C’est un tournant diplomatique : l’Iran devrait être invité à participer à la conférence internationale sur le conflit syrien, prévue vendredi 30 octobre à Vienne, en Autriche. « Nous nous attendons à ce que l’Iran soit invité à participer », a indiqué le porte-parole du département d’Etat américain, John Kirby. Jusqu’ici, les Etats-Unis refusaient de négocier avec le principal soutien du régime de Damas. Selon un diplomate occidental, ce changement de cap a fait l’objet de négociations avec l’Arabie saoudite, puissance régionale rivale de l’Iran.
Selon un haut fonctionnaire de la région, cité par Reuters, la République islamique aurait déjà reçu des invitations de la part des Etats-Unis et de la Russie, et compterait être représentée à Vienne par le vice-ministre des affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian. La présence du chef de la diplomatie, Mohammad Javad Zarif, serait aussi en discussion.
Aide massive à Damas
Alors que Riyad soutient des groupes rebelles opposés au régime de Bachar Al-Assad, Téhéran apporte une aide financière et militaire massive à Damas. Des membres des gardiens de la révolution, l’unité d’élite de l’armée de la République islamique, y dirigent des miliciens chiites venus du Liban (Hezbollah), d’Irak, d’Afghanistan, qui ont graduellement remplacé les forces régulières sur de nombreux terrains.
Elles mènent depuis plusieurs semaines des offensives terrestres coordonnées avec l’aviation russe dans la banlieue de Damas, autour de la ville d’Alep et dans la région de Lattaquié. Téhéran a par ailleurs annoncé la mort d’une quinzaine d’Iraniens en Syrie depuis le début de cette offensive, une communication officielle inédite.
L’invitation faite à l’Iran s’inscrit dans la suite de l’intervention militaire russe, lancée le 30 septembre alors que l’Iran ne paraissait plus capable d’empêcher le recul du régime syrien sur presque tous les fronts militaires. Ces reculs avaient fait envisager sa chute à brève échéance.
Effort diplomatique
Elle s’inscrit également dans un effort diplomatique russe intense, qui a préparé depuis l’été l’intervention militaire. Moscou affirme lutter contre le « terrorisme » de l’Etat islamique, en limitant pourtant ses frappes contre ce groupe, et reconnaît soutenir son allié syrien afin d’empêcher son renversement par les rebelles.
Ce nouvel activisme a surpris les Etats-Unis, qui soutiennent certains groupes rebelles de façon limitée, et qui montrent désormais des signes d’ouverture. Mardi, le chef de l’agence américaine du renseignement, John Brennan, s’est ainsi dit convaincu que les Russes chercheraient à terme à obtenir le départ du président Bachar Al-Assad, point qui constituait jusqu’à l’été un prérequis américain à toute négociation.
« Paradoxalement, ils pensaient qu’ils devaient d’abord renforcer Assad, avant qu’il ne puisse être retiré », a-t-il expliqué lors d’une conférence sur le renseignement à Washington. « La question est à quel moment et comment ils vont être capables de l’amener à sortir de la scène ». Le secrétaire d’Etat John Kerry avait déjà participé à une première rencontre la semaine dernière à Vienne entre les Etats-Unis, la Russie, l’Arabie saoudite et la Turquie.
avec lemonde