L’oncle Sam a infligé à la Chine de nouvelles sanctions. Un bras de fer qui pourrait bien déboucher sur une guerre commerciale ouverte, avec un lourd impact à la clé sur la croissance !
Donald Trump a encore frappé. Les Etats-Unis ont annoncé vendredi de nouvelles sanctions contre la Chine qui promet à son tour des représailles : la croissance mondiale, qui a résisté pour l’instant aux tensions commerciales, pourrait faire les frais d’une escalade. Washington va imposer de nouveaux tarifs douaniers, de 25%, sur 50 milliards de dollars d’importations chinoises “contenant des technologies très importantes sur le plan industriel”, a indiqué le président Donald Trump dans un communiqué.
Au cours des derniers mois, les indicateurs avancés ont révélé les inquiétudes. Le moral des investisseurs allemands, tel que mesuré par l’institut ZEW, a par exemple nettement flanché en juin pour retomber à son plus bas niveau depuis 5 ans. Le directeur de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Roberto Azevedo, a confirmé ces premiers signes d’inquiétude : “il y a une réticence à investir et on le voit aussi dans le comportement d’achat des entreprises”, a-t-il affirmé cette semaine au quotidien allemand Handelsblatt. Adam Slater, économiste chez Oxford Economics, a toutefois minimisé cet impact sur la croissance… pour l’instant. “Le ralentissement observé dans les chiffres sur le commerce n’a probablement pas de lien direct avec ces mesures protectionnistes”, a-t-il expliqué.
Il s’est toutefois empressé de prévenir qu’une “escalade” pourrait “renforcer le ralentissement”, comme l’avait déjà dit l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) fin mai, quand elle avait appelé les pays à éviter une guerre commerciale pour ne pas plomber une reprise qui a enfin atteint son niveau d’avant-crise. Ces risques interviennent alors que l’économie mondiale commence à subir le rebond des prix du pétrole et surtout la hausse des taux américains, qui complique la situation de pays émergents comme la Turquie et l’Argentine, incapables d’enrayer la chute de leur devise.
Une escalade entre les Etats-Unis et la Chine ne ferait qu’empirer la situation: “si cela dégénérait en guerre commerciale, cela pourrait avoir un impact beaucoup plus préoccupant”, a prévenu Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne, sur Europe 1. En attendant, “c’est tout le fonctionnement de l’économie mondiale qui est à revoir et une Europe qui se retrouve un peu seule dans le jeu mondial”, a-t-il commenté. Une guerre commerciale ouverte, avec un Donald Trump mettant à exécution sa menace de taxer les importations de voitures par exemple, tomberait à un mauvais moment pour l’économie européenne, qui commence à s’essouffler après avoir renoué avec une forte croissance l’an dernier.
Le président de la BCE, Mario Draghi, a revu jeudi à la baisse sa prévision de croissance en zone euro cette année à 2,1%, contre 2,4% auparavant, mais en refusant d’attribuer ce ralentissement à M. Trump. “Les conséquences directes ont été limitées jusqu’à présent”, a-t-il souligné. En Allemagne, la plupart des indicateurs – exportations, moral des investisseurs, production et commandes industrielles – se sont nettement détériorés depuis le début de l’année. La Bundesbank a d’ailleurs abaissé fortement ses prévisions vendredi et ne table plus que sur 2% de croissance cette année, contre 2,5%. Aux Etats-Unis, où l’économie carbure à pleine régime, les menaces de M. Trump inquiètent aussi : le livre beige de la banque centrale américaine (Fed), rendu public fin mai, s’est fait l’écho “d’incertitudes au sein des entreprises aux Etats-Unis”. Son président, Jerome Powell, a certes reconnu jeudi que “les préoccupations augmentaient à propos des changements de politique commerciale” mais il aussitôt rappelé que l’économie américaine se portait au mieux en ce moment.
En Chine, paradoxalement, les tensions commerciales ont eu jusqu’ici un effet dopant pour l’activité. L’activité manufacturière a accéléré en mai de façon inattendue, à son rythme le plus rapide depuis huit mois, et les exportations chinoises ont grimpé de 12,6% sur un an en mai, avec un bond de 11,6% vers les seuls Etats-Unis. “Cela peut simplement signifier que des exportateurs ont avancé l’envoi de leur produits” pour éviter des ruptures d’approvisionnements ou des barrières douanières en cas d’intensification des tensions commerciales, observait le mois dernier Betty Wang, une analyste d’ANZ.
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