show est relancé ! Souvent critiqué pour ses avantages supposés, le régime d’indemnisation des intermittents du spectacle se retrouve une fois encore sur le devant de la scène, dans le cadre des négociations sur la future nouvelle convention d’assurance chômage. Les partenaires sociaux discutent en effet d’une évolution des règles, ce qui n’a pas manqué de faire réagir les intéressés de manière spectaculaire : plusieurs dizaines d’intermittents occupent depuis dimanche soir le théâtre de l’Odéon, au coeur de Paris, pour montrer leur opposition. Mais pourquoi un tel ramdam ? Retour sur le fonctionnement de ce dispositif dérogatoire, en 4 questions-réponses.
> Combien compte-on d’intermittents indemnisés ?
Ils étaient 87.040 au 31 décembre 2011, lors dudernier décompte effectué par l’Unédic,l’organisme chargé de gérer l’assurance chômage. Soit 3,6% des 2,4 millions de chômeurs indemnisés recensés à l’époque. Une petite majorité d’entre eux (54%) sont des ouvriers et techniciens tandis que le reste est composé d’artistes. Parmi leur spécificité par rapport aux autres demandeurs d’emploi : plus des deux tiers (68,6%) sont des hommes, contre la moitié pour l’ensemble des chômeurs indemnisés, et 52,8% ont réalisé des études supérieures contre 24,1% de la totalité des allocataires.
> Leurs conditions d’indemnisation sont-elles plus avantageuses que celles des autres chômeurs ?
Oui. “Pour un chômeur classique, le principe d’un jour cotisé pour un jour indemnisé s’applique. Par exemple, une personne ayant travaillé 4 mois au cours des 28 derniers n’aura droit qu’à 4 mois de chômage. Pour les intermittents, en revanche, il suffit d’avoir travaillé au moins 507 heures, soit un peu plus de 3 mois, sur une période de 10 mois et demi (pour les artistes) ou de 10 mois (pour les techniciens), pour être indemnisé pendant 243 jours, l’équivalent de 8 mois ! De plus, la formule de calcul de l’allocation chômage est elle aussi plus avantageuse que dans le régime général, ce qui aboutit à une indemnité supérieure à salaire équivalent”, explique Bertrand Martinot, économiste auteur de “Pour en finir avec le chômage”.
> Cela représente-t-il un coût pour l’assurance chômage ?
En 2011, le seul régime d’indemnisation chômage des intermittents a accusé un déficit de 1 milliard d’euros, le montant des allocations versées étant plus de 5 fois supérieur aux cotisations. Un trou conséquent, donc, sachant que la perte totale de l’assurance chômage a été de 1,5 milliard d’euros (hors éléments exceptionnels) cette même année,selon un rapport de la Cour des comptes.Sans oublier que les intermittents représentent moins de 4% des chômeurs… Reste que la situation financière problématique de l’assurance chômage est aussi (et surtout) liée aux CDD, dont le régime accusait un déficit de 5,6 milliards d’euros en 2011 (ces pertes étant compensées notamment par les excédents du régime d’indemnisation des CDI).
> Pourquoi un tel régime dérogatoire pour les intermittents ?
Historiquement, ce système spécifique est justifié par la nécessité de tenir compte de la nature irrégulière de l’activité des intermittents du spectacle. “Tous doivent être prêts, à tout moment, à accomplir le travail requis, mais aussi à faire face à l’éventualité d’un terme rapproché de leur contrat de travail, à adapter leur activité au temps, forcément incertain, de la création, ou encore à rechercher des lieux de diffusion. Ces contraintes, bien réelles, sont le quotidien des intermittents du spectacle et elles sont trop souvent passées sous silence au nom de « l’engagement » ou de la « vocation » des professionnels du spectacle”, notait ainsi un rapport parlementaire sur le sujet en 2013.
Il n’empêche : ces règles favorables incitent certains employeurs à abuser du système, en embauchant par exemple des intermittents de façon quasi permanente et en se servant des allocations chômage comme complément de rémunération. Une pratique baptisée “permittence”, qui concernait 14% des intermittents inscrits à Pôle emploi en 2005, d’après la Cour des comptes. Ce qui incite certains à prôner que ce régime soit aligné, ou tout du moins rapproché le plus possible sur le régime général. Qui gagnera ce bras de fer ? Réponse dans les semaines à venir…
avec capital