Au lendemain de la présidentielle du 25 octobre en Côte d’Ivoire, qui a reconduit le président Alassane Ouattara pour un second mandat, le gouvernement s’est remis au travail. Et il y en a, même si le contexteéconomique est favorable : depuis 2012, le pays connaît un rythme moyen de croissance de son produit intérieur brut supérieur à 8 % par an. Le pays demeure le principal producteur mondial de cacao et, au-delà des bonnes performances de la production cacaoyère, ce sont l’ensemble des secteurs productifs qui sont dynamiques. Cette situation permet à la Côte d’Ivoire d’entamer un processus de rattrapage économique, mais il n’en demeure pas moins que trois principaux défis seront à relever par les autorités afin d’assurer la pérennité de cette croissance.
Rattrapage économique
Le premier défi consiste à rendre la croissance économique suffisamment inclusive pour qu’elle bénéficie à l’ensemble de la population et permette la réduction de la pauvreté. En effet, les indicateurs sociaux ont faiblement progressé au cours de la décennie 2000 et se trouvent actuellement à un niveau inférieur à la moyenne observée en Afriquesubsaharienne. Selon l’indice de développement humain (IDH) du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), calculé à partir d’indicateurs mesurant le niveau d’éducation, de santé et de revenus, la Côte d’Ivoire ne se situe qu’au 171e rang sur 187 pays. Des efforts accrus d’investissement public en matière d’éducation et de santé apparaissent ainsi nécessaires pour garantir le partage des fruits de la croissance et améliorer les conditions de vie de la population. De plus, dans ce pays de 23 millions d’habitants, l’importance de la population jeune (plus de 75 % de la population a moins de 35 ans) introduit le défi d’une création d’emplois suffisante et de la mise en place de formations de qualité adaptées aux besoins du marché du travail.
Le second défi est celui de l’investissement, qui doit croître encore davantage. L’investissement au sein de l’économie ivoirienne, de l’ordre de 17 % du PIB en 2014, s’inscrit en nette progression mais reste faible en comparaison des autres pays de la région. Les réformes mises en place pour faciliter la création d’entreprises posent notamment des conditions favorables à l’augmentation des investissements. D’après le classement Doing Business, établi par la Banque mondiale, qui évalue le degré de facilité à faire des affaires dans les différents pays du monde, la Côte d’Ivoire a progressé, entre 2012 et 2015, de la 177e à la 147e place mondiale et a figuré, deux années de suite, dans le classement des dix économies ayant connu la plus forte amélioration de leur climat d’affaires. Le secteur bancaire peut également jouer un rôle clé en apportant des financements aux investissements productifs du secteur privé. Actuellement, il ne finance encore qu’insuffisamment l’économie puisque les crédits aux entreprises ne représentent que 18 % du PIB, contre un taux moyen en Afrique subsaharienne de 30 % du PIB.
Maîtriser la dette
Enfin, le troisième défi de taille consiste à préserver les équilibres macroéconomiques. Les annulations de dette consenties en 2012 à la Côte d’Ivoire dans le cadre de l’initiative Pays pauvre très endetté (PPTE) ont mécaniquement engendré une baisse conséquente de son endettement qui est passé de plus de 70 % du PIB en 2011 à 37 % fin 2014. Cette annulation de dette a procuré de nouvelles marges de manœuvre pour le financement du programme de relance économique. La Côte d’Ivoire a ainsi réussi son retour sur les marchés obligataires internationaux en émettant en 2014 et en 2015 deux eurobonds de respectivement 750 millions de dollars (693 millions d’euros) sur dix ans et 1 milliard de dollars sur douze ans à des taux inférieurs à ceux obtenus par d’autres pays d’Afrique subsaharienne. Cependant, afin de garantir la soutenabilité de la dette publique, le rythme de réendettement doit rester maîtrisé. De plus, il est nécessaire de cibler les investissements publics vers les postes de dépenses les plus favorables à une croissance inclusive de long terme.
Source: lemonde.fr