Pour renforcer l’efficacité du vaccin contre la tuberculose, une équipe de chercheurs canadiens vient d’effectuer des travaux en vue d’une meilleure protection des individus contre la tuberculose pulmonaire.
Publiés dans la revue scientifique Cell, ces travaux reposent essentiellement sur une nouvelle forme d’administration du BCG[1], le vaccin antituberculeux, faisant en sorte qu’il agisse sur la moelle osseuse.
“Nous avons montré pour la première fois que lorsque le BCG est administré à des souris d’une manière qui permet l’accès à la moelle osseuse, il peut reprogrammer les cellules souches pour générer une immunité innée renforcée contre l’infection tuberculeuse”, explique Maziar Divangahi, immunologue pulmonaire et spécialiste de l’immunité antituberculeuse à l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR CUSM) au Canada.
“Nous avons maintenant découvert une manière innovante de combattre cette infection en reprogrammant les cellules souches et en formant des cellules immunitaires innées pour tuer plus efficacement Mycobacterium tuberculosis”
Maziar Divangahi
Immunologue pulmonaire, IR CUSM, Canada
Selon les explications de ce chercheur qui est l’un des auteurs de ces travaux, l’accès du vaccin à la moelle osseuse passe par une injection intraveineuse à la place de la voie intradermique qui est appliquée jusqu’ici.
Sous cette forme intradermique, “le BCG est actuellement un vaccin efficace contre la tuberculose dans l’enfance. Chez les enfants, la tuberculose se manifeste surtout sous une forme menant à la méningite tuberculoïde. Cependant, la principale manifestation de la maladie est la tuberculose pulmonaire chez l’adulte et le BCG n’a aucune efficacité contre elle”, martèle Maziar Divangahi.
Bruno Tengang, médecin-chef du Centre des maladies respiratoires (CMR) de Douala au Cameroun, confirme : “la tuberculose pulmonaire est un grave problème de santé publique sous nos latitudes, une maladie probablement sous-estimée, voire sous-diagnostiquée”.
A en croire ce pneumologue, le principal souci relatif à cette maladie est l’observance du traitement. “Malheureusement, dit-il, certains malades ne prennent pas toujours leurs médicaments. Et le fait de ne pas prendre ses médicaments, de ne pas les prendre suivant les doses prescrites ou de ne pas les prendre aux heures indiquées, contribue à sélectionner des souches résistantes et à rendre le bacille non sensible aux médicaments”.
Tuberculose multirésistante
En effet, relève l’Organisation mondiale de la santé (OMS) dans un aide-mémoire sur la tuberculose, publié en janvier 2018, “la tuberculose multirésistante demeure une crise de santé publique et une menace pour la sécurité sanitaire”.
L’Organisation “estime à 600 000 le nombre de nouveaux cas présentant une résistance à la rifampicine – le médicament de première intention le plus efficace – dont 490 000 sont des cas de tuberculose multirésistante”.
Mais, rassure Maziar Divangahi, “nous avons maintenant découvert une manière innovantede combattre cette infection en reprogrammant les cellules souches et en formant des cellules immunitaires innées pour tuer plus efficacement Mycobacterium tuberculosis“.
Encore appelé bacille de Koch, il s’agit de la bactérie responsable de la transmission de la tuberculose. “Elle se transmet par voie aérienne. Il suffit que je parle en face de vous, si je suis atteint de la tuberculose vous risquez d’attraper les bacilles qui sortent de ma bouche”, précise Bruno Tengang.
Essais sur les humains
Avec ces travaux, “l’accès du BCG dans la moelle osseuse reprogramme les cellules souches pour générer des cellules immunitaires innées qui peuvent tuer les bactéries tôt lors de l’infection des poumons et fournir ainsi une protection contre la tuberculose pulmonaire”, explique Maziar Divangahi.
Pour cela, il faut encore que des essais soient effectués sur des humains; mais les chercheurs sont optimistes. Car, lors de l’étude, “quel que soit ce que nous avons fait, le BCG a conduit les cellules souches à générer une immunité innée protectrice”, disent-ils. Rappelant au passage que “il existe également des études montrant que les primates non humains vaccinés au BCG par voie intraveineuse étaient mieux protégés contre la tuberculose”.
Quant à Bruno Tengang, il caresse l’espoir de voir le BCG devenir “meilleur que ce qu’il est, pour empêcher complètement le vrai microbe d’entrer dans l’organisme”.
Avec scidev