Brillant économiste, homme de foi, Gaël Giraud est depuis 2015 le chef économiste de l’Agence française de développement. Partisan d’un capitalisme écologique et humain, contempteur de la financiarisation des économies, il est l’invité de l’économie RFI-Jeune Afrique de ce 2 décembre 2017.
• Politique africaine de la France
« Le président Macron a voulu dire que la France tourne délibérément la page de la Françafrique, celle des relations occultes entre certains cabinets et les dictatures africaines. L’engagement de déclassifier les documents relatifs à l’assassinat de Sankara en est la preuve. Il s’agit d’avoir des relations normalisées et transparentes avec les chefs d’État africains. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de stratégie globale de la France vis-à-vis du monde. L’Afrique est évidemment un partenaire privilégié, ne serait-ce que parce qu’elle va compter 500 millions de francophones. »
• Mutations
« L’AFD veut être plus partenariale. Dans l’Alliance pour le Sahel, nous travaillons avec la KfW [Établissement de crédit pour la reconstruction, institution allemande, NDLR], avec la Banque mondiale, la BAD, l’UE. Il faut que nous arrivions à agréger les différentes sources d’aides publiques au développement. L’autre aspect, c’est de travailler davantage avec toutes les parties prenantes des projets, dont les populations villageoises, réunir tout le monde autour de la table. Notre ambition est que la moitié de ses encours ne soit pas liés aux États mais aille aux collectivités locales, au privé, aux ONG. »
• Spéculations
« Les cours des matières premières, que ce soit dans le pétrole, les mines ou l’agriculture, ne sont plus déterminés majoritairement par l’offre et la demande réelle, mais par les mouvements financiers spéculatifs. Les pays africains n’y peuvent rien et sont totalement dépendants de ces mouvements erratiques. La communauté internationale doit s’interroger sur la manière de réguler les cours des matières premières. »
• Croissance
« Le PIB est un très mauvais indicateur, et la croissance du PIB n’est pas le bon thermomètre. Il a été construit en Europe dans les années 1930 pour mesurer l’aptitude des pays à faire la guerre. L’une des alternatives possibles est l’indicateur de développement humain (IDH), qui compte grosso modo trois piliers : le revenu par habitant, l’espérance de vie à la naissance, le niveau éducatif. En revanche, si nous changeons d’indicateurs, il faut que tous les pays le fassent en même temps, car nous avons besoin de pouvoir effectuer des comparaisons. »
Éco d’ici, éco d’ailleurs, le premier samedi de chaque mois sur RFI à 12 h 10 heure de Paris, 10 h 10 TU.