En poste depuis décembre 2012, Mamadou Sanogo (52 ans), ministre de la Construction, du Logement, de l’Assainissement et de l’Urbanisme a transformé son ministère. Ce consultant en ingénierie informatique a informatisé son administration et réformé son organisation.
Il souhaite maintenant se concentrer sur le développement des logements sociaux,programme phare du quinquennat d’Alassane Ouattara, inscrit au rang des priorités par le ministre.
Jeune Afrique : Pourquoi le programme de logements sociaux a-t-il accusé un tel retard ?
Mamadou Sanogo : Parce qu’il y avait beaucoup à faire ! Il a d’abord fallu trouver le foncier à Abidjan et à l’intérieur du pays. Puis mobiliser les moyens financiers correspondant aux droits coutumiers de ces terrains. Et enfin réaliser les études, les états des lieux nécessaires, la topographie de l’urbanisme en prévision de l’aménagement des sites. Rien de tout cela n’avait été fait. Il fallait remotiver tout le monde et, pour cela, nous avons lancé en mars 2013 et début 2014 deux vastes opérations de présouscription et de précommercialisation des logements, tant en Côte d’Ivoire qu’auprès de la diaspora. Nous avons reçu près de 75 000 demandes pour un programme de 60 000 logements. Trente-neuf promoteurs ont été sélectionnés, sur une liste de 150. Tous les acteurs se sont ainsi remobilisés, et le programme a pu démarrer. Depuis le mois de janvier 2015, c’est plus de 40 milliards de francs CFA [plus de 60 millions d’euros] qui ont été décaissés par l’État.
La Côte d’Ivoire a-t-elle les moyens de financer un tel programme ?
Il va être difficile de produire des maisons à 5 millions de francs CFA l’unité compte tenu de l’augmentation du coût des matériaux. Nous demandons surtout une production massive de logements estimés entre 12 et 15 millions de francs CFA. En analysant les 75 000 dossiers de souscripteurs réceptionnés, nous avons pu constater que plus de 60 % risquent de voir leur projet rejeté auprès des banquiers et des promoteurs immobiliers.
Que pouvez-vous faire ?
Face à cette situation, nous avons décidé de trouver une solution durable et pragmatique pour le plus grand nombre. Nous explorons un nouveau concept dénommé « lotissement à équipement modéré » sur quatre sites différents. C’est une approche mixte entre l’autoconstruction et la promotion immobilière. Pour l’État, le mode opératoire consiste à se doter de réserves foncières à aménager. À lui d’apporter l’eau, l’électricité, les routes nécessaires, de réaliser les plateformes de soubassement mises ensuite à la disposition des souscripteurs pour qu’ils montent les murs de leur future maison, sur une superficie de 80 m2 à 102 m2. Ces modèles de maison n’ont rien à envier à ceux proposés par les promoteurs. La révolution ivoirienne est en marche en matière de logement. Et elle pourrait inspirer plus d’un pays en Afrique.
Avec Jeune Afrique