La Coupe du monde de football n’a pas attiré en Russie que des dizaines de milliers de supporters du monde entier: elle a aussi engrangé des milliards de dollars d’investissements.
L’entente avec l’Arabie saoudite dans le cadre de l’Opep+ a rapporté 4.000 milliards de roubles (55 milliards d’euros) aux caisses de l’État, tandis que l’Allemagne s’est dit prête à investir des dizaines de millions d’euros dans la localisation en Russie de la production de turbines à gaz et de trains Sapsan, ainsi que dans la construction de la ligne TGV Moscou-Kazan. Quels contrats ont été signés dans les coulisses de la Coupe du monde, et quel sera leur impact pour l’économie russe?
Arabie saoudite
Le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane al-Saoud fut l’un des premiers dignitaires étrangers à se rendre à Moscou. Début juin déjà, l’accord Opep+ et la coïncidence des positions des deux pays sur le développement du marché pétrolier mondial ont rapporté au budget russe 55 milliards d’euros. De plus, précise le Fonds russe des investissements directs, le montant des investissements de capitaux communs avec Riyad a atteint 2 milliards de dollars.
Le secteur pétrolier n’est pas le seul à être gagnant. Avant la clôture du Mondial, la Direction saoudienne des investissements a autorisé la compagnie russe Miratorg à ouvrir une représentation en Arabie Saoudite, ce qui lui permettra d’élargir significativement les fournitures de produits halal non seulement dans ce pays, mais également dans d’autres pays du monde musulman.
Iran
Les vice-ministres de l’Industrie et du Commerce russe Gueorgui Kalamanov et iranien Barat Ghobadian se sont rencontrés en marge de l’exposition industrielle internationale INNOPROM-2018 à Ekaterinbourg. Comme l’a noté Gueorgui Kalamanov, la Russie a livré à l’Iran des wagons de fret et des lots d’assemblage de wagons pour plus de 75 millions de dollars. En outre, les projets communs dans l’aviation civile et la construction automobile ont des perspectives.
Avant la fin du Mondial, Vladimir Poutine a rencontré le conseiller du dirigeant iranien Ali Akbar Velayati. Leur entretien a débouché sur un accord pour élargir la coopération dans la production pétrolière. En particulier, le Président russe s’est dit prêt à investir jusqu’à 50 milliards de dollars dans les projets iraniens.
Égypte
En juillet, Moscou a signé avec Le Caire un mémorandum sur l’organisation conjointe de l’Exposition mondiale et du forum Arabia 2019. Plus de 100 compagnies internationales sont attendues à cet événement, essentiellement du Moyen-Orient, d’Afrique centrale et du Nord.
Le 21 juin, le ministère des Transports a annoncé une bonne nouvelle pour les amateurs des récifs de corail de la mer Rouge: les négociations sur la reprise de la communication aérienne avec l’Égypte sont rouvertes.
Avant le début de la Coupe du monde, fin mai 2018, Moscou et Le Caire avaient signé un accord sur la mise en place d’une zone industrielle à l’est du Port Saïd pour une durée de 50 ans — qui sera prolongée automatiquement. Elle fera partie de la zone économique du canal de Suez.
Allemagne
Le portefeuille des projets communs de la Russie et de l’Allemagne s’est élargi. Dietrich Meller, patron de Siemens en Russie, s’est dit disposé à investir des dizaines de millions d’euros dans la localisation de près de 90% de la production de turbines à gaz. A l’heure actuelle, le niveau de localisation est d’environ 60%.
Les compagnies allemandes investiront des fonds dans la construction de la ligne TGV Moscou-Kazan. Coût total du projet: 1.600 milliards de roubles (22 milliards d’euros). Sachant que conjointement avec la Compagnie des chemins de fer russes (RZD), Siemens a l’intention d’ouvrir en Russie un centre d’ingénierie pour localiser la construction de trains Sapsan, que connaissent bien ceux qui voyagent souvent entre Moscou et Saint-Pétersbourg.
La société KUKA AG a fait part de son intention d’envoyer aux entreprises russes jusqu’à mille robots industriels. Le directeur de la compagnie, Stefan Lama, a souligné qu’en 2017 plus de 700 robots d’une valeur de près de 20 millions d’euros avaient été introduits dans la production à travers tout le pays.
Corée du Sud et Japon
Fin juin, le président sud-coréen Moon Jae-in s’est rendu à Moscou pour une visite officielle. Les deux dirigeants ont noté un bond significatif des échanges l’an dernier — de 27%, pour atteindre 19,2 milliards de dollars — et une hausse de 6,5% de janvier à avril 2018. Les investissements sud-coréens dans l’économie russe ont également augmenté jusqu’à 1,2 milliard de dollars.
Les présidents ont souligné les liens énergétiques solides entre la Russie et la Corée du Sud. Actuellement, les chantiers navals sud-coréens construisent 15 cargos pour transporter le gaz naturel liquéfié (GNL) de l’usine de Yamal. A terme, il est prévu de moderniser conjointement le port libre de Vladivostok, de mettre à jour technologiquement le chantier naval Zvezda, ainsi que d’aménager la Route maritime du Nord et le Transsibérien.
130 projets sont prévus avec le Japon, dont plus de la moitié sont en cours de mise en œuvre. Un accent particulier est mis sur le développement des technologies numériques: les deux pays sont orientés sur une numérisation de grande ampleur non seulement de l’industrie, mais également de la vie sociale. Au Japon, il s’agit de la conception d’une «Société 5.0» super-intelligente, et en Russie du programme gouvernemental «Économie numérique».
Pérou, Uruguay, Colombie
Pendant que les supporters russes se préparaient à soutenir leur équipe dans le match contre l’Égypte, le vice-président de la Chambre de commerce et d’industrie Vladimir Padalko, l’ambassadeur du Pérou Benjamin Chimoy et le directeur général de la Chambre de commerce de Lima José Rosas se rencontraient à Moscou. Ils ont remis à jour l’accord de coopération signé sous l’Union soviétique en 1980.
Les partenaires ont également décidé qu’il fallait sortir du cadre des relations commerciales traditionnelles au sein duquel la Russie vend au Pérou des engrais minéraux et des produits pétroliers, et le Pérou des produits agricoles à la Russie. José Rosas a noté que Lima avait besoin de produits pharmaceutiques et médicaux, de technologies de l’information et d’investissements dans l’industrie minière et la construction.
L’Uruguay, qui souhaite importer des céréales, de l’huile et de la viande, a également l’intention de renforcer le commerce. De son côté, la Russie est prête à ouvrir son marché aux fèves de soja uruguayennes, qui répondent aux normes de sécurité.
Une autre rencontre, celle du directeur du Service fédéral de surveillance vétérinaire et phytosanitaire (Rosselkhoznadzor) Sergueï Nadkvert avec l’ambassadeur de Colombie Alfonso Lopez Caballero, s’est tenue parallèlement à un match du Mondial. Et bien que la Colombie ait perdu face à l’Angleterre lors de la séance de tirs au but, les négociations sur les fournitures de céréales russes dans ce pays latino-américain se sont déroulées avec succès. L’ambassadeur colombien a noté que son pays était prêt à importer non seulement du blé, mais également du sarrasin (blé noir).
Avec sputnik