près 2,3 milliards d’euros, ce projet est à moitié financé par la France. Mais il sera autant bénéfique pour le Maroc, selon Mehdi Fakir, économiste spécialisé dans l’évaluation des politiques publiques : « Le TGV, ce n’est pas un luxe. Lorsque vous pensez à la mobilité comme élément majeur qui va permettre de développer au niveau économique un pays et qui permettra de relier deux grands pôles du royaume, c’est quelque chose qui ne pourra être que louable. On cherche à ce que Tanger soit un vrai pôle économique et pas uniquement un pôle industriel. Les cadres de Casablanca vont se déplacer rapidement à Tanger, les cadres de Tanger vont se déplacer à Casablanca. La complémentarité sur le plant économique est très importante et les retombées vont se voir à moyen et long terme. »
Quelle pertinence pour ce projet ?
Avec Tanger Med, premier port d’Afrique et l’écosystème automobile créé autour de l’usine Renault, Tanger est le deuxième pôle économique du pays. La ligne TGV devrait, ensuite, rejoindre deux autres grandes villes du Maroc : Marrakech et Agadir, plus au sud, malgré les critiques des détracteurs du TGV. Depuis 2012, le collectif Stop TGV se questionne sur la pertinence de cet investissement colossal et des priorités fixées par l’Etat marocain. A sa tête, Omar Balafrej, député de la Fédération de la gauche démocratique : « Dix mètres de TGV, c’est l’équivalent d’une petite école dans le monde rural. Au Maroc, l’Etat dépense à peu près 600 euros par an et par élève dans l’éducation publique. Pour donner un ordre de grandeur, en France, vous dépensez autour de 8 000 euros. Tant que nous n’avons pas réglé nos problèmes principaux, et l’éducation est un problème principal, nous ne pouvons pas nous lancer dans ce genre de projets gigantesques. »
Pour le collectif Stop TGV, l’Etat, à travers l’Office national des chemins de fer (ONCF), aurait plutôt intérêt à investir dans les trains régionaux afin d’atteindre certaines villes isolées et de désenclaver le monde rural. Du coup, les voyageurs marocains sont partagés, entre fierté nationale et espoir de développement d’un côté et de l’autre, défiance envers l’ONCF suite aux nombreux retards et à l’accident de train qui a fait sept morts en octobre 2018 : « Il y a des retards chaque jour sur tous les horaires, dit celui-ci, quand il pleut on a des écoulements partout. L’ONCF, vaut mieux qu’ils investissent sur les voyages normaux avant d’investir sur un TGV, ils n’ont même pas d’infrastructure. »
Un TGV accessible à tous ?
Pour cet autre voyageur, « on ne sait pas si ça va marcher avec l’ONCF car c’est leur première expérience sur une ligne à grande vitesse. » Pour celui-ci, par contre, « c’est un projet d’avenir pour le Maroc, il y’a aussi des grandes entreprises qui vont rentrer au Maroc pour investir de gros chiffre d’affaires pour les jeunes marocains et pour les jeunes diplômés ; c’est une très bonne chose oui. » Un voyageur se posait aussi la question du prix du billet de train, afin de savoir si ce TGV serait accessible à tous.
Avec RFI