Acquérir certains types de bactéries avant l’âge de trois mois protègerait à vie contre l’asthme, affirment des chercheurs.
Les nouveaux-nés pourraient être protégés à vie contre l’asthme si leur flore intestinale acquiert certains types de bactéries avant trois mois, ont déterminé des chercheurs, ouvrant la voie à un traitement préventif contre cette allergie respiratoire chronique en forte augmentation. L’asthme, qui a quadruplé dans la population depuis les années 1950, affecte jusqu’à 20 % des enfants dans les pays occidentaux, soulignent les scientifiques dans la revue Science Translational Medicine. “Cette étude montre que quatre types de bactéries intestinales jouent un rôle dans la prévention de l’asthme mais seulement très tôt dans la vie, au moment de la formation du système immunitaire du nouveau-né”, précise Brett Finlay, professeur de microbiologie à l’université de Colombie-Britannique au Canada et l’un un des principaux auteurs de cette étude.
Vers un test pour identifier les enfants les plus à risque ?
Cette découverte ouvre la voie à la mise au point de traitements probiotiques préventifs pour les nouveaux-nés pouvant les prémunir contre l’asthme, estiment les chercheurs. Elle pourrait également permettre de concevoir des tests pour prédire chez les jeunes enfants ceux qui ont le plus de risques de souffrir d’asthme. Pour leurs recherches, les scientifiques ont analysé des prélèvements de matière fécale de 319 enfants. Les analyses de ces échantillons ont révélé une déficience de quatre types de bactéries intestinales chez des enfants de trois mois qui ont plus tard présenté de plus grands risques de souffrir d’asthme. La majorité des nourrissons acquièrent naturellement ces quatre souches de bactéries (Faecalibacterium,Lachnospira, Veillonella et Rothia) mais on ignore encore pourquoi d’autres ne le font pas. Les chercheurs ont en revanche constaté moins de différences dans le taux de ces bactéries dans la flore intestinale chez les enfants âgés d’un an, ce qui indique que les trois premiers mois de la vie sont critiques pour le développement du système immunitaire. Les chercheurs ont pu confirmer ces observations avec des expériences sur des souris, découvrant que les rongeurs à qui ces quatre types de bactéries avaient été inoculées à la naissance avaient des symptômes nettement moins sévères d’asthme.
Notre environnement est excessivement propre, détruisant des agents bactériens utiles”
“Cette découverte pourrait nous donner de nouveaux moyens de prévenir cette maladie potentiellement mortelle pour un grand nombre d’enfants”, estime le Dr. Stuart Turvey, un pédiatre spécialiste en immunologie à l’hôpital des enfants de Vancouver (Canada). “Elle montre qu’il y a une fenêtre de peut-être cent jours après la naissance pour une intervention thérapeutique permettant de protéger les nouveau-nés contre l’asthme”, poursuit-il. Des recherches plus étendues sont nécessaires pour confirmer cette découverte et mieux comprendre comment ces bactéries agissent sur le mécanisme de développement de l’asthme, précise le pédiatre. Une étude est déjà en cours en Équateur. “Ces bactéries intestinales produisent des métabolites, des substances chimiques qui sont apparemment très importantes pour former le système immunitaires dans les deux ou trois premiers mois de la vie”, explique-t-il à l’AFP. “Le rôle des bactéries intestinales pour lutter contre les allergies a déjà été mis en lumière par de précédentes recherches”, rappelle-t-il.
Une étude publiée aux États-Unis fin 2014 a ainsi révélé que certaines bactéries intestinales protégeaient des souris contre des allergies alimentaires, notamment aux cacahuètes, dont les causes restent inconnues.“Ces travaux confortent l’hypothèse selon laquelle notre environnement est excessivement propre” détruisant des agents bactériens utiles, souligne le Dr Turvey, citant une étude menée en Allemagne qui a décelé un moindre risque d’asthme chez les enfants élevés dans une ferme. Confortant cette hypothèse, il note que les nourrissons traités avec beaucoup d’antibiotiques au cours de leur première année de vie sont aussi plus sujets à l’asthme, comme ceux qui naissent par césarienne, ces derniers n’étant pas exposés aux mêmes bactéries que ceux venant au monde par le conduit vaginal. Le corps humain compte des millions de milliards de bactéries qui jouent un rôle essentiel pour la santé, soulignent les chercheurs. Il y a dix fois plus de cellules de bactéries que de cellules humaines dans notre organisme.
Avec ScienceetAvenir