Le chef de l’État a annoncé mercredi 13 juillet que la France mettrait définitivement fin, en octobre, à son opération militaire Sangaris en Centrafrique alors que le pays connaît un regain de tensions.
Lancée en décembre 2013, la mission ne compte plus que 350 soldats sur place, contre 2 000 au plus fort de la crise.
« Involontairement, les forces françaises et onusiennes ont finalement favorisé l’instauration d’un système de cogestion du pouvoir entre Bangui et les milices rebelles », explique Roland Marchal, spécialiste de la Centrafrique et chercheur au CNRS et à l’Institut d’études politiques.
pécialiste de la Centrafrique, chercheur au CNRS et à l’Institut d’études politiques (Sciences-Po Paris).
« Le retrait de l’opération Sangaris en Centrafrique relève de la logique purement politique : la France veut se désengager parce qu’elle n’a pas d’intérêt stratégique dans le pays. Sangaris n’a jamais été une opération très populaire. Les forces françaises sont déployées sur d’autres fronts aux enjeux politiques et médiatiques plus importants, comme en Syrie, en Irak, ou au Sahel et en appui à la lutte contre Boko Haram.
De plus, l’opération française en République centrafricaine (RCA) a été mal préparée politiquement. Les revendications de la Seleka, la coalition des forces rebelles, ont été ignorées trop longtemps. Les Français n’ont pas non plus anticipé l’émergence des anti-Balaka, les milices d’autodéfense, persuadés que tous les problèmes venaient de la Seleka.
Des promesses non tenues
La France a poussé la communauté internationale à se focaliser sur la tenue de nouvelles élections, sans avoir approfondi le processus de réconciliation ni renoué un dialogue politique dans le pays. Le gouvernement centrafricain se retrouve maintenant confronté à d’importantes difficultés, parce que les promesses faites aux mouvements armés pour aller le plus rapidement possible aux élections n’ont pas été tenues.
Involontairement, les forces françaises et onusiennes ont finalement favorisé l’instauration d’un système de cogestion du pouvoir entre Bangui et les milices rebelles sur l’ensemble du territoire. Remettre cette situation en cause ne peut que provoquer des affrontements.
Mettre fin au système de cogestion
Les tensions centrafricaines ne sont pas uniquement liées à la faiblesse militaire du gouvernement. Les autorités doivent relancer le dialogue intercommunautaire, négocier avec les mouvements rebelles : tout cela n’exige pas forcément des fonds importants ou une force militaire conséquente.
Le président Faustin-Archange Touadéra n’est là que depuis quelques mois, il est encore trop tôt pour savoir s’il pourra corriger les erreurs de la transition et avancer dans la réconciliation. Mais pour restaurer l’autorité du gouvernement légitime, il faudra mettre fin à ce système de cogestion entre le gouvernement, les forces internationales et les rebelles.
Or, restées seules, les forces de la Minusca, la mission de stabilisation des Nations unies en Centrafrique, sont réticentes à le faire parce qu’elles savent que cela engendrerait de nouvelles tensions avec les combattants de la Seleka et avec les anti-Balaka. Alors, pourquoi prendre le risque de mourir pour Bangui ? »
avec la-croix