La guerre commerciale qui couve entre les États-Unis et la Chine préoccupe les pays membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), soucieux des perspectives de leur croissance économique sur fond de protectionnisme américain grandissant. Sputnik s’en est entretenu avec des spécialistes russe et chinois.
Le système de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), qui est censé être ouvert, multilatéral et réglementé et qui a constitué la base de la croissance économique des pays de l’ASEAN, subit à présent de puissantes pressions, a indiqué à Sputnik Andreï Karneïev, directeur adjoint de l’Institut des pays d’Asie et d’Afrique de l’Université d’État Lomonossov de Moscou.
«Pour bien des pays membres de l’ASEAN, la Chine et les États-Unis sont les plus importants partenaires commerciaux, et il est tout à fait naturel qu’ils craignent d’être impliqués dans une guerre commerciale entre Pékin et Washington», a déclaré l’interlocuteur de l’agence.
Selon ce dernier, si une guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis éclate pour de bon, il s’agira d’une désorganisation générale du système du commerce mondial, ainsi que du commencement d’un jeu sans règles.
Et de rappeler que ce n’était pas un hasard si, lors du sommet de l’ASEAN, ses membres avaient diffusé une déclaration sur leur profonde préoccupation d’une vague grandissante de protectionnisme et d’antimondialisation.
Un autre interlocuteur de Sputnik, Xu Feibiao, du Centre d’étude de l’économie mondiale de l’Institut chinois des relations internationales contemporaines, a reconnu pour sa part que, pour le moment, les positions de Pékin et de Washington paraissaient plutôt intransigeantes, mais qu’il restait encore l’espoir d’une recherche d’un compromis.
«À l’heure qu’il est, les États-Unis entendent envoyer une délégation en Chine, ce qui montre leur intention de négocier. Si les deux parties ne se font pas de concessions mutuelles, elles seront perdantes toutes les deux, ce qui n’est voulu par personne», a expliqué M.Xu.
Et de prévenir que ces négociations ne seraient évidemment ni faciles ni simples.
«À notre époque, alors que les chaînes de production dans le monde deviennent de plus en plus étroitement liées, les problèmes qui surgissent dans le commerce sino-américain n’affectent pas uniquement la Chine et l’Amérique, mais aussi la Corée du Sud, le Japon, Singapour et les autres pays membres de l’ASEAN», a résumé l’analyste.
Intervenant lors du sommet de l’ASEAN à Singapour, le Premier ministre de ce pays, Lee Hsien Loong, a souligné que les actuelles «tensions commerciales» entre la Chine et les États-Unis pourraient facilement aboutir à des frictions plus sérieuses qui affecteraient la stabilité et la sécurité du monde.
Dans ces circonstances, M.Lee a insisté sur la nécessité d’établir une coopération des pays de l’ASEAN avec la Chine et l’Inde pour s’opposer ensemble au protectionnisme afin d’assurer l’ultérieure croissance de leurs économies.
L’ASEAN est un groupe régional qui encourage la coopération économique, politique et sécuritaire entre ses 10 membres, à savoir le Brunei, le Cambodge, l’Indonésie, le Laos, la Malaisie, le Myanmar, les Philippines, Singapour, la Thaïlande et le Vietnam. Son 32e sommet s’est déroulé du 25 au 28 avril à Singapour.
Avec sputnik