A Cannes, dans le sud de la France, où se tient jusqu’à dimanche le 70ème Festival international de cinéma, il y a une compétition pour la Palme d’or, des stars, des paillettes. Et puis quelques films qui parlent de la réalité africaine, dans les sections parallèles. C’est le cas du documentaire « Makala », du Français Emmanuel Gras, tourné en République démocratique du Congo et projeté ce mercredi à la Semaine de la critique.
Avec notre envoyée spéciale à Cannes, Sophie Torlotin
Makala signifie « charbon » en swahili. Ce charbon que s’échine à fabriquer un petit paysan du Katanga, Kabwita Kasongo. Emmanuel Gras le filme abattre un arbre à la hache, puis le débiter et construire un four afin de consumer le bois. Il place ensuite le combustible dans de lourds sacs attachés à un vélo. Puis il pousse l’attelage sur une cinquantaine de kilomètres pour vendre sa marchandise à la ville, Kolwezi.
A 28 ans, ce père de trois enfants espère ainsi récolter suffisamment d’argent pour offrir un avenir meilleur à sa famille. En voyant Kabwita Kasongo à l’effort, on pense aux mythes antiques, comme celui de Sisyphe dans la mythologie grecque, condamné à pousser éternellement jusqu’en haut d’une colline un rocher qui en redescendait une fois au sommet.
« Né d’une image »
« Le film est né vraiment d’une image. C’est-à-dire que j’ai vu des gens pousser ces vélos-là et j’ai trouvé ça visuellement quelque chose de puissant, explique le réalisateur Emmanuel Gras. Et j’ai eu envie de creuser derrière cette image-là, quelle était la vie de quelqu’un qui faisait ça ? Un mythe, c’est bien souvent en fait une idée : Sisyphe, celui qui pousse éternellement son chargement. Là c’est ça. Tout s’incarne en fait par une image, et résume une forme de condition humaine ».
Emmanuel Gras a terminé le film quelques jours avant sa présentation cannoise. Il compte bien retourner au Katanga au plus tard dans un an pour montrer Makala à Kabwita Kasongo et son village.
Avec rfi