Vacances illimitées, chalet d’entreprise, party aux Bahamas… L’attraction et la rétention des milléniaux constitue un réel défi pour les entreprises spécialisées dans les technologies de l’information (TI), d’autant plus que la pénurie de talents fait rage dans bien de ces spécialités. Du coup, on a parfois l’impression que certaines firmes jouent au «voisin gonflable», avec leur marketing RH : entre les voyages dans le sud de GSOFT et le chalet d’entreprise de Mirego, il ne semble plus y avoir de limites aux excentricités (et aux investissements!) que certaines boîtes déploient pour faire parler d’elles et attirer des candidats. Idem, les pratiques de gestion importées de la Silicon Valley (vacances illimitées, traiteur et gym au bureau, heures flexibles, etc.) agissent comme hameçon de recrutement, et sont abondamment utilisées pour faire mousser l’image d’employeur modèle des entreprises en TI.
Mais à force de vouloir dorer la pilule pour les candidats et pour leurs employés dans l’idée de se faire du capital de marque, les firmes en question risquent fort la surdose de sucre. C’est à se demander à quel moment cette surenchère deviendra contre-productive…
Par conséquent, si vous songez, à votre tour, joindre la vague des employeurs les plus cools du Québec, mieux vaut vous poser les questions suivantes avant de vous lancer :
Serez-vous en mesure d’attirer les employés que vous ciblez?
Les milléniaux ne sont pas naïfs. Ils savent détecter le non-dit et lire entre les lignes des discours officiels. Ainsi, un environnement de travail à la californienne est rarement un «pays de licornes», et ils en sont bien conscients. En réalité, ce type de culture va de pair avec des exigences importantes qui entraînent un niveau de compétition élevé, et par suite… un rythme de travail très soutenu pour les employés.
De plus, les membres de la génération Y ne sont pas nécessairement avides de mélanger vie familiale, vie sociale et vie de bureau. Ils ne rêvent pas tous de semaines de fous et de vacances illimitées (qu’on n’ose jamais prendre, car le voisin travaille tous les samedis depuis des mois… même si c’est à Prague ou au chalet). Les pères et les mères de famille qui doivent arriver à la garderie avant 17h30 sautent rarement de joie à l’idée de partager plus d’heures avec leurs collègues qu’avec leurs enfants. Donc, avant de vous positionner comme un employeur à la Google, soyez certain de pouvoir vivre avec cette réalité.
Par ailleurs, les professionnels séniors pourraient avoir la perception que l’image d’employeur du type «camp de vacances» signifie que l’entreprise donne la priorité aux juniors et à leur style de vie.
Vos employés vous choisiront-ils pour les bonnes raisons?
Les jeunes qui seront séduits par l’aspect ludique de votre environnement de travail et par les conditions d’emploi glamour que vous ferez miroiter vous seront-ils plus dévoués et plus fidèles? Croiront-ils dans la mission? Seront-ils prêts à faire les sacrifices qui s’imposent si votre entreprise traverse une mauvaise passe? Joueront-ils, à leur tour, aux «employés gonflables», tenant tous ces avantages pour acquis et s’en allant voir ailleurs dès que vous leur enlèverez l’un de leur jouets?
Pour contrer cet effet, il faut absolument dévoiler les deux côtés de la médaille et éviter de vous vendre comme un royaume magique à la Walt Disney. L’authenticité est toujours payante à long terme. Vous offrez beaucoup? Alors annoncez que vous en demandez beaucoup en retour.
Vos clients auront-ils la perception de payer pour vos folies?
Un aspect qui n’est pas soulevé quand on parle de marketing RH extrême, c’est la perception potentielle des clients. Quand on lit dans les médias que le party de Noël de notre fournisseur a coûté des centaines de milliers de dollars, on ne peut s’empêcher de penser qu’en bout de ligne, c’est nous qui subventionnons ce train de vie princier! Encore une fois, tout cela n’est que perception, mais il faut en tenir compte quand on analyse ce phénomène d’un point de vue marketing.
Ce positionnement pourrait-il finalement nuire à votre image?
S’exposer, c’est à la fois une énorme opportunité et un terrible risque. En envoyant le message que votre firme est un employeur hors-norme, il sera tentant pour les employés frustrés – il y en a toujours – de faire connaître l’autre côté du miroir via les médias sociaux, par exemple. En cas de ralentissement des affaires, les médias ne manqueront pas de souligner que le souper de Noël se fera cette année chez Saint-Hubert au lieu du Club Med. Tous les cas de restructuration, de licenciement massif ou de déconfiture seront scrutés à la loupe. Les entreprises qui se surexposent sont par conséquent condamnées à l’excellence et au succès.
Marque employeur, que faire?
Cela dit, il y a beaucoup plus d’avantages à soigner sa marque employeur qu’à ne rien faire. Cette démarche se doit d’être stratégique, soutenable à long terme, pointée vers la bonne cible et, surtout, demeurer constamment honnête et authentique.
Bref, retenez que vous n’avez pas à copier les façons de faire de Netflix, Zappos et autres Apple pour attirer des personnes talentueuses. L’imagination et la sincérité seront toujours vos meilleurs alliés pour faire de votre marketing RH un franc succès!
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