À Yamoussoukro, Mamadou Sangafowa Coulibaly, le ministre ivoirien de l’Agriculture, a annoncé que la production ivoirienne de noix de cajou en 2015 aurait dépassé celle de l’Inde. Mais ses chiffres sont déjà contestés.
En marge de la cérémonie de lancement de la nouvelle campagne cacao, à Yamoussoukro, Mamadou Sangafowa Coulibaly, le ministre ivoirien de l’Agriculture a annoncé que la production ivoirienne de noix de cajou avait atteint 700 000 tonnes en 2015, faisant de la Côte d’Ivoire « le premier producteur mondial d’anacarde » devant l’Inde.
Les chiffres avancés par Mamadou Sangafowa Coulibaly sont significativement supérieurs à ceux évoqués il y a quelques mois par les spécialistes du secteur qui indiquaient une récolte ivoirienne de 625 000 tonnes entre février et fin juillet. Du côté d’Abidjan, on indique que ces données n’étaient pas consolidées et ne tenaient pas compte des cargaisons alors en cours de livraison.
Guerre de chiffres
Contrairement à d’autres matières premières agricoles telles que le cacao ou le café, l’industrie de l’anacarde manque d’organes directeurs régulant le secteur à l’échelle mondiale. De fait, une guerre de chiffres entre pays exportateurs reste possible.
Selon les données avancées du côté des autorités ivoiriennes, la production de l’Inde n’aurait pas atteint 600 000 tonnes cette saison, notamment à cause de problèmes climatiques.
Des indications contredites par des analystes du marché de l’anacarde. Selon un spécialiste des marchés agricoles consulté par Jeune Afrique, la production indienne en 2015 tournerait autour de 760 000 tonnes, des chiffres supérieurs aux estimations ivoiriennes, mais inférieurs aux 800 000 tonnes évoquées par les autorités indiennes au cours des dernières semaines.
Exceptionnel
Tous les spécialistes s’accordent néanmoins sur la croissance exceptionnelle de la production ivoirienne d’anacarde au cours des dernières années, poussée par une nette progression des surfaces cultivées. Selon le rapport mondial Cashew Handbook 2014 [PDF], le pays a enregistré une forte croissance dans la production brute d’anacarde (16,84 % en moyenne par an entre 2001 et 2013).
Du côté des autorités ivoiriennes, on souligne surtout les effets positifs des « prix incitatifs » impulsés par le gouvernement, notamment un prix bord champ qui se négociait autour de 275 F CFA le kilo, mais qui a atteint parfois des niveaux de 650 F CFA « à cause de la forte concurrence stimulée par l’autorisation accordée aux exportateurs de disposer des entrepôts de stockage à l’intérieur du pays », confie àJeune Afrique une source gouvernementale.
« La commercialisation s’est structurée et la qualité s’est améliorée. Notre réforme a permis de répercuter la bonne tenue des cours mondiaux sur les producteurs ivoiriens et a tiré vers le haut les autres pays producteurs africains », a indiqué notre source.
Le chiffre d’affaires de la filière est passé de 200 milliards de F CFA en 2013 à 337 milliards de F CFA (514 millions d’euros) en 2015. Les producteurs ont vu leurs revenus augmenter de 68 % selon les autorités.
Transformation
Bémol de ce tableau : le faible taux de transformation locale. Contrairement à ses concurrents asiatiques l’Inde et le Vietnam qui usinent la totalité de leurs récoltes, la Côte d’Ivoire ne transforme que 7 % de sa production.
Dans le cadre du Projet d’appui au secteur agricole, les autorités ivoiriennes s’étaient fixées pour objectif d’atteindre un taux de transformation de 15 % à 35 % en 2016.
Avec JeuneAfrique