Le Sénégal est un pays qui était très en avance sur le plan des libertés individuelles et collectives. En un mot, un pays démocratique où la liberté d’expression était devenue une réalité palpable. C’est d’ailleurs ce qui a toujours fait le charme de notre pays et largement contribué à sa stabilité politique et sociale. En matière de libertés, le rayonnement était tel que pour organiser une marche de protestation, il suffisait d’un simple avis adressé à l’autorité administrative car le droit de marche est inscrit dans la charte fondamentale. Mais hélas, depuis 2010, l’interdiction des marches et autres manifestations de protestation, est devenue la règle avec s’il vous plait, une répression policière et des arrestations en masse. Ce fut le cas lors des manifestations pré-électorales de 2012 où le ministre de l’Intérieur de l’époque, Ousmane Ngom interdisait systématiquement les manifs de l’opposition exacerbant du coup la furie des opposants et des populations. Et aujourd’hui encore la même situation s’est répliquée et il y a dans les prisons près d’une dizaine de détenus. Des femmes et des hommes embastillés pour des délits d’opinion parce que tout simplement s’opposant au régime en place. Me Amadou Sall, Toussaint Manga, Victor Ciss, Karim Wade, Aminata Nguirane Thiam, Bathie Seras, Cheikh Ahmadou Bamba Ba, Aida Diongue tous militants du Parti démocratique sénégalais (Pds) sont détenus en prison pour des accusations qui, à y regarder de près, n’en valaient vraiment pas la peine. Détenus pour la plupart pour des flagrants délits liés à leurs opinions ou actions politiques, ils tardent à être jugés et sont retenus dans les liens de la prévention. Même Aida Diongue qui a été relaxée tout dernièrement par le Tribunal correctionnel de Dakar après 18 mois de détention, s’est retrouvée une semaine après sa libération sous contrôle judiciaire. Contrainte par la Cour de répression de l’enrichissement illicite à rester à la disposition de la justice. Pour ce qui est du cas de l’avocat El Hadj Amadou Sall, son incarcération est plus qu’aberrante car arrêté pour des propos tenus au cours d’un meeting politique à la veille du délibéré du procès de Karim Wade. Il demandait aux militants de son parti de rester mobilisés et de faire face au cas où Karim serait condamné. De surcroît, son statut d’ancien Garde des Sceaux ministre de la Justice, devait refroidir les ardeurs de cette machine qu’il a eu à piloter et qui veut le broyer aujourd’hui. Les jeunes de l’Ujtl (Toussaint Manga, Victor Ciss et Khadim Ba ) et les pro Karim ( Amina Nguirane et Bathie Seras) doivent être jugés et fixés sur leur sort. Leur longue détention ne renvoyant guère une image positive de l’application de la justice dans notre pays et l’Union des magistrats du Sénégal est interpelée sur ce point car cette tache noire qui balafre la face de Dame justice ne saurait prospérer. Le cas de Karim Wade est encore plus complexe si on l’analyse sous le prisme des débats hautement politiques qu’il a suscités notamment autour de la légitimité de la Crei et « l’intrusion » d’abord de la Haute Cour de justice de la Cedeao et puis récemment du Groupe de Travail de l’Onu sur les détentions arbitraires, dans ce dossier. Aujourd’hui, nous devons à la vérité de dire que le Sénégal vit une situation judiciaire très gênante qui indispose aussi bien les acteurs de la justice que les citoyens lambda. On serait tenté de dire qu’une dictature rampante s’installe peu à peu au Sénégal avec le silence complice d’une grande majorité des associations de défense des droits de l’homme et des partis politiques traditionnels (surtout de gauche) qui durant toute leur existence, n’ont eu de cesse de défendre l’injustice et les dérives autoritaires. Mais croyaient-ils véritablement à ces combats ? Ou ont-ils entre temps tourné le dos aux principes démocratiques pour les beaux yeux du Prince ? Jacques Habib Sy, Amath Dansokho, Landing Savané, Tanor Dieng, Abdoulaye Bathily pour ne citer que ceux là, sont devenus méconnaissables. La défense des libertés et des principes démocratiques, ce n’est plus leur tasse de thé. Ils se précipitent au portillon du pouvoir et il ne serait pas excessif de dire qu’ils volent la vedette aux courtisans du Roi.
PME PMI MAGAZINE avec senego