Au lendemain de l’attaque des trois acolytes habituels du chaos mondial contre la Syrie, les Syriens pansent leurs plaies, comme ils le font tous les jours pour d’autres attaques qu’ils subissent depuis 2011. A la différence des autres agressions quotidiennes, celle-ci était attendue, planifiée, et même chorégraphiée si l’on peut dire, la Syrie bénéficiant de toutes les informations via la Russie. Ce n’était, ni plus ni moins, qu’une mise en scène théâtrale qui laisse cependant planer quelques questions, notamment celles de savoir qui sont les orchestrateurs de cette mise en scène, et à qui était destiné le spectacle.
Peu avant les attaques, pendant que le monde retenait son souffle, les deux grandes puissances (Etats-Unis et Russie) se trouvaient emportées dans une situation dans laquelle la moindre fausse manœuvre pouvait les entrainer dans une confrontation qu’aune d’elle ne souhaitait. D’intenses communications ont eu lieu entre les militaires russes et américains via les canaux de communications qui avaient été mis en place et qui étaient restés ouverts. Pour le coup, on peut penser que la chorégraphie a été mise en place avec la participation des Russes dans un esprit de désamorçage. Dans la configuration actuelle du triumvirat agresseur, on peut penser également que celui qui fait le plus d’esbrouffe, Donald Trump, est celui qui est le moins motivé pour réellement agir. Si Macron peut se contenter d’une action d’éclat, pour le prestige ou juste pour remplir le rôle qui lui a été assigné, il est peu probable que May et ses sponsors soient dans les mêmes dispositions. Il semble qu’elle voulait vraiment que les choses aillent plus loin. Trump aurait donc pu avoir dupé ses acolytes.
Si duperie il y a, le spectacle offert par l’action concertée entre les Etats-Unis, la Grande Bretagne et la France devrait être destiné en premier lieu à l’Etat Profond, ses médias et la masse de tous ceux qui sont fidèles à la narrative d’un monde unipolaire dans lequel ils se placent tout en haut. Même si les résultats peuvent ne pas entièrement convaincre les élites de l’Etat Profond, cela aura néanmoins pour conséquences de faire descendre la pression et de temporiser en attendant que l’actualité passe à autre chose. C’est une manière de fermer le dossier des soi-disant attaques au gaz chimique et de tourner la page sur cette histoire.
La seconde cible à laquelle était destinée le spectacle de l’attaque contre la Syrie est composée principalement de va-t’en guerre, de tous les va-t’en guerre, qu’ils soient pro-atlantistes ou non. On ne présente plus les pro-atlantistes qui sont généralement ceux qui sont persuadés d’être les défenseurs de la morale universelle et de détenir le droit et le devoir civilisationnel de punir le mal (selon leur définition) où qu’il se trouve. Ce sont eux qui alimentent, sans qu’ils soient nécessairement belliqueux, la vaste meute des suiveurs des appels à se battre, pour peu que la cause qu’on leur présente soit acceptable.
A l’inverse, les va-t’en guerre non pro-atlantistes donnent une impression de pacifisme, et, parfois, aspirent vraiment à une paix durable. Mais, avant cette paix, ils aimeraient bien que l’OTAN, ou quelques-uns de ses membres (les Etats-Unis en particulier), reçoivent la raclée qu’ils méritent, oubliant que, étant donné l’arsenal militaire dont ils disposent, ni l’OTAN, ni aucun de ses membres ne peut recevoir de raclée sans guerre majeure, pour ne pas dire mondiale. L’attaque injuste et mesquine menée contre la Syrie ne peut que susciter l’indignation, la révolte et le dégoût chez toute personne éprise de justice, d’autant plus qu’il est plus que probable que les trois lascars s’en sortiront sans rendre de compte. On a ainsi pu sentir une certaine frustration chez beaucoup de personnes qui auraient souhaité voir une riposte russe avec, si possible, un avion abattu ou un bateau coulé.
Heureusement la Russie pense plus loin qu’en termes de justicier à l’américaine. Que se serait-il passé si elle avait riposté ? Ce n’est pas en coulant un bateau, ou même dix bateaux, ou en abattant dix avions que l’on gagne une guerre. Au contraire, plus il y aura de bateaux coulés et d’avions abattus, plus il sera difficile de revenir en arrière et de tout stopper. Une guerre a sa propre vie et, une fois initiée, il est pratiquement impossible d’y mettre un terme avant la fin du processus. C’est précisément à son initiation que travaillent les néocons depuis longtemps.
La Russie, la Chine et d’autres, travaillent depuis des années pour que ce que les trois lascars ont fait en Syrie soit de moins en moins possible et, peut-être un jour, impossible. Si cela arrivait sans guerre, nous leur devrons une fière chandelle, et il semble que nous soyons sur la bonne voie. L’acte gratuit perpétré par la fine équipe MTM (May-Trump-Macron) a étalé sa futilité aux yeux de tous et a exacerbé la frustration chez ses partisans va-t’en guerre. Mais plus que tout, une autre vérité apparait, et l’on peut imaginer que la frustration est cette fois du côté des stratèges du Pentagone et de l’OTAN. Malgré la non riposte russe, le système de défense syrien, beaucoup moins sophistiqué que celui de l’armée russe, a réussi à abattre 70% des missiles des agresseurs. Qu’en aurait-il été si les systèmes modernes russes avaient été mis en action et si une riposte avait suivi ? L’OTAN/US ne serait-elle plus bonne que pour la parade, c’est-à-dire ne frapper que s’il n’y a aucune riposte ? Le principe de l’intervention humanitaire à coups de missiles sur la population que l’on veut « sauver » en a pris un sacré coup. On peut espérer que, dorénavant, ils y réfléchiront à deux fois avant de tracer d’autres lignes rouges tordues.
Avec reseauinternational