Le financement des start-up en Afrique subsaharienne fait toujours l’objet de difficultés sans comparaison sur les autres continents. On évalue les besoins de financement des jeunes pousses africaines à quelque 140 milliards de dollars par an… Alors que nombreuses d’entre elles disposent de surliquidités en devises, les banques traditionnelles sont particulièrement averses au risque. Et si les fonds de capital-investissement offrent des perspectives prometteuses, ils sont encore au stade de la petite enfance pour ce qui est du financement d’amorçage dont les start-up africaines ont tant besoin.
Pourtant, comme dans d’autres domaines, l’Afrique pourrait transformer une contrainte en opportunité, les nouvelles technologies permettant de déployer des solutions plus simples et à moindre coût que ce qui a été mis en place depuis des décennies dans les pays développés. Les innovations à la frontière des nouvelles technologies et de la finance n’ont pas attendu 2017 pour marquer leur impact sur le financement de l’activité économique en Afrique. L’Afrique est depuis longtemps connue pour être un laboratoire en matière d’innovation technologique. De nombreux essais ont déjà été transformés dans le domaine de la fintech. Mais les prochaines années vont marquer un point d’inflexion dans les méthodes de financement, grâce aux nouvelles technologies.
De nouveaux modes de financement
De plus en plus, le financement des entreprises passe par un nouveau segment d’investisseurs: les sociétés de services financiers sur mobile. Plusieurs entreprises proposent des financements innovants aux entrepreneurs. Par exemple, au Kenya, les banques offrent des solutions d’épargne et de prêt en ligne. Ainsi, le service M-Shwary, lancé par la Commercial Bank of Africa (CBA) avec Safaricom, premier opérateur au Kenya, propose des crédits à ceux qui n’ont pas accès au secteur bancaire classique.
Le Kenya est tellement avancé en termes d’usages, qu’une start-up californienne, Branch, s’est lancée dans l’aventure en proposant des crédits de 10 à 500 dollars sur une période de six à douze mois, au taux d’intérêt dégressif de 13 à 2 %. Le client obtient son crédit en moins de cinq minutes grâce au big data en analysant ses schémas de consommation via ses relevés M-Pesa (la célèbre monnaie virtuelle de Safaricom). Branch compte déjà 100 000 clients et 75 % de ses prêts vont à des entrepreneurs, souvent pour lancer un petit commerce. Le nano crédit est une initiative essentielle qui permet à des entrepreneurs d’avoir de la trésorerie au quotidien. Ainsi, une femme souhaitant vendre des produits agricoles sur un marché emprunte le matin et rembourse le soir lorsqu’elle a vendu ses légumes par exemple. Le tout grâce à un terminal de paiement électronique mobile. Ce modèle s’adresse souvent en priorité aux femmes car elles sont plus sérieuses ! Le principe d’une tontine high-tech en somme…
Mais l’un des succès les plus méconnus de l’entrepreneuriat africain s’appelle MODE. Cette entreprise kényane a développé un système destiné à fournir des crédits de communication sur mobile, et vend déjà en Inde, aux Émirats arabes unis et au Bangladesh. MODE fournit un accès à des prêts « micro » et « nano » à tous ceux qui n’ont pas de carte bancaire en transformant leurs cartes SIM en cartes de crédit. MODE opère dans 31 pays et compte 150 millions de clients avec un objectif de 250 millions dans les trois prochaines années. Les prêts sont remboursés sur le prochain salaire ou via des paiements réguliers effectués sur le porte-monnaie virtuel des utilisateurs.
Pour se développer, ces sociétés passent souvent par la plateforme financière mauricienne qui reste un lieu privilégié pour ce type d’activités, notamment parce que les capacités de structuration, de gouvernance, ou en termes de montages financiers ou de cadre juridique et légal y sont les meilleures du continent.
Ce qui manque encore pour l’éclosion d’un boom dans les services financiers mobile, c’est une réglementation à la fois incitative et sécurisante pour les investisseurs et les entrepreneurs. Ce n’est pas un hasard si la plupart de ces innovations ont eu lieu au Kenya. En matière de services financiers, on observe trop souvent une frilosité des régulateurs, qui sont parfois démunis face à des enjeux totalement nouveaux. Enfin, il convient de mettre en place des cadres réglementaires stricts et sans doute uniformes afin de parer à certaines dérives comme le blanchiment. De même, l’accès à l’internet haut débit reste insuffisant pour tenir la promesse d’une véritable diffusion des services financiers mobiles.
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